lundi 8 août 2022

Soie Malaquais - Dries Van Noten 2022 : soie pour soi.

Je m'attendais à être surpris par cette collection, mais ni la note trop propre, voir shampoinesque de Fleur du Mal (pourtant créé par Quentin Bisch que j'aime bien d'habitude), ni les notes de fond typiquement Givaudan (déjà vues, revues, et re-revues) de Rock The Myrrh qui me plaisait pourtant bien sur touche, ni le trop acétique Patchouli Cannabis, ni les autres n'auront réussi à me convaincre. Déformation professionnelle ou peut-être trop d'attente d'originalité par rapport au story-telling, toujours est-il que le seul qui a réussi à me séduire, c'est Soie Malaquais

Sans dire qu'il part de quelque chose d'ex nihilo car on retrouve un peu de sa forme dans Gucci Gorgious Gardenia ou dans un Something About Sofia de Bénéfit des années 2010, c'est celui que je trouve original dans la gamme.  La note de marron n'est pas vraiment perceptible, mais elle participe à cette sensation de glace vanille fraise faite pour évoluer sur peau que me laisse ce parfum. Rose, fleurs blanches et fraise, peut-être un peu de framboise, en tout cas une sensation de fruits rouges crémeux et fleuris se détache. On y sent un peu de cardamome dans un effet "lait concentré sucré" qui se développe, accompagné d'une note de thé noir fumé qui se trame bien avec le reste. C'est assez mixte, car impossible de le sexuer facilement, il se fait très doux et fondant sur la peau. 

Je note également que son flacon et les pochons que l'on peut choisir sont assez jolis. Les parfums sont disponibles à la boutique du Quai Malaquais et au Bon Marché. Deux kits d'échantillons très pratiques et pas très chers permettent de les découvrir. 

Illustrations : parfums Dries Van Noten, Patrick Demarchelier. 

dimanche 31 juillet 2022

Gris Charnel - BDK 2019 : bois de peau.


On ne le dira jamais assez, mais la cohérence d'un parfum tient aussi bien au nom qu'au flacon et à ce qu'il contient. Gris Charnel porte bien son nom, et le jus contenu dans le flacon, légèrement coloré en gris, est parfaitement en accord avec l'odeur du parfum. 

Parfum de peau, charnel, c'est en effet ce que l'on ressent dès les premières notes. Le parfum ne s'envole pas sur des notes fraîches et vives, non, il est tout de suite assez sourd et chaud. La cardamome mêle ses facettes citronées légèrement camphrées à celles d'un cèdre et d'un santal qui se lisent tout de suite et constituent la trame de ce parfum. Comme ce sont des bois chauds, il ne s'envolent pas, mais développent une sensation très tactile, très "chair", et pour le coup, donne cette sensation d'une couleur grise qui se pose sur la peau. Une fois posé, on devine des notes irisées de feuille de violette et très rapidement la douceur de la fève tonka et de la vanille apparaissent, mais jamais de manière violente, dans un lien de notes qui s'harmonisent naturellement. Un patchouli clair apporte une belle finition a cet accord bien maitrisé. 

Hélas, à un moment, je remarque juste un petit passage aromatique qui me fait penser à ce que l'on trouve assez souvent parmi les parfums masculins mainstream, mais ce n'est pas forcement gênant, et surtout, c'est assez fondu car la vanille et la fève tonka atténuent cet effet de manière efficace. 

Un beau parfum, qui m'a séduit pas sa cohérence, déjà bien fait en eau de parfum, et qui dévoilera toute sa richesse de "bois de peau" en extrait. 

Illustrations : BDK parfums, Herb Ritts. 

dimanche 8 mai 2022

Blushing Sands - Estée Lauder 2021 : autant en emporte le vétiver !

 


Amateurs de vétiver, vous allez être contents : Blushing Sands, c'est un peu comme si la racine était emportée par un vent de sable chaud, vous le serez sans doute également.  

Les premières notes sont aériennes et salicylées, comme le souffle d'un vent de sable que l'on imagine très bien vu le nom ; la sensation est agréable, légère et très fluide. Le vétiver arrive ensuite tout en douceur, sans les notes réglissées qu'il peut avoir parfois, en gardant ses facettes fumées mais en parfaite transparence, comme s'il avait été allégé. Il est appuyé par la baie rose, elle aussi montante et scintillante. On y devine quelques touches de rose et de notes fuitées mais juste ce qu'il faut pour qu'on ne les remarque pas trop. Un tout petit peu de santal ou de dérivés de bois blancs appuient le fond sur les notes chaudes et vaporeuses d'un ambre léger. 

Boisé de la tête au fond, ce sable rougissant porte parfaitement son nom tant la texture est en adéquation avec. Ce qui trouble, c'est la texture de ce vétiver très souple, dont le sillage discret reste tout en finesse et élégance. Un bien belle alternative à Sycomore, à découvrir, malgré la distribution très confidentielle de cette collection.

Illustration : Estée Lauder parfums.    

dimanche 1 mai 2022

Horace pour Homme : du simple et du bon, comme une sieste sous un figuier !

Horace s'est fait une réputation de simplicité, de ne jamais trop en faire pour se concentrer sur l'essentiel. Pour le parfum, c'est sans doute la même philosophie qui s'est imposée. De belles matières, une composition originale mais pas compliquée à comprendre, une distribution exclusive et ciblée garantissant une marge suffisante tout en contenant le prix. Du bon sens, et du bon goût. 

Axé autour d'un accord de figue et de cèdre, le parfums dévoile des notes citronnées faisant penser un peu au limoncello ou à une tarte au citron meringuée, puis ensuite, le cèdre et la figue jouent de concert dans une logique olfactive harmonieuse et douce, tout en délicatesse. Peut-être un peu de vétiver pour piquer le tout et prolonger la sensation boisée tout en finesse, puis dans le fond, les notes de noix de coco et du santal pour que sur peau, cela soit évident, clair, lisible. 

Une signature jamais envahissante, loin du too-much. Horace est une belle création qui mérite largement de trouver son public. 

Illustrations : figuier et Horace, le parfum. 


samedi 23 avril 2022

Narguilé tout : l'accord narguilé qui fait du chemin.

Cela fait maintenant presque 20 ans qu'Hermes a lancé Ambre Narguilé, un accord d'ambre, de miel et d'épices, parfois agrémenté de pomme et de tabac blond qui s'inspire des bars à chicha et de la fumée des narguilés au combien reconnaissable. La tendance se poursuit avec Spice Bomb, qui met aussi cet accord à l'honneur, en ajoutant un peu de sucre et de notes acidulées. 

Cette année, deux nouveautés remettent cet accord au gout du jour : le premier, c'est Nektar de Laboratorio Olfativo, dans une interprétation douce et ambrée, faite de vanille et de miel. Ce Nektar, sur peau, se fait très caressant, évolue tout en finesse sans envahir, dans des volutes de tabac blond. Les amateurs d'ambres vanillées devraient être conquis. 

L'autre nouveauté, plus grand public, est One Million Elixir. Plus supportable car peut-être un peu moins violent que le sillage de One Million dans ses dérivé précédents, il met à l'honneur une signature narguilé assez marquée, visiblement directement sortie d'une chicha. Je ne trouve pas que le davana revendiqué soit très présent, ni la pomme d'ailleurs, mais l'ensemble est très cohérent et se marie bien avec la trame tubéreuse-cuir de One Million

Avant de conclure cet article, j'aimerais revenir sur un parfum passé quasiment inaperçu mais qui propose aussi ce thème à un prix tout doux. Malt Cuiré de Daniel Hechter se hisse largement à la hauteur des parfums cités plus haut, alors, si vous aimez, foncez ! 


Illustrations : Laboratorio Olfativo, Paco Rabane, Daniel Hechter. 

lundi 28 mars 2022

Cédrat Céruse - l'Artisan Parfumeur 2022 : muguet bucolique.


Fidèle depuis des années à l'Artisan Parfumeur, je n'ai pas caché ma déception sur la collection l'Orient, dont le rapport qualité / créativité / prix me semblait déplacé. Aujourd'hui, je suis heureux de pouvoir me réconcilier avec ce que j'aime chez cette marque : l'audace, la créativité et de belles créations. 

Malgré ce que revendique la marque, l'utilisation de notes légumineuses dans les parfums n'est pas si nouvelle, Balenciaga s'y est essayé il y a quelques années et d'autres créations comme Piment Brulant par exemple, utilisaient déjà les notes végétales créées par Symrise. Ce qui est nouveau ici, c'est qu'elles sont au centre du propos, et sont issues d'accords recréés directement à partir des légumes évoqués. Pour Cédrat Céruse, il s'agit du fenouil. Attention, n'allez pas vous imaginer que c'est la note centrale du parfum : elle sert plutôt à créer un effet, qui donne de l'appui et une couleur originale au parfum. Je dirais ainsi que Cédrat Céruse s'apparente plutôt à un joli muguet bucolique, ourlé de facettes acidulées grâce au citron et au cédrat, anisée grâce au fenouil et à l'aldéhyde anisique (remarqué dans Après l'Ondée), vertes grâce au galbanum ici épuré de ses facettes trop terreuses, et à la feuille de coriandre dont le montant accompagne à merveille la fraîcheur revendiquée. Oui, c'est un beau parfum vert, aérien, frais, lumineux, qui évolue vers une douceur apportée par une belle matière aux notes de muguet aqueux et quelques muscs blancs parfaitement associées et choisis par Quentin Birch. 

Une invitation au potager et à la fraîcheur qu'il est bon de retrouver chez l'Artisan. Hélas, les prix s'envolent, mais les parfums gardent de beaux sillages et une belle tenue.  

Vétiver Ecarlate est un vétiver pamplemousse plutôt sympa, très équilibré, proche de certaines Cologne Hermes mais en plus tenace, plus boisé et qui reste acidulé grâce à la feuille de tomate et à la rhubarbe. 

Tonka Blanc est une belle création vanillée, onctueuse et douce, dans laquelle un extrait naturel de choux fleur, riche et facetté apporte une belle complémentarité olfactive à la fève tonka, au jasmin et aux agrumes.  

Iris de Gris est une sorte de mix entre N°19, Iris Silver Mist et Iris Gris. Il se fait plus terreux, plus sec, mais son sillage remarquable, une verdeur bienvenue et un fond de muscs doux et de violette qui peut aussi faire penser à Infusion d'Iris vont lui permettre, à coup sûr, de ne pas décevoir les amateurs du genre.  

Enfin, le plus original et celui qui me laisse un peu plus perplexe, c'est Musc Amarante. Un dosage inhabituel de notes évoquant l'ambre gris ou la peau mouillée qui me rappelle Peau d'Ailleurs de Philippe Starck, qui utilise la betterave de manière assez évidente sur un lit de muscs pouvant s'apparenter à Mûre et Musc, se laisse glisser sur un accord de violette poudrée qui finalement surprend de classicisme après ce départ tonitruant ; original mais déroutant ! 

Illustrations : l'Artisan Parfumeur. 

jeudi 3 mars 2022

Legend Red - Montblanc 2022 : red dingue !

Le rouge est une couleur impactante, symbole d'énergie et de puissance, et c'est une couleur qui attire le regard. Comment ne pas saluer l'intelligence d'avoir choisi cette couleur emblématique de la marque Montblanc pour fêter les 10 ans du parfum Legend, dans une nouvelle interprétation olfactive ? Identité forte, packaging et flaconnage que l'on remarque, il serait dommage de passer à coté, d'autant que le lancement de ce parfum s'accompagne d'une communication ciblée et pointue, avec notamment une mise en parallèle avec tout un univers créatif dans le dernier The Good Life Magazine, et avant même de parler du parfum, reconnaissions que le flacon fait envie. 

Venons en maintenant à ce qui nous intéresse : qu'est-ce qui est nouveau dans ce flacon tout de rouge vêtu ? Je me souviens avoir assisté au lancement du tout premier Legend, alors qu'Olfactorum était encore jeune. C'était une soirée dans un bel endroit parisien, et la présence du sympathique Olivier Pescheux me motivait à vouloir créer à mon tour un jour, car à cette date, j'apprenais encore. Je me souviens de la toute première impression : Legend est une fougère assez classique, mais j'aimais bien l'envolée marquée par le citron vert, quelques aldéhydes, et sa texture un peu "givrée" qui laissait sur peau quelque chose de familier et de confortable. Dans cette nouvelle interprétation "Red", la structure est la même, mais la tête laisse place à l'orange sanguine, moins piquante et plus douce que le citron vert, au pamplemousse aux facettes boisées, fruitées et souffrées. On reconnait ensuite la trame de Legend, cet accord de sauge appuyée, de lavande fraîche et de bois blancs, de notes propres un peu lessivielles sans excès et qui ne cèdent pas aux bois ambrés trop puissants voire étouffants. Ici, ils se font doux, caressants et duveteux, tout en gardant cette aspect givré que j'aime bien. Le mariage sauge genièvre apporte un coté "peau d'homme", et s'accentue d'une toute petite pointe de cumin à peine perceptible, mais qui saura rencontrer la peau de manière naturelle. Enfin, par rapport à l'original, Legend Red se pare de notes plus ambrées, plus vanillées, avec un aspect bonbon au caramel que je trouve particulièrement bien dosé et surtout, très actuel. 

Pour un lancement grand public, il se pose relativement calmement sur peau, sans en faire des tonnes. Le parfum "fait le job" comme on dit, et, à en croire quelques retours, il semblerait qu'il fonctionne très bien en parfumerie. Pour ses 10 premiers printemps, souhaitons un bel anniversaire à Legend et bravo à Interparfums pour ce lancement Legend Red intelligent et réussi ! Oui, j'aime le rouge, vous en doutiez ? 

Illustrations : photo personnelle autour du rouge et Montblanc (Interparfums).