samedi 29 septembre 2012

Santal Majuscule - Serge Lutens 2012 : rose des Sables. Gagnez un flacon !

Lorsque l'on parle de santal, un pays vient immanquablement en tête, c'est l'Inde ! Une fleur fait en général écho à ce pays, outre le jasmin et l'oeillet, il s'agit de la rose, pour la délicatesse de ses pompons. 

Lorsque Serge Lutens décide de s'attaquer à ce magnifique bois qu'est le santal, il nous en livre plusieurs visions. C'est dire son admiration pour cette matière !

La première, un Santal de Mysore, le plus beau, le plus pur, dans un magnifique parfum de peau très rond, très doux, très fondant, qui reprend les codes de Féminité du bois en ajoutant quelques notes confites et épicées à ce bois si précieux et lacté. Sur peau, c'est une petite merveille. 

Il l'imagine aussi en Santal Blanc, agrémenté de poivre, d'encens et de muscs blancs (une bonne dose), dans une vision éthérée, d'un esprit léger mais que je trouve personnellement un peu austère. 

Cette année, il s'attaque à une interprétation du santal, mais il veut l'écrire en majuscule. Un contrepied, une sorte de défi, car d'ordinaire, le santal agit en sourdine pour ne s'exprimer pleinement que sur les notes de fond. Sur une base très inspirée de Jeux de Peau, qui n'a pas tellement percer sans doute, la majuscule s'écrit grâce à un surdosage de bois ambrés (ou bois qui piquent), ici assez bien maîtrisés car pas trop criards, avec juste ce qu'il faut de pleins pour un effet boosteur qui accentuera le santal sans trop dénaturer ses facettes lactées, mais en lui apportant beaucoup plus de corps. La cannelle, autre épice caractéristique de la signature appuyée de certains Lutens, jouera le rôle du pilier de ces boosteurs. Les déliés glisseront vers la rose, fruitée, fondues, marquée de notes d'abricot confit, d'un soupçon de Sauternes (comme le faisait très justement remarquer Sixtine d'Ambregris), de copeaux de bois et de patchouli "laineux". Pour souligner les contours, une évocation du bois de oud se glisse tout naturellement aux cotés de la rose, et le gingembre, aux accents poivrées et citronnés, lui aussi repris à Jeux de Peau et qui a au moins une propriété technique, combiné à l'encens, de lisser le parfum du coeur aux notes de fond dans un fondu, apporte beaucoup de souplesse et de clarté. Parfait, pour une écriture aérienne et chaleureuse !

Peut être moins inspiré que pour Une Voix Noire ou d'autres créations maison avec lesquelles il peut y avoir quelques redondances, peut être déçu parce que Jeux de Peau n'a pas été bien compris, Serge Lutens  reprend quelques traits à ce dernier pour, avec Santal Majuscule, nous offrir sa vision d'une rose barbare, une sorte de rose des sables inspirée d'Inde et d'Orient, qu'il évoque à merveille. Une rose, matinée d'un tout petit accent de oud, pour le clin d'oeil en finesse à la tendance du moment. Une rose, habillée de Santal, un santal musclé, qui s'écrit comme Sari, Sables ou Sahara, avec un "S" en majuscule. 


GAGNEZ UN FLACON DE SANTAL MAJUSCULE !

La marque Serge Lutens se propose de faire gagner un flacon de Santal Majuscule à celle ou à celui qui laissera le commentaire le plus pertinent sur sa propre interprétation de ce parfum. Pour ne pas faire peur, ne soyez surtout pas trop long, mais n'hésitez pas, l'enjeu en vaut la chandelle, non ?  Réponse dans le courant de la semaine prochaine, en accord avec la marque. A vos plumes !

Illustrations : images de l'Inde, Serge Lutens.

jeudi 20 septembre 2012

Guerlain mon amour : joyeux anniversaire à deux chefs d'oeuvre !

Alors qu'il y a deux heures précisément, Guerlain célébrait avec la Société Française des Parfumeurs les 100 ans de l'Heure Bleue, je réalisais sur le retour, alors que je m'apprêtais moi même à préparer un article sur un Serge Lutens, qu'il y a 20 ans jour pour jour, le 20 Septembre 1992, je découvrais Héritage

Jusque là, Guerlain n'avait fait partie de mon univers qu'à travers le sillage de certains proches par la biais de Jardin de Bagatelle, de Shalimar et de Chamade. Bien sûr, je connaissais déjà Habit Rouge, Vétiver, et Derby, mais aucun n'était "le mien". Quand j'ai pschitté Héritage sur mon poignet, je fus immédiatement transporté dans mes souvenirs. C'était "ça", et il renversait d'un coup tout ce que j'avais tenté de porter jusque là, de Fahrenheit à Cacharel Homme, en passant par bien d'autres.

Depuis ce temps, il y a eu du chemin, et de formations en  matières premières, de l'Osmothèque à Cinquième Sens  en passant par la SFP, le blog et la création, Héritage a toujours été là, présent, comme un talisman pour se retrouver, se ressourcer, reconnecter à mes valeurs, au plus profond de ce qu'est pour moi, la parfumerie. Il fut rejoint bien sûr depuis par la découverte de l'exceptionnel patrimoine olfactif de la marque, par Vol de Nuit, Mitsouko, Chamade, Nahéma, Chant d'Arômes, L'Heure Bleue, qui après 100 ans provoque toujours le même émoi. Ce patrimoine qui devrait être célébré comme celui de l'architecture le fut la semaine passée, me laisse encore aujourd'hui sans voix. Qui en effet, mis à part quelques marques spécialisées le propose ? C'est simple, elles se comptent sur les doigts de la main.

Alors oui, il y a le marketing, la pression des marchés, la concurrence, mais pour moi, même Guerlain Homme, La Petite Robe Noire et Shalimar Initial, quoi que vous en pensiez et vous n'allez surement pas m'épargner, respectent la ligne, le style, les valeurs maison et à quelques rares dérives près, je suis tout compte fait, rarement déçu, sauf peut être par cette législation sévère qui oblige les reformulations. 

Oui, malgré tout, même si aujourd'hui Thierry Wasser revisite l'Heure Bleue (quel parfumeur ne rêve pas d'un tel exercice?) dans une volonté de plaire à un public plus jeune (+ poudré, + aldéhydé, + fumé, et disponible l'an prochain dans la collection "Les Parisiennes"), la petite flamme reste, je ne suis déçu que quelques secondes sur touche car sur peau, la "patte" reste, ce petit coin de bonheur, ce petit bout de flamme qui brille et qui fait que cet amour que l'on ne contrôle pas, cet amour de jeunesse dont on ne fait jamais le deuil, cet amour vibrant du parfum, de la création et des matières premières, est toujours là, au plus profond de moi et de ce qui me plait en la maison.

Oui, malgré tout le contexte, c'est encore loin d'être la catastrophe d'Hiroshima Dior, il y a encore des gens qui y croient et qui aiment leur "maison". J'ai beau me dire parfois "j'aime le parfum et les matières, ils me gonflent avec ce truc", je n'arrive pas à ne pas aimer Guerlain. Guerlain est et reste un socle, au coeur de mes valeurs et de ce que je voudrais voir plus souvent en parfumerie ! Guerlain serait il "Guerlain mon amour" ? 

Bien sûr, ce n'est pas la raison qui parle, mais c'est une flamme qui brille encore ! Encore ?  

Illustration : petite flamme qui brille.

mardi 18 septembre 2012

Manifesto - Yves Saint Laurent 2012 : gourmand cubiste !

"A l'aube du troisième millénaire, la femme se réincarne en Samsara", disait le slogan en 1989. Depuis, Samsara s'est effacé, Guerlain le laissant vivre au gré de variations plus ou moins réussies, jusqu'à ce qu'il disparaisse quasiment des rayons.

En 2012, la femme qui aimait Samsara pourrait bien retrouver de loin un petit quelque chose en Manifesto. Ce parfum, en effet, même s'il reprend certains codes salicylés et vanillés à Hypnôse de Lancôme et une trame rhubarbe-macarons-amande-cuir à Play for him de Givenchy, n'en demeure pas moins dénué d'une personnalité propre. Un musc "vert", aux notes végétales de sève de feuilles froissées assez "feuilles d'arbre parisien", presque lait de figue, accompagne toute l'évolution du parfum, de la tête à ce qui restera sur peau, et celle-ci illumine la composition. Une belle poire juteuse et sucrée s'associe à ce sillage d'amande dans un écho lointain à Petite Chérie, sans en avoir la délicatesse romantique, mais en tout en douceur quand même.

Pourtant, ce qui me frappe, c'est un sillage gourmand certes, mais lumineux, très maîtrisé et qui parfois, sous certains angles, se montre proche de Samsara par les facettes florales de muguet, de jonquille conjugués au santal lacté "figue" et aux notes vanillées. Certains pourraient y voir aussi une filiation "lys" avec le remarquable Nu.
Finalement, Manifesto n'est pas une si mauvaise surprise que son petit frère de chez Lancôme, qui sous prétexte de mièvrerie, nous promet une vie plus colorée. L'art dosé d'oser un peu, la couleur, cette année, c'est un parfum gourmand et vaporeux, qui dans une vision "non matière" du parfum devient cubiste, comme un assemblage de cases olfactives coloré et lumineux, et il se pourrait bien qu'il se nomme Manifesto !

Illustrations : Helma Stevens, Yves Saint Laurent.

samedi 8 septembre 2012

Vanille - Réminiscence 2012 : Miss Shalimar au grand jour.

Depuis plusieurs années maintenant, je ne comprends toujours par pourquoi Guerlain ne s'est jamais penché sur le nom d'un Miss Shalimar. Faisant écho aux publicités du parfum des années 80-90, ce nom aurait sans doute trouvé ses lettres de noblesse. Mais peut être que l'ombre de Miss Dior (on ne rit pas), ou de Coco Mademoiselle a t elle freiné les ardeurs pour ne faire qu'un Shalimar Initial certes créatif et équilibré, mais peut être un peu hésitant. 
Ce Miss Shalimar aurait pu être une vanille cuirée, très douce, un peu comme peut l'être Cuir Béluga. Mais, lorsque j'ai demandé à Sylvaine Delacourte pourquoi l'accord de Cuir Béluga n'était pas exploité pour un grand lancement, sa réponse fut très claire : il n'y a que la France qui aime la vanille à ce point, le marché international, lui veut des floraux.

Soit, mais aujourd'hui, alors que Guerlain hésite et tâtonne sur un marché international sans positionnement fort et avec une certaine perte d'identité et de crédibilité, d'autres, moins timorés, n'ayant rien à perdre, prennent des risques et c'est le cas aujourd'hui avec Réminiscence, qui nous propose une vanille dans le plus pur style de la maison et de ce que sait faire Fabrice Pellegrin, qui s'illustre déjà avec le magnifique Volutes chez Diptyque.

Cette Vanille pourrait donc être ce que j'aurais imaginé personnellement pour un Miss Shalimar : la vanille, signature principale, mais dans une vision moderne, contemporaine, allégée. La bergamote et l'osmanthus, dont les tons abricotés se font remarquer dès les premières notes, marquent le territoire d'une certaine originalité fruitée, mais pas lourde du tout, car presque veloutée. Les notes florales de jasmin, d'iris, d'ylang ylang, d'héliotropine (note centrale dans l'Heure Bleue), sont aussi légers qu'un voile au soleil et aèrent le coeur du parfum. Le fond, très fidèle à la marque, appelle patchouli, notes ambrées de benjoin, de fève tonka, de café et de muscs blancs parfaitement harmonisés. La structure de Shalimar n'y est pas certes, mais le style, l'évocation, elle, aurait été parfaite dans une vision rajeunie de celui-ci !
 
A la fois gourmande comme une glace à l'italienne et légère comme un macaron, elle se porte sans avoir la main trop lourde (autre coutume maison), mais avec une relative facilité, et sans écoeurer l'entourage comme les vanilles de supermarchés. Notons que les évolutions dans le traitement des facettes de la vanille ont permis de réaliser un tel parfum, qui n'aurait pas forcement été possible il y a quinze ans. Trois vanilles, de Tahiti, de l'île Bourbon, et d'Ouganda, aux aspect floraux pour l'une, torréfiés pour l'autre et cuirés pour la troisième, contribuent à cet ensemble. 

Comme à son habitude, la marque prend un pari, que l'on aimera ou non, mais cette vanille que je qualifierais de "vanille poupon", comme Volutes, apparait nettement comme un petit délice de cette rentrée. Coup de coeur également pour le visuel, très "barock glam chic" ... Vous voyez bien que la vie est belle !

Illustrations : couleurs vanille, Réminiscence.