samedi 29 novembre 2014

La mandarine, parfum de saison non ?

 
Avant d'avoir envie d'écrire cet article, je me suis demandé pourquoi j'aimais porter un parfum de mandarine en cette saison, car depuis environ trois ans, quand les premiers froids commencent à se faire sentir, c'est comme si j'en avais besoin. J'ai alors compris il y a peu que la mandarine, en fait, et c'est presque une évidence, est un fruit de saison. Instinctivement, mon odorat et mes besoins parfumistiques se sont dirigés vers les deux parfums qui l'exploitent, tous deux dans une vision assez différente, mais autour d'un trait commun. J'omets volontairement Mandarine Mandarin de Lutens, car celle-ci est beaucoup plus confite, donc moins vive et d'un effet moins naturel que ces deux là.

Le premier est Mandarine, de l'Artisan parfumeur. Celle-ci, très présente et reconnaissable au départ, se développe ensuite vers des notes florales plus chaudes et s'enveloppe dans les muscs blancs. J'aime particulièrement le lien que fait Olivia Giacobetti entre le vivifiant du fruit et la douceur suave de la fleur de frangipanier, qui apporte douceur et un peu de volupté à la texture. Le cèdre et le gingembre, que l'on ne sent pas trop dans le parfum, ne font que "soulever" les notes de mandarine et appuyer le coté frais et vif de cette eau de Cologne qui se vaporise généreusement. Jamais envahissante, toujours juste, cette mandarine donne la pêche pour affronter les froids de l'hiver. 

L'autre mandarine est celle de Hermès, L'Eau de Mandarine Ambrée, concoctée par le talentueux Jean Claude Ellena, et là, j'avoue être bluffé par le trompe l'oeil olfactif qu'il a réussit à harmoniser. Les toutes premières notes ne trompent pas, car il s'agit bien du beau parfum juteux et vivifiant du fruit, mis en valeur par toutes les matières de la palette du parfumeur qui permettent à l'essence de mandarine de se soutenir. Une base fruit de la passion prend le relai pour lui donner de la rondeur, mais là où je reste scotché en admiration, c'est le twist qu'il a réussit avec les notes ambrées et douces. Ce twist est en fait réalisé par la lavande, que l'on ne devine pas tout de suite, mais qui se dévoile sur peau et dans le sillage de cette eau fraîche. Hermès ne la revendique pas, mais elle se tient, là, noblement et dans une naturalité discrète, comme pour enrichir la création et lui donner du corps. Pas si discret ni fugace que cela, l'Eau de Mandarine Ambrée serait donc pour moi une sorte de mandarine bleue, juteuse mais noble, élégante et très agréable à fréquenter, dans la lignée parfaite des autres Eaux de la maison. 

Et vous, préférez vous porter les parfums frais en été, ou n'auriez vous pas envie également, comme moi, de vous laisser revigorer par le piquant de ce merveilleux et délicieux fruit de saison ?

Illustrations : L'Artisan Parfumeur, Hermès.

mercredi 26 novembre 2014

Fin 2014, Gucci sourit, en noir !

Le noir, couleur au combien répandue et associée souvent à l'univers du luxe, ne fait pas peur à Gucci. En cette fin d'année 2014, pas moins de trois nouveaux parfums enrichissent la gamme déjà assez large et ils jouent tous, à quelques nuances près, avec cette couleur. 

La première est dérivée du concept Première ; le flacon est le même, mais le parfum, lui, est très différent, sans être une mauvaise surprise. Gucci Oud semble vouloir surfer sur la tendance "oud" actuelle, mais il le fait de manière plutôt réussie autour d'un accord de oud et de rose, certes déjà vu et exploité, mais dans des parfums plus chers. Le sillage est effectivement luxueux, dense, car les bois soutiennent la rose dans une harmonie très maitrisée, un peu comme l'avait fait David Yurman avec Gold, à savoir une sorte de For Her caressant et habillé d'un cuir oudé. Un accord joli, mais qui malheureusement peut lasser car galvaudé dans cette masse de ouds sans intérêt. Un accord, que Cavali exploite également dans son Oud sur le même modèle, joli mais lassant, comme si les deux maisons s'étaient regardées pour faire pareil au même moment. 

La deuxième nouveauté nous donnera sans doute un peu plus le sourire. Flora, senti à nouveau avant cette nouveauté, reste un banal fruitchouli sans intérêt. Flora 1966, lui, surprend. Au départ, il retient mon attention par sa douceur et sa construction contrastée entre les salicylates, les notes florales de violette, d'aubépine et d'iris, des notes vanillées et surtout, un beau tabac blond ourlé de jolis muscs blancs incroyablement "peau". Il me rappelle quelque chose, que je n'identifie pas de suite, jusqu'à ce que je tombe sur le flacon de Index de Fresh, acheté il y a très longtemps, pour saisir le parallèle. Tabac blond, violette, muscs blanc, mais bien sûr ! Et en plus c'est très joli, ça fait italien et c'est original. 

La troisième, Gucci Made to Measure est un flanker du masculin Gucci by Gucci pour Homme, un flanker plus lumineux, plus vert, où le mordant et le croquant remplace le boisé chaud et se ficelle autour d'une fougère fraîche relativement discrète. Un peu à la manière d'un Only the Brave Wild, il semble vouloir signifier que les hommes en ont assez de renifler des "bois au gasoil" et veulent aussi du vert, du vif, du frais ! Bien fait, avec un joli sillage, mais sans doute pas assez fulgurant de nouveauté pour se mesurer sur un marché saturé ! 
Beaux flacons, luxueux, beaux reflets de noir, intenses et profonds, nuances roses, caramel ou argentées,  Gucci ne broie pas du noir pour autant, car la marque l'exploite plutôt bien.  Problème : à force de voir du noir partout, de sentir du noir et de voir les prix s'envoler, on peut avoir envie d'en broyer du noir, nous les "pauvres" ! 

Illustrations : Gucci Oud, Flora 1966 et Gucci Made to Measure.

dimanche 2 novembre 2014

Battito d'Ali - Profumum Roma 2010 : les anges se posent en Italie !

Je suis un ange, 

Je m'envole tout droit d'un tableau de Michel Ange, où j'ai puisé mon énergie
Dans le ciel, je capte la lumière, intense, chaude et contrastée du ciel de Rome
J'emporte avec moi un brin de nuage, un souffle de vent.

Puis je descends sur la terre de Sicile, où je cueille les agrumes, 
Bergamote, orange, citron, plus haut, je vole quelques amandes,
Avec ma volonté, j'en sors quelques douceurs, pour les palais délicats, 
Limoncello, Bacardi, canestrelli et gianduja seront leur petits noms.

Dans mon sillage flotte alors un peu de sucre, oh, mais pas de celui là, 
Pas de celui qui colle, non, de celui qui se pose, finement, en poudre légère, 
Sur le sablé des biscuits, si fin, aussi ciselé qu'une dentelle de caramel. 

Je croise alors un esprit, emprunt de cette culture, il me comprend, 
Puis, doué d'un certain talent, il me tend un flacon, une fiole, 
Dans celle-ci, il me dit avoir versé le bienfait que je lui inspire, 
Léger, aérien, régressif et doux, mais riche de ces plaisirs. 

Il me parle de l'Italie, des couleurs et des goûts, 
Que je viens de connaître. Nous partageons la même histoire. 
Je retourne alors prendre ma pose, j'ai laissé ma trace, 
Dans la lumière d'un battement d'aile ! 

Un parfum est né : Battito d'Ali.

Illustrations : Profumum Roma et wallpaper "Aile d'ange bleu".

samedi 25 octobre 2014

Sélection d'Automne.

En ces jours de premiers frimas et dès que le soleil se fait plus rare, que le ciel devient gris et les jours un peu tristounes, il est réconfortant de se rabattre sur ses valeurs sûres, des découvertes récentes ou des parfums que je connais depuis maintenant quelques années, mais que j'ai toujours plaisir à redécouvrir en cette saison d'automne. Voici donc ma petite sélection personnelle.

Epice Marine d'Hermes : depuis septembre que j'ai redécouvert ce parfum, je ne me lasse pas de cette fraîcheur citronnée, très légèrement florale, saline et marine, sur un lit de vétiver fumé. Article : ici.

Bel Ami Vétiver d'Hermes : vétiver très subtilement salin également pour ce Bel Ami revisité accompagné d'une note de noisette douce à croquer.

Baudelaire de By Redo : depuis plusieurs années maintenant, dès qu'il commence à faire froid, sa jacinthe fruitée et ses bois chauds se fondent à la peau pour laisser un sillage très doux, original et enveloppant. Article : ici.

Staight To Heaven de By Kilian : pareil, il m'accompagne depuis qu'il est sorti quasiment tous les automnes-hivers. J'adore ce patchouli relevé de rhum et de noix de coco qui laisse un sillage piquant et une peau lactée très douce soutenu d'un santal farineux pour un effet très addictif. Article : ici.

New York Intense de Nicolaï : découvert et adopté cette semaine alors que je portais déjà l'eau de toilette, New York en version intense aura eu raison d'un autre coup de coeur, Special for Gentlemen de Le Galion, car je lui préfère sans doute sa lumière subtilement aromatique, boisée et dorée qui perdure sur peau, à la fougère lavandée du Le Galion. Article : ici.

Allure Homme de Chanel : comme les autres, il revient régulièrement dans mes envies d'automne-hiver, car, à petite dose, j'aime sa fraîcheur nouvelle et son sillage où tabac blond se mêle à la mandarine et au cuir.

Illustrations : By Kilian, ByRedo, Chanel. 

lundi 20 octobre 2014

Elie Saab, Essence N°4 Oud : un parfum "ouddoux" ?

Quand Francis Kurkdjian s'attaque au bois du oud, au combien à la mode mais au combien galvaudé aussi, il sait le faire avec douceur et différence. En effet, outre "son" oud dans la gamme de sa maison FK, dans ce travail pour Elie Saab, il sait garder cette part de douceur et de naturalité qui fait que "ses" ouds, sont finalement, avec ceux de Bertrand Duchaufour, les plus dignes d'intérêt sur un marché inondé.

Ce que je trouve assez merveilleux dans cet Essence N°4, c'est l'idée d'avoir travaillé le cèdre et le oud ensemble, dans un cheminement naturel issu d'une réelle affinité entre le parfumeur et le couturier, sachant qu'Elie Saab est libanais et que le cèdre, lui, est l'emblème du pays. L'accord de ces deux bois nobles fonctionne à merveille ici. Après un départ frais et fugace relativement cologne, le parfum dévoile un sillage très souple autour d'une fleur solaire entre le lys et le jasmin, puis se fond dans les bois où se réveille un cèdre puissant et mat, ponctué d'une touche de pin qui apporte cet aspect camphré proche de ce qu'il sent dans la nature. Un soupçon de poivre le masculinise et l'affine, comme il le fait dans Poivre Samarcande. Enfin, un oud, sans doute naturel, dévoile son animalité contemporaine sur une pointe de mousse et une facette un peu menthée. 

Le parfum n'est pas des plus faciles, mais il a le mérite d'être singulier, avec ce fond boisé moussu un peu sombre et qui "grince" un peu comme dans M/Mink de By Redo, ce qui le rend finalement très addictif. Le poivre et le oud participent au jeu qu'il aime faire avec la peau, et les fameux "bois qui piquent", qui souvent agacent dans ce type de parfum ne se font présents qu'avec parcimonie. Ce parfum me fait voyager au pays des cèdres nobles, provoque une sensation d'élégance et de puissance, comme le fait aussi Poivre Samarcande, tout en ayant également cet aspect cuir doux en fond "à la Cuir d'Ange", et tout en illustrant olfactivement le reflet des perles noir-pétrole sur les robes du couturier.

Ce n'est pas un parfum doudou, c'est certain, mais il s'apprivoise pourtant de la même manière, tellement cet accord de oud-doux s'accorde et se fond à la peau. Alors oui, certes, il est très cher, mais on commence presque à s'y faire. C'est à mon avis le plus intéressant de la gamme des 4 Essences, et sans doute un des ouds qui mérite un minimum son prix.

Illustrations : cèdre du Liban et parfums Elie Saab.

dimanche 12 octobre 2014

Rouge Nocturne - By Terry 2014 : chic nuit !

Quel parfum peut on imaginer de sentir lorsque le ciel d'une nuit américaine se voile de rouge ? Il se dégage alors une atmosphère étrange, un air un peu pesant et une sensation à la fois intrigante et séduisante, qui prête à la rêverie et sans doute aussi, à la séduction. 

Rouge Nocturne s'attache à traduire ce "je ne sais quoi" de séduction étrange et vaporeuse que voudrait véhiculer la personne, femme ou homme, qui le porte. Aplomb des aldéhydes en tête pour un effet "french touch" des plus chic, le parfum se structure ensuite autour d'une rose enveloppante et charnelle légèrement anisée. Une sensation tactile se dégage, accentuée par de précieux baumes, sans doute le doux tolu, le vanillé benjoin, la réglissée myrrhe et le mordant patchouli, matières qui assemblées entre elles ici, forment un ensemble énigmatique et captivant.

Contrairement à l'Inspiratrice, dont je parle dans l'article précédent, l'accord rose-patchouli se montre ici très caressant, très peau, à la fois velouté et tactile. La tête peut faire penser à un parfum français luxueux et élégant comme Rive Gauche, la structure aldéhydes-baumes à Je Reviens de Worth, le fond, lui, peut faire écho à certains Guerlain, et je pense à Héritage en particulier. Il y a pires références me semble t il ?

Rouge Nocturne est en fait le tout premier parfum de la marque qui réussit à capter mon attention et à me séduire au delà des clichés un peu clivés que véhicule cette gamme. Il est beau, très bien construit, séduisant, et sa signature en fait un parfum qui se distingue dans le paysage actuel. La couleur en outre, est très originale. Un vrai coup de coeur, et c'est sans doute normal, un de plus à vrai dire pour les parfums du parfumeur, car c'est un Almeirac ! Tout s'explique non ?

Illustration : nuit rouge sur San Francisco, By Terry.

dimanche 5 octobre 2014

L'inspiratrice - Divine 2006 : du grand spectacle !

Le duo rose patchouli ! Quelle harmonie tellement il fonctionne à merveille. Ainsi, lorsqu'il s'agit de faire un parfum de caractère qui ne laisse pas indifférent, cette association olfactive s'avère une bonne piste. Souvent associé à un accord chypré vert, souvent puissant, on le voit plus rarement associé à des baumes tenaces, pour un faire un parfum de conquête, celui qu écrase tout sur son passage et s'avère dévastateur. 

Ces termes ne sont pas péjoratifs, bien au contraire, car un parfum de caractère est un parfum typé, qui existe et possède une personnalité. L'Inspiratrice est de ceux là ! Les toutes premières notes me laissent une impression de parfum pas très harmonieux, très brutal, avec un patchouli qui arrive tout de suite et une rose relativement éthylique, un peu piquante. 

Pourtant, au bout de quelques minutes, une fois le concert de claquettes annoncé, on se laisse bercer par le spectacle qui s'offre sous vos naseaux ; un sillage dense et langoureux, hyper enivrant glisse derrière vous et laisse immanquablement la trace de votre passage. Les sens sont troublés, ce patchouli furieux et cette rose de feu s'accordent aux baumes précieux et sans doute à l'encens captivant pour sonner le cor et résonner de plus belle. Le parfum se fait sensuel et donne envie de ronronner et de courber le corps comme le ferait un chat, et on se laisse happer, ou l'on déteste tout de go.

Rouge cramoisi, telle est la couleur que m'évoque ce parfum épais et tenace, la musique de Carmen également : claquement de claquettes sur le bois, voix qui chantent fort, robes qui volent et mains levées dans un geste sensuel et séducteur comme l'affirmation d'une conquête. Un sillage digne de l'emblématique Patchouli de Réminiscence, un parfum fort mais signé, un caractère de feu, L'Inspiratrice inspire, et m'a dicté ces lignes en ce jour de premiers frimas dans un élan de grand spectacle !

Illustration : Parfums Divine et James Morgan pour Carmen.