Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais ces derniers temps, un tsunami déferle dans nos parfumeries. Non lassés de nous arroser avec un flot de nouveautés, c'est un raz-de-marée d'eaux qui déferle. Eaux légères, eaux fraîches, eaux sensuelles, eaux chaudes ou froides, bientôt sans doute verrons nous des eaux-taries, des eaux-rang outan, des eaux-piacées ? On ne sait plus trop quoi inventer pour vous faire dépenser les petits soussous que vous cachez dans la popoche, et cela vire au ridicule ! A peine aviez vous apprivoisé votre Shalimar Parfum Inital, Bottega Veneta, Narciso Rodrigez de l'an dernier, peut être même avant même de les avoir découvert, on vous en propose déjà une version plus "fraîche" pour les beaux jours, soit disant !
A force de déferlante, vous en oubliez sans doute que vous avez chez vous quelques trésors, que vous pouvez porter par tous temps : les parfumeurs le savent, les orientaux aussi, est-il besoin qu'un parfum soit une eau pour être agréable même quand il fait chaud ? N'oublierait on pas de vous rappeler qu'un parfum ambré par exemple, exhalera au mieux ses notes chaudes et baumées qui fondront sur la peau, au sens propre quand la chaleur monte ? N'oublierait on pas que dans votre parfum préféré, il y a des notes de fond, et qu'elles seront sur vous certainement du plus bel effet si vous ne vous inondez pas et que vous maitrisez le dosage avec quelques degrés de plus ?
Quel gâchis ! On a envie de dire stop, ça suffit, mais non, encore et toujours la même vague qui déferle, comme si les marques ne voulaient pas reconnaitre que parfois, faire une pose, mieux communiquer sur un "best", une valeur sûre, vaut mieux que d'essayer encore et toujours d'attirer le chaland par un énième opus ?
A quoi bon ? Parfois même j'en arrive à de mauvaises pensées, en me disant qu'il serait plus judicieux de virer les "markéteux", couteux et qui "pondent" tous la même chose, pour mieux se recentrer et proposer un vrai beau produit.
Bien sûr, dans tout cela, il y a des exceptions, les trois exemples choisis et la sélection que nous avons effectuée pour le prix Olfactorama 2012 en apportent un peu la preuve. Oui, une variante "eau" peut parfois révéler une facette cachée ou le caractère inattendu d'un parfum qui n'aurait pas tout exploité, mais cela ne réduit-il pas la part de risque, avec un consommateur au final frustré, car cette "eau" adoptée n'aura souvent vécu qu'un seul été, et noyé dans ce flot de déclinaisons ?
Le résultat de ce tsunami : il se murmure que les ventes plongent, que le chiffre d'affaire de la parfumerie ne se maintient que parce les prix augmentent, mais lorsque l'on parle de crise, n'est elle pas parfois, provoquée par ceux là même qui sont censés chercher les solutions ? Le consommateur, l'amateur, le passionné, qui s'intéresse un peu à un domaine, ne dit il pas tout simplement STOP ? En attendant d'être tous noyés dans l'eau, le bateau coule, et qui fait quoi ? On installe l'Eau Courante, qui terminera à la Chasse d'Eau ???
Les trois exemples : la vague me porte ou pas ?
Bottega Veneta Eau Légère : soit vous aimiez Rush de Gucci et vous ne le trouvez plus, et là, vous pouvez craquer car à quelques variations "cuir" près, Michel Almeirac ressert la même formule, soit vous aimez l'original et celui-ci n'apportera qu'une illusion de fraîcheur à un parfum qui ne l'est pas de facto.
Shalimar Parfum Initial l'Eau, l'Eau Sensuelle (vous suivez?) : parfaite illustration d'une de ces débilités markéting qui m'échappe et bonne chance pour vous y retrouver dans les flacons exposés chez Sephora, mais par contre, parfaite illustration aussi de ce que je mentionnais plus haut, il dévoile encore une autre facette d'un parfum déjà très bien fait, et il faut reconnaitre que c'est joli, très "Wasser", et très sensuel pour le coup.
Narciso Rodriguez For Her l'Eau : vous ne connaissiez pas la variation de l'an dernier, avec un tiaré qui magnifiait l'accord originel et lui apportait une vraie douceur estivale ? Et ben tant pis pour vous : trop tard ! Cette année, c'est un floral fruité légèrement vert plutôt banal que la marque vous propose. For Her l'original se devine vaguement, la marque le revendique, et c'est à vous de voir, mais franchement, pourquoi ? Parce qu'il s'appelle "L'Eau" ??
Bottega veneta est déjà délicat, du moins ce n'est pas une fragrance entêtante et hyper capiteuse, on se demande donc quelle utilité d'en faire une version délavée? Et même comme stratégie de vente, cela laisse perplexe. On disperse les achats chez une même compagnie, on ne les augmente pas au total, donc aucun profit supplémentaire dans ces cas.
RépondreSupprimerThierry, c'est drôle, j'ai commencé à écrire un texte traitant un peu du même sujet (les noms des flankers, la confusion du consommateur, etc...) très belle analyse !
RépondreSupprimerLa raison d'être des flankers:
RépondreSupprimerEvidemment je ne peux pas vous dire comment est-ce que ça fonctionne en France mais au moins je connais bien la situation en Espagne. Les boutiques espagnoles vraiment payent cher pour avoir des concessions d'une marque ou d'une autre (Chanel, Dior, Guerlain...) et en même temps elles sont obligées d’acheter toutes les nouveautés (un nombre minimum de flacons à chaque reprise) et encore ces nouveautés doivent être payées au moment même de la livraison (pas de crédit pour les boutiques, seuls les grands magasins comme El Corte Inglés qui louent des stands aux marques bénéficient de 90-180 jours de crédit). Cette façon de procéder permet aux grandes firmes de faire leur chiffre d'affaires, leurs prévisions économiques se réalisent et leurs bilans commerciaux tombent justes à la fin juin et à la fin décembre tous les ans. Et c’est ainsi et non autrement que ces tsunamis olfactifs peuvent être expliqués.
On m'a dit chez Nocibé que Shalimar Initial L' Eau, L'Eau Sensuelle était exactement le même parfum que Shalimar Initial L' Eau (très long à écrire, tout ça!). Il s'agirait simplement d'une présentation différente, plus soignée (flacon givré) pour la St Valentin et plus, si affinités. Et comme je n'ai testé que "l'Eau" ...
RépondreSupprimerHermeline, je suis d'accord, Bottega se suffit à lui même et la marque n'avait pas besoin de tomber dans ce travers avec un "Rush" actualisé qui n'apporte rien, alors que le parfum n'est même pas encore vraiment installé !
RépondreSupprimerJeanne, il semble que les ressentis se croisent ! Il y a encore à écrire sur le sujet : trop c'est finalement moins...
Viz : merci pour ce complément d'info pertinent.
Zab : L'Eau sensuelle m'avait semblé encore plus douce et sensuelle que l'Eau par l'apport des muscs doux des plus "peau". Si je me trompe, c'est que vraiment, je confirme, la débilité et le ridicule n'ont pas de limite pour nous embrouiller.
Au final, je crois que nous sommes de plus en plus à penser : "fuyons vers d'autres marques comme Lutens, Diptyque, Réminiscence", pour qui chaque nouveau produit fait encore l'objet de vraies réflexions marketing et stratégiques pour apporter de vrais compléments !