lundi 29 octobre 2012

Lancôme avant, Lancôme cette année....

C'est en feuilletant un livre sur les plus belles photos de Bettina Rheims que m'est venue l'idée de rebondir sur l'article de Sophie (ici) et Juliette (ici) au sujet de Lancôme, pour en rajouter une louche, puisque la marque n'hésite pas à nous tartiner de sucreries.

Avant, Lancôme, c'était Bettina Rheims, la toile de Jouy, la rose, la vraie, tendre et délicate, de belles matières et surtout, un style, sobre et élégant. C'était Trésor, une référence. Alors que si l'on s'y intéresse un petit peu, beaucoup de marques de luxe misent sur la sobriété et la discrétion pour afficher un vrai luxe, travaillé sur du détail, Lancôme propose cette année une espèce de parfum qui n'a rien a voir avec cela. 

Prenez une bonne grosse louche de sucre et ajoutez y une bonne grosse dose de boosters pour que ça sorte du lot chez Sephora, et lancer l'envahisseur en promettant qu'il changera votre vie ! Ben voyons, c'est connu, ce genre de parfum transforme votre vie en un bonheur immense ? Surtout, insistez bien pour dire que vous avez fait beaucoup d'efforts pour en faire le plus beau parfum du monde (5000 essais, mon oeil, dont la plupart sont sans doute des ajustements pour trouver la meilleure adéquation économique), mentez, c'est plus crédible (le premier iris gourmand, c'est faux), et dites que vous êtes allé à l'autre bout du monde pour chercher le patchouli et l'iris, (là, on vous prend vraiment pour des c...).
Aujourd'hui, Lancôme pourrait faire sa pub dans nunuche magazine, avec non plus des photographes de talent, un vrai sourire et une belle toile tissée pour faire une campagne, mais un banal travail sur photoshop. Même les parfumeurs revendiqués semblent avoir été choisis pour leurs noms, et pas pour leur talent..... Le pire dans tout cela, c'est que vous croisez maintenant dans la rue des femmes et jeunes filles, influençables sans doute, dont le style élégant tranche avec ce parfum (ce truc ??) qu'elles portent. Aurait-elles oublié leurs propres vies, leurs vraies émotions au point de ne plus penser qu'il existe quelques merveilles qui pourraient mieux correspondre à leur personnalité ? Oui, sans doute, à cause du matraquage.

 

La Vie est Belle me révulse, et je ne suis pas le seul. Il véhicule tout ce que le parfum ne devrait pas être, c'est à dire une boite de sucre vendue au prix d'un parfum de luxe, et si je peux moi aussi contribuer à ce que certaines femmes se tournent vers autre chose car elles auront lu plusieurs articles le décrivant comme un parfum débile, et bien c'est tant mieux, les rues seront vraiment plus belles. Beaucoup parlent en coulisses, mais se taisent et s'inclinent devant la marque, Méchant loup ouvre sa gueule, en leur nom aussi ! Olivier Polge, Dominique Ropion et Anne Flipo aimeraient sans doute également qu'on leur demande de faire plus souvent des Dior Homme, Portrait of a Lady ou La Chasse aux Papillons, plutôt que du Carambar au sourire photoshopé ! Qu'on se le dise !

Lancôme redeviendra t elle une vraie marque de luxe?

Illustrations : Lancôme, Bettina Rheims, Nunuche Magazine.

mardi 23 octobre 2012

Aura Maris et Mito : hommages indirects à Edmond Roudnitska ?

Vero Kern et Lorenzo Villoresi ne lancent pas de nouveauté chaque année, mais il s'avère qu'en 2012, tous deux choisissent de présenter un nouvel exercice de style. Ils ne se sont sans doute pas concertés, mais il y existent des inspirations créatives qui conduisent à des hasards heureux. Leurs nouveaux bébés conjuguent au moins deux points communs : l'Italie en trame de fond, encore, toujours et c'est bien normal, et sans doute aussi la patte d'un de nos grands maitres : Edmond Roudnitska.

La mer semble avoir été le point central d'Aura Maris. Mer d'Italie bien sûr, hommage au vent de méditerranée, olfactivement, ce n'est pourtant pas les notes iodées qui ressortent. J'y vois plutôt une trame aromatique de lavande et de basilic, nuancée de citron et de mandarine, très rapidement rejointe par des notes fraîches et florales, où le jasmin transparent traduit par l'hédione s'exprime tout en finesse aux coté d'une rose cristalline. Le sillage est presque chypré, mais se fait aussi fin que le son d'un violon ; il résonne, scintille, étincelle... Quelques points commun avec l'Eau de Rochas ressortent, mais dans le style très réussi et par ses notes exploitées à merveille, c'est à un chef de file créé par Edmond Roudnitska que fait écho Aura Maris, qui depuis 1966, parfume les hommes. Ce grand classique, c'est L'Eau Sauvage. Aura Maris en reprend la trame, et vu les "claques" question formule prises pas le modèle, l'élève, lui, vaut largement le coup de s'y intéresser. Quelques notes marines en plus, mais très pur, très fin, très beau.

Mito, lui aussi, rend hommage à l'Italie, plus précisément à un jardin renaissance, dont Véro garde les souvenirs portés par le vent, d'arbres fleuris, de fruits charnus, de terre mouillée et de formes. Les notes de Mito semblent également s'inspirer des grands chefs d'oeuvre composés par le maitre, surtout de Diorella, l'Eau Fraîche pour l'envolée et de Femme, pour le sillage et la tenue. D'autres grands chyprés verts comme Vent Vert et Cristalle, puis les chyprés complexes comme Mitsouko ont guidé les pas de Véro. Départ vert et aldéhydé, trame de muguet, jasminée et fruitée, épices, bien sûr, et en point d'orgue, dans le fond, le prunol, base devenue emblématique des grands chypres classiques, qui exprime dans l'évolution sur peau de Mito la profondeur de sa texture charnelle proche de la prune noire. Mito est un parfum stylé, dont l'envolée très fine et fraîche des grands classiques cités contraste avec un fond très dense et charnel, traité de manière très actuelle comme dans Mon Parfum Chéri par exemple. Un parfum élégant et sans compromis, comme sait les faire Véro Kern.

Un accord fait de seringat, de muguet, de jasmin, d'hédione, d'épices comme le cumin et la noix de muscade, d'aldéhydes, de rose fraîche et d'iris construit la signature du style d'Edmond Roudnitska. Un style à la fois texturé et dense, mais qui reste très fin, d'une élégance rarement égalée, même encore de nos jours. Ce style, cet accord jouent sans doute, l'air de rien, une certaine influence dans le processus de création de ces deux nouveaux, jolis, bébés. Un hommage ? Peut être bien ?

Illustrations : cafleurbon - Edmond Roudnitska, Lorenzo Villoresi, Vero Kern.

lundi 15 octobre 2012

Noir - Tom Ford 2012 : noir c'est noir, il y a de l'espoir !

Avez vous remarqué la semaine dernière une publicité sur laquelle on vous demandait de ne garder qu'une seule chose ? Une seule musique, un seul vêtement, un seul baisé ? Cette publicité pour Das Auto (la voiture) m'incite à penser que si je ne devais retenir qu'un seul lancement cette année en dehors du circuit de niche où Volutes, Vanille et Une Voix Noire me laissent penser que tout n'est pas si noir en création, cet unique lancement, ce serait Noir de Tom Ford. Souvent conquis par les créations dirigées par cet esthète, je tombe littéralement sous le charme de son dernier parfum qui ne faillit en aucun cas au style véhiculé par le styliste. Coïncidence ou non, il sort en même temps que Skyfall, dans lequel Daniel Craig porte les costumes taillés sur mesure par Tom Ford. Ce parfum serait il celui qui accompagne James Bond ?

De la classe, on s'y attendait, de l'originalité, beaucoup moins, une belle surprise, on ne voulait pas y croire ! 
Pourtant, voilà, voilà, oui voilà c'est ça ! C'est ça que j'attends d'un parfum !

Noir débute sur la note très originale d'orchidée végétale reprise à Black Orchid, qui, ici dans un masculin, semble apaisée et trouve naturellement sa place, sans choquer. Comme quoi, rose, iris et violette peuvent faire fi des clichés ? Très finement et subtilement, cet envol végétal légèrement sucré descend sur une trame boisée, épicée, où cèdre, poivre noir, muscade s'unissent pour un effet masculin très lisse et structurant, d'un chic à tomber à la renverse. Ca, c'est pour le coté froid. 
Pour le coté chaud, très vite, la fumée recouvre le tout dans une ambiance tourbée, cuirée qui s'entoure de café torréfié pour nous envelopper d'un hâle chaud, suave, viril mais pas du tout caricatural. Comme quoi, encore, les archétypes peuvent tomber ? L'apothéose enfin en fond, pour le coté "intimate" avec ce patchouli onctueux et texturé, du vétiver, des notes ambrées comme le benjoin et la vanille merveilleusement associés pour se marier à la laine et au cuir de tout vestiaire masculin digne de ce nom. Effet "tabac blond" garanti. Tom Ford n'aurait il pas, comme c'est un peu son habitude, remarqué un certain Coromandel pour demander au créateur du parfum un ferme : "I want some of that in Noir", tellement le fond me le rappelle, en plus fin qui plus est ?
Noir est aussi beau et profond que son nom est simple, comme un tableau de Soulage dont le flacon semble s'inspirer également, le noir s'habille de reflets chauds qui captivent. 

Alors, oui, sans doute, en attendant de voir s'il y aura une réponse ailleurs (je n'y crois pas), sans aucune hésitation, s'il ne fallait retenir qu'un seul lancement mainstream cette année, c'est Noir que je choisis. Il y a bien de l'espoir !

Illustrations : Soulage, Tom Ford.

samedi 6 octobre 2012

Vous en ai-je déjà parlé ?

Je ne me souviens pas vous avoir annoncé, il y a quelques mois de cela, la naissance d'un second blog. Coulissesparfum que je vous invite à consulter ici. 

Moins personnel qu'Olfactorum, plus centré sur l'actualité des lancements et ce qui se passe dans le monde du parfum, Coulissesparfum exprime un propos plus court, plus simple, plus immédiat, pour un regard rapide et direct. Parfois cinglant, parfois enthousiaste, parfois surpris. Sans langue de bois, vous saurez alors tout ce que pense Méchant Loup (Thierry), qui est pour le coup parfois vraiment méchant, pour pouvoir vous aussi, à travers ce bref regard critique, vous faire votre propre avis. 

Non, le parfum n'est pas mort, oui,  la création existe encore, mais oui aussi, parfois, on en a marre, pas mal de choses se disent en coulisses, mais restent derrière le rideau. Ca doit changer !

vendredi 5 octobre 2012

Santal Majuscule : le gagnant.


Le gagnant ou la gagnante du flacon de Santal Majuscule est :

CC (dernier commentaire). 

Félicitations et merci pour votre enthousiasme, en souhaitant que cette rencontre avec Santal Majuscule soit le début de longues histoires... 

Merci de bien vouloir me communiquer vos coordonnées par mail sur olfactorum@gmail.com afin que le service presse de Serge Lutens puisse vous faire parvenir un flacon.

samedi 29 septembre 2012

Santal Majuscule - Serge Lutens 2012 : rose des Sables. Gagnez un flacon !

Lorsque l'on parle de santal, un pays vient immanquablement en tête, c'est l'Inde ! Une fleur fait en général écho à ce pays, outre le jasmin et l'oeillet, il s'agit de la rose, pour la délicatesse de ses pompons. 

Lorsque Serge Lutens décide de s'attaquer à ce magnifique bois qu'est le santal, il nous en livre plusieurs visions. C'est dire son admiration pour cette matière !

La première, un Santal de Mysore, le plus beau, le plus pur, dans un magnifique parfum de peau très rond, très doux, très fondant, qui reprend les codes de Féminité du bois en ajoutant quelques notes confites et épicées à ce bois si précieux et lacté. Sur peau, c'est une petite merveille. 

Il l'imagine aussi en Santal Blanc, agrémenté de poivre, d'encens et de muscs blancs (une bonne dose), dans une vision éthérée, d'un esprit léger mais que je trouve personnellement un peu austère. 

Cette année, il s'attaque à une interprétation du santal, mais il veut l'écrire en majuscule. Un contrepied, une sorte de défi, car d'ordinaire, le santal agit en sourdine pour ne s'exprimer pleinement que sur les notes de fond. Sur une base très inspirée de Jeux de Peau, qui n'a pas tellement percer sans doute, la majuscule s'écrit grâce à un surdosage de bois ambrés (ou bois qui piquent), ici assez bien maîtrisés car pas trop criards, avec juste ce qu'il faut de pleins pour un effet boosteur qui accentuera le santal sans trop dénaturer ses facettes lactées, mais en lui apportant beaucoup plus de corps. La cannelle, autre épice caractéristique de la signature appuyée de certains Lutens, jouera le rôle du pilier de ces boosteurs. Les déliés glisseront vers la rose, fruitée, fondues, marquée de notes d'abricot confit, d'un soupçon de Sauternes (comme le faisait très justement remarquer Sixtine d'Ambregris), de copeaux de bois et de patchouli "laineux". Pour souligner les contours, une évocation du bois de oud se glisse tout naturellement aux cotés de la rose, et le gingembre, aux accents poivrées et citronnés, lui aussi repris à Jeux de Peau et qui a au moins une propriété technique, combiné à l'encens, de lisser le parfum du coeur aux notes de fond dans un fondu, apporte beaucoup de souplesse et de clarté. Parfait, pour une écriture aérienne et chaleureuse !

Peut être moins inspiré que pour Une Voix Noire ou d'autres créations maison avec lesquelles il peut y avoir quelques redondances, peut être déçu parce que Jeux de Peau n'a pas été bien compris, Serge Lutens  reprend quelques traits à ce dernier pour, avec Santal Majuscule, nous offrir sa vision d'une rose barbare, une sorte de rose des sables inspirée d'Inde et d'Orient, qu'il évoque à merveille. Une rose, matinée d'un tout petit accent de oud, pour le clin d'oeil en finesse à la tendance du moment. Une rose, habillée de Santal, un santal musclé, qui s'écrit comme Sari, Sables ou Sahara, avec un "S" en majuscule. 


GAGNEZ UN FLACON DE SANTAL MAJUSCULE !

La marque Serge Lutens se propose de faire gagner un flacon de Santal Majuscule à celle ou à celui qui laissera le commentaire le plus pertinent sur sa propre interprétation de ce parfum. Pour ne pas faire peur, ne soyez surtout pas trop long, mais n'hésitez pas, l'enjeu en vaut la chandelle, non ?  Réponse dans le courant de la semaine prochaine, en accord avec la marque. A vos plumes !

Illustrations : images de l'Inde, Serge Lutens.

jeudi 20 septembre 2012

Guerlain mon amour : joyeux anniversaire à deux chefs d'oeuvre !

Alors qu'il y a deux heures précisément, Guerlain célébrait avec la Société Française des Parfumeurs les 100 ans de l'Heure Bleue, je réalisais sur le retour, alors que je m'apprêtais moi même à préparer un article sur un Serge Lutens, qu'il y a 20 ans jour pour jour, le 20 Septembre 1992, je découvrais Héritage

Jusque là, Guerlain n'avait fait partie de mon univers qu'à travers le sillage de certains proches par la biais de Jardin de Bagatelle, de Shalimar et de Chamade. Bien sûr, je connaissais déjà Habit Rouge, Vétiver, et Derby, mais aucun n'était "le mien". Quand j'ai pschitté Héritage sur mon poignet, je fus immédiatement transporté dans mes souvenirs. C'était "ça", et il renversait d'un coup tout ce que j'avais tenté de porter jusque là, de Fahrenheit à Cacharel Homme, en passant par bien d'autres.

Depuis ce temps, il y a eu du chemin, et de formations en  matières premières, de l'Osmothèque à Cinquième Sens  en passant par la SFP, le blog et la création, Héritage a toujours été là, présent, comme un talisman pour se retrouver, se ressourcer, reconnecter à mes valeurs, au plus profond de ce qu'est pour moi, la parfumerie. Il fut rejoint bien sûr depuis par la découverte de l'exceptionnel patrimoine olfactif de la marque, par Vol de Nuit, Mitsouko, Chamade, Nahéma, Chant d'Arômes, L'Heure Bleue, qui après 100 ans provoque toujours le même émoi. Ce patrimoine qui devrait être célébré comme celui de l'architecture le fut la semaine passée, me laisse encore aujourd'hui sans voix. Qui en effet, mis à part quelques marques spécialisées le propose ? C'est simple, elles se comptent sur les doigts de la main.

Alors oui, il y a le marketing, la pression des marchés, la concurrence, mais pour moi, même Guerlain Homme, La Petite Robe Noire et Shalimar Initial, quoi que vous en pensiez et vous n'allez surement pas m'épargner, respectent la ligne, le style, les valeurs maison et à quelques rares dérives près, je suis tout compte fait, rarement déçu, sauf peut être par cette législation sévère qui oblige les reformulations. 

Oui, malgré tout, même si aujourd'hui Thierry Wasser revisite l'Heure Bleue (quel parfumeur ne rêve pas d'un tel exercice?) dans une volonté de plaire à un public plus jeune (+ poudré, + aldéhydé, + fumé, et disponible l'an prochain dans la collection "Les Parisiennes"), la petite flamme reste, je ne suis déçu que quelques secondes sur touche car sur peau, la "patte" reste, ce petit coin de bonheur, ce petit bout de flamme qui brille et qui fait que cet amour que l'on ne contrôle pas, cet amour de jeunesse dont on ne fait jamais le deuil, cet amour vibrant du parfum, de la création et des matières premières, est toujours là, au plus profond de moi et de ce qui me plait en la maison.

Oui, malgré tout le contexte, c'est encore loin d'être la catastrophe d'Hiroshima Dior, il y a encore des gens qui y croient et qui aiment leur "maison". J'ai beau me dire parfois "j'aime le parfum et les matières, ils me gonflent avec ce truc", je n'arrive pas à ne pas aimer Guerlain. Guerlain est et reste un socle, au coeur de mes valeurs et de ce que je voudrais voir plus souvent en parfumerie ! Guerlain serait il "Guerlain mon amour" ? 

Bien sûr, ce n'est pas la raison qui parle, mais c'est une flamme qui brille encore ! Encore ?  

Illustration : petite flamme qui brille.