Si vous aimez le muguet, il faut bien l'avouer, sur le marché, il n'y en a pas tant que cela. Et les tentatives d'inclure le propos en thème principal d'un parfum grand public, comme Vivara Variazioni par exemple, n'a pas franchement rencontré de vif succès. Le seul qui ait réussi à maintenir ses clochettes au fil du temps est Diorissimo, devenu cultissime par sa finesse et sa beauté simple, mais d'une perfection technique à couper le souffle. Déjà très bien en eau de parfum, en extrait, il est sublime.
Comme un hommage au créateur talentueux de Diorissimo qu'était Edmond Roudnitska, Jean Claude Ellena revisite le muguet cette année, mais, comme à son habitude, il découd et recoud l'accord en le triturant, en le faisant sortir des sentiers battus et ce, dans une interprétation très personnelle.
Lorsque j'ai découvert Muguet Porcelaine, je n'ai pas forcément pensé à une évocation réaliste de la fleur, mais bien à une interprétation de parfumeur sensible et qui maitrise si bien certaines nuances de la peau, qu'il est capable de faire partir un propos simple comme le muguet dans une oeuvre étonnante. Ne disait-il pas dans son Journal d'un Parfumeur quelque chose comme : "j'aime utiliser certaines matières secrètes qui délicatement vont faire qu'elles jouent avec la peau" ?

Je ne vois donc pas forcement ce muguet sur tout le monde, mais sa finesse et son écriture font de lui une vraie oeuvre, une vision nouvelle d'une fleur souvent interprétée de manière assez classique, comme chez Guerlain, où il revient tous les ans, où chez Penhaligon's, ou il crépite. Dans ces derniers, le propos est plus proche de la nature que d'un parfum qui vit avec la peau. Muguet Porcelaine fait vibrer l'émotion de ses clochettes et de sa fraicheur sur une carnation qui voudra bien de lui, et je suis presque certain que les filles et les garçons au teint de porcelaine trouveront en lui un allié, sans que l'on puisse précisément reconnaitre un vrai muguet lorsqu'ils le portent, mais un parfum délicat, lumineux, sensible. Un muguet qui a su faire sa mue et nous transporte ailleurs, avec un brin de mélancolie.
Illustrations : Photo de Geisha, Hermes.
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