jeudi 27 janvier 2011

Les aigles du désir !

La symbolique de l'aigle est liée à la force, à la masculinité et à une certaine forme de virilité. La forme du bec de cet oiseau inspira bon nombre de codes esthétiques, surtout dans les années 30-40, que ce soit dans le mobilier Art Déco où dans le design automobile (illustration). De nos jours, ils continuent à faire référence. Dans le monde du parfum, ces codes esthétiques très typés sont liés à des parfums masculins au caractère bien trempé. Il n'est donc pas étonnant que l'envie me prenne d'associer quatre beaux masculins très typés à cet animal. Ils sont tous nés autour des années 80 et sont construits sur un accord chypré de patchouli et de ce qu'il reste de mousse de chêne. Ils ont pourtant chacun leur style et une signature qui leur est propre, sans jamais tomber dans le propre caricatural ! Aujourd'hui, ce sont un peu des martiens, non ? J'ai donc envie de les redécouvrir, rien que pour quelques lignes de bonheur.

Antaeus de Chanel 1981 :
Antaeus est une fougère aux notes de papa propre faite de lavande et de géranium qui se fond ensuite dans une sublime alchimie de mousse d'arbre, de bois de cèdre, de vétiver et de cuir fumé. Il ouvre le bal. Ce qui me plait dans son sillage, c'est une impression de fruits noirs comme le cassis, qui contraste à merveille avec la profondeur du cuir et des bois précieux comme le vétiver, bien présent. A porter, c'est un délice avec sa connotation "vintage" avec laquelle il peut être sympa de jouer.

Derby de Guerlain 1985 :
Comme tout Guerlain qui se respecte, surtout du temps où l'on ne cherchait pas à recoller trop les foules, Derby accompagnait quelques grands de ce monde, et l'on pouvait le sentir dans quelques salons privés où ils se rendaient pour leur rendez-vous d'affaire. Je garde ainsi en mémoire un moment où j'ai croisé le sillage épicé de girofle, de poivre et de cuir de Derby près d'un hôtel de l'avenue George V à Paris il y a maintenant quelques années. Le pouvoir, la prestance émanait de cette personne, Derby était à sa place, fier et altier. Derby, c'est un oeillet de facture assez classique au départ, mais il se poudre d'iris, s'habille d'un cuir fumé, de poivre et, comme Antaeus, de bois précieux comme le vétiver. Du grand Guerlain, un must.

Versus de Versace 1992 :
Certes, on pourrait reprocher à Versus de trop jouer avec une esthétique "gay icon", mais à l'époque où il est sorti, en 1992, précisément la même année que Angel et l'Eau dIssey, quelques lancements avaient un style, et celui de Versace était très fort. Depuis, malheureusement, ce style s'est étiolé chez Versace, mais il inspire encore D&G et de plus petites marques comme ES Collection. Versus est un baume de massage que l'on imagine respirer dans les fumeries orientales, un parfum ovni, qui ne ressemble à rien d'autre. Très marqué par le pamplemousse en note de tête, son sillage est énigmatique, difficile à décrire et unique. J'y devine un peu de menthe, de lavande, de cèdre, de vétiver, d'encens, de fruits comme la banane, des muscs blanc et une note de cuir. Pas du tout démodé ou vieillot, il a malheureusement disparu. Pourtant, encore aujourd'hui, il pourrait inspirer. A connaitre.

Quorum de Puig 1982:
On ne trouve quasiment plus Quorum en France, pourtant, son sillage de mousse à raser et d'oeillet poivré assez marqué par la note difficile mais peu commune de cumin, peut rappeler Derby, en moins noble et en plus viril encore. Il en impose sans forcer pour autant, et il a un peu moins bien vieilli que les autres. Si vous avez la chance de le croiser, surtout à l'étranger, il est en général bradé. Une bonne raison d'avoir un joli parfum de pouvoir pour un prix dérisoire.

Parfums sensuels et de désir, ces aigles tendent aujourd'hui à mourir alors que les hommes veulent One Million et Bleu, et oublient le reste ... moins de pouvoir, de noblesse, de force, de virilité, et une certaine faiblesse ? Monde cruel !

Illustation : Tucker de Francis Ford Coppola, Chanel, Guerlain, Versace, Puig.

mercredi 19 janvier 2011

Parle moi ... de quoi déjà ?

Parle moi de ce coin où tu serais là seule au calme,
Ce coin, où les enfants ne viendraient pas,
Un coin, comme un havre de paix,
Un coin, où tu te recueillerais...

Parle moi de ce coin où l'on peut lire des pages,
Où la patte de ton écriture se lit d'un seul trait,
Où les couleurs calment et apaisent,
Où l'on se sent bien loin, pour lire ou rêvasser.

Parle moi de ce coin, où le clapotis de l'eau
Inviterait au voyage,
Où les fruits rouges, oranges et jaunes
Marqueraient nos souvenirs ?

Ce coin tu le sais bien, nous y sommes tous passés !
Car nous ne pouvons y échapper.

Dans un coin de ce coin se loge une petite bombe,
Qui d'un seul geste diffuse une senteur de fruits gorgés,
Masquant la chair et le corps.

Dans ce coin l'autre jour tu m'avouais,
Avoir vaporisé un parfum...

Ce parfum parle de fruits gorgés de synthèse, de chimie organique, de ruissellement d'eau pure et fraîche dans une brassée de fleur pâlichonnes et métalliques : me parlais tu du désodorisant ?

Mais non, tu essayais un vrai parfum, vendu comme tel et qui parle d'amour... je n'y ai pas cru bien sûr, mais c'était pourtant vrai !

Si ce parfum parle de fleurs et de fruits, il parle surtout de conquête pour incultes, de gros sous, d'économies d'échelle entre un J'Adore, un sirop sucré récolté au supermarché et un gel douche aux fruits, tous sortis d'un labo de dingues... il parle surtout d'un petit coin où l'on aime que ça ne sente pas trop "l'humain".

Force est de constater, il faut bien l'avouer, qu'entre la bombe désodorisante pour toilettes aux fruits rouges qui était juste à coté et Parlez moi d'Amour, il n'y a aucune différence, même dans la note métallique "cheap" du sillage qui laisse sa trace ! Et qui plus est, il "couvre" bien les ptites mauvaises odeurs. Triste sort et désolé de ne pas pouvoir le taire, voilà qui est dit !

Alors parlez moi de tout, mais surtout pas d'amour, et encore moins de celui du parfum, d'art ou d'investissement créatif.

Si le parfum, la passion, la créativité et l'amour, le vrai, doivent vivre, alors parlez moi d'autre chose... et vite !

Un passionné !

Illustration : déco et design, John Galliano.

vendredi 14 janvier 2011

Parfum de crème, crème de parfum ?

Je ne sais pas si vous aussi vous l'avez remarqué, mais il semble y avoir une tendance très présente en ce moment dans la tête des parfumeurs, à moins que ce ne soit dans celle de ceux qui étudient le "marché" à leur place : les parfums qui se positionnent pourtant comme des produits assez haut de gamme puisent de plus en plus souvent dans le registre des parfums des crèmes cosmétiques ou des lingettes pour le corps. Crème de jour ou de soin, leur trame est reprise et retravaillée pour en faire de vrais parfums de peau. Vous y verrez souvent les notes de magnolia, de muguet, de rose et de violette. Dans les cas que je vais citer en exemples, les matières sont bien choisies et l'effet n'est pas désagréable. Reste à savoir si au final, c'est le sentiment de sentir bon ou celui de porter un parfum qui prévaut ?

Le tout premier parfum auquel je pense est Blu de Bulgari, qui reprend plutôt l'odeur d'une crème solaire dans un esprit vacances. J'aime sa douceur de rose douce et musquée et le contraste qu'apportent le gingembre et le patchouli. Abstraction faite de tous les paramètres objectifs, ce parfum m'amène en vacances.

En 2010, le premier à annoncer clairement le mouvement est Annick Goutal, qui présentait Rose Splendide en revendiquant clairement que ce parfum était dérivé de sa ligne de produits pour le corps. Effet de rose perlée dans une crème de jour, le parfum est subtil, très délicat, mais manque un peu de matière dans son évolution sur peau à mon goût.

Love Chloé surfe aussi sur la vague, mais là, dans mon esprit, il reprend la note douce et crémeuse du savon et du gel douche Dove, qui reste tout de même un bel exemple d'accord "fonctionnel" texturé et luxueux. Des notes très poudrées d'iris habillent ce sillage signé.

Fleur de Cristal, le tout dernier parfum de Lalique, reprend lui aussi un accord de lingettes pour le corps pour en faire un parfum de peau très féminin. Le seul petit défaut que je lui trouve, c'est qu'à trop vouloir aller chercher à imiter J'Adore en décortiquant des études sur les matières qui excitent les hommes, ils ont poussé le bouchon un peu trop loin dans le coté "oestro-génant", comprenne qui pourra. Dommage, dans un flacon qui lui, est splendide, ce muguet propret aurait mérité plus de tension, comme J'Adore le fait si bien.

En Italie, Lorenzo Villoresi se caractérise par des parfums assez capiteux et très texturés par les matières naturelles de grande qualité. Ainsi, bien qu'Iperboréal, son tout dernier bébé, puise dans les crèmes de luxe son identité, le sillage, lui, est dense et très marqué par le benjoin, qui caractériserait un peu la "patte" LV et apporte une réelle profondeur à cette atmosphère féminine et feutrée. Sur peau, c'est pareil, et du coup, ce parfum ne fait pas si cosmétique qu'il pourrait le laisser présager au départ.

Enfin, L'Eau d'Issey florale, qui arrive très bientôt, reprend également un accord violette-rose-hédione très courant dans les crèmes et lingettes, et l'habille d'une rose très douce et des notes marines et boisées de l'original Eau d'Issey, retravaillées avec des musc bancs. Je lui trouve un effet très "peau" et très doux.

Je pense également à la Rose de Roger et Gallet, qui offre pour un prix dérisoire une sensation cosmétique qui peut être appréciable les jours où l'on n'a pas forcement envie de se sentir parfumé. Une eau calme et apaisante, qui procure tout au plus le plaisir de sentir bon.

A mon avis, même s'ils ne sont pas désagréables, il faut bien avoir à l'esprit que se sont au départ des accords discrets qui ne sont pas vraiment des parfums. Je suis partagé car même si je trouve qu'ils n'ont pas les mêmes qualités que les grands Guerlain, j'aime leur douceur et leur lecture au final assez simple, qui dans les cas de Blu, Iperboréal, Love Chloé et L'Eau d'Issey Florale, est pourtant relativement texturée. Si c'est une tendance observée par les experts de la chose, j'espère que le public qui est sensible à ces parfums de crème sait aussi reconnaître par ailleurs la crème des parfums.

mercredi 5 janvier 2011

Couleur turquoise.


Pour commencer l'année, pourquoi ne pas se donner un avant goût de vacances. Ca redonne le moral et laisse imaginer des jours plus chauds et plus cléments non ? Et je vois que le soleil pointe son nez !
J'ai des envies de mer, de lagon, de plage de sable fin, et s'il y a bien une couleur pour évoquer cela, c'est le turquoise, en référence directe à la couleur des eaux de paradis. Un appel au rêve, à la détente au soleil, à la plage.
C'est sûrement pour toutes ces raisons que j'aime généralement les parfums de cette couleur, car il n'y en a pas un seul que je déteste dans ceux dont je vais parler. Bien sûr, ils ne révolutionnent pas la parfumerie, mais je ne sais si c'est la sensation d'abricot velouté, de fraîcheur menthée, de sensation "eau de pluie" cristalline et marine qui m'attire, ou si c'est parce qu'ils évoquent les moments où l'on sort de la douche avec une sensation de bien être et de propre ?

La toute première création par qui tout arrive n'est pas turquoise mais bleue. Pourtant, sans elle, aucun des parfums ci-dessous ne serait ! Nature après la pluie de Nature et découverte est une petite merveille pour la maison, délicieusement mouillée et boisée. Une référence, qui engendre la suite.

La suite, c'est la découverte du gel douche qui est devenu je crois mon préféré (là, je dévoile une part d'intimité) : Criste Marine du Petit Marseillais, que j'utilise essentiellement l'été, mais qui est celui qui reprend en parfumerie pour le corps la trame de Nature après la pluie. Si vous voulez vous amuser un peu, allez le sentir en tout premier puis comparez ensuite avec les parfums qui vont suivre.

Le voyage continue chez Sephora, avec Pacific Curacao, dans lequel je retrouve cette fraîcheur turquoise accompagnée d'une très fine touche de rhum blanc. Hummm, même pour parfumer la salle de bain, c'est sympa !

Le premier parfum qui suivra avec cette note se trouve chez Rochas ! Je réalise en écrivant l'article qu'il aurait pu être une interprétation plus moderne de l'Eau de Roche mais le discours ne le mentionnait pas. AquaWoman joue avec l'hédione d'Aqua di Gio pour homme et cette note "eau de pluie", agrémentée d'un joli patchouli dans un ensemble très lumineux. Méconnu et même oublié, mais j'aimais bien.

Toujours sans vraiment comprendre pourquoi mais sans doute pour les raisons dont je parlais plus haut, j'ai un gros coup de coeur à la sortie de Aqua Marine de Bulgari. A l'époque où je n'étais pas encore Méchant Loup, j'en écrivais les éloges sur auparfum. En été, j'aime le retrouver car il accompagne à merveille le gel douche idoine ci-dessus.

Un an plus tard, rebelote : il me semble que les gens du marketing ont su flairer la tendance, car nous retrouvons la même trame, assez peu différente au final dans Vivara Varazione Acqua 330. Tiens donc, encore une aqua et du turquoise, et ce n'est pas fini ! Et moi, béatement, j'aime toujours autant ! Stupide non ?

En 2009, Azzaro s'y met aussi, avec une édition limitée nommés Aqua (ça surprend hein?), turquoise (ben voyons!), mais que je trouve intéressante par un vrai effet "glacé" et mentholé sur les notes de tête. Ca m'interpelle car c'est finalement assez bien fait, un peu comme dans Géranium pour Monsieur, mais cela ne dure que quelques minutes car le coeur et le fond dévoilent alors trop de poils. Et oui, des notes boisées, viriles et efficaces, vues, revues et rerevues. Dommage, car ce n'était pas trop mal. A l'époque, j'avais envie de faire un article en faisant un parallèle avec le Yéti. Du froid et des poils, un abominable fond d'homme des neiges en somme !

Est-ce étonnant alors de retrouver cette année cet effet glaçon mais qui a cette fois laissé les poils au vestiaire dans Verdon de l'Occitane ? Une fraîcheur vivifiante garantie et bluffante sur un fond de bois blonds "à la Aqua Marine", des plus doux. Bizarrement, je préfère.

Et enfin, le petit dernier pour la route, qui n'a pas manqué lui non plus de me laisser indifférent. Vous m'en voudrez certainement de l'avoir loué, mais que voulez-vous, je crois que je vais devoir m'y résoudre, les aquas turquoises sont la "petite faiblesse qui me perdra". Acqua du Gioia, je n'ai pas pu y couper, car cette énième aqua turquoise a fait l'objet d'un article sincère au moment où je l'écrivais, mais dont je me rends compte aujourd'hui que j'ai peut être un peu trop exagéré le coté qualitatif du parfum, pas trop mal, mais ça casse quand même pas trois pattes à un canard ! Ma ptite faiblesse vous dis-je !! Et qui plus est, chose très étrange, j'ai découvert que c'était l'article le plus lu sur le blog et celui qui apportait le plus de lecteurs lors d'une recherche... surprenant non ?

Alors, le turquoise est bien une faiblesse, c'est un peu "ma" note de la honte, car elle n'est souvent ni noble, ni qualitative ni révolutionnaire, mais je l'aime à tous les coups... est-ce la part de rêve, parce que j'aime cette couleur ou parce que j'ai besoin de vacances ?

Illustration: Taj Exotica Ressort & Spa, Maldives, ci-contre, le gel douche coupable ! Une bonne douche avant un bain de soleil face à la mer ?


dimanche 26 décembre 2010

2010, année sympathique, les temps forts !


BONNE ANNEE 2011 !!!!

A la fin d'une l'année, j'aime bien faire un petit retour sur celle qui vient de s'écouler. 2010 fut une année particulièrement sympathique et marquée de quelques temps forts.

Janvier : après la découverte de l'Heure Promise et de White Suede, l'année commence en douceur, avec les parfums construits autour des muscs blancs.

Février :
c'est un mois assez calme, mais j'avais décidé de rendre hommage à une marque qui tient une place importante dans mon approche du parfum, l'Artisan Parfumeur, à travers quelques créations rares et d'autres plus connues.

Mars :
un mois encore plus calme, contrairement à 2009, mais une interview avec un parfumeur à connaitre, Fabrice Olivieri, créateur entre autre de parfums Bio pour Nature & Découverte, et du fabuleux Le 6 de Ida Delam, dont nous reparlerons en 2011.

Avril : mois particulièrement riche et essentiellement marqué par la participation quelque peu inattendue au Grand Prix du Parfum 2010, où nous sommes associés Poivrebleu, Graindemusc, Ambregris et moi même à des évaluateurs et journalistes pour choisir un parfum qui sera le prix des spécialistes. Avec une avance marquée, c'est La Treizième Heure qui l'emporte. Pour 2011, j'ai bien une petite idée mais rien n'est encore fait !

Mai : mai sera marqué par le lancement presse de Womanity, en présence de Thierry Mugler, Pierre Aulas et Joel Palix. Un parfum pas évident mais que nous aimons pour son parti pris olfactif dans un marché aseptisé. Je découvre également Nuit de Tubéreuse, Baudelaire et les derniers Bénéfit, puis choisi d'échanger avec vous quelques secrets de fabrications à travers quelques matières premières aux noms barbares, mais bien utiles.

Juin : mois très vif également, car marqué par l'interview de Frédéric Malle et de Maurice Roucel autour de Dans tes Bras, par la découverte de mon gros coup de coeur 2010 qu'est Jacomo Art Collection 02, et par un voyage dans un Berlin qui embaume le tilleul.

Juillet : rendez vous avec quelques bonnes affaires et découverte de deux amis, Cakos et Cakette, que l'on retrouvera sans doute quelques part en 2011.

Août : vide intersidéral et découverte de Bleu de Chanel ... vide intersidéral ! Un peu de fatigue tout de même car je ne relève même pas la jacinthe dans Bas de Soie ... c'est grave docteur ?

Septembre :
Habit Rouge fête ses 45 ans, acquisition d'un parfum cher et deux coups de coeur : un nouveau Love Chloé, et une valeur sûre Blenheim Bouquet, plus actuel que l'on peut le penser car recopié aujourd'hui par Dior avec Granville.

Octobre : un concours pour une soirée Terrible en perspective, une rencontre avec nos lecteurs se prépare et parfum de duel, de bimbo et de sensualité.

Novembre : le mois de la Rose, marqué par l'interview de Marie Hélène Rogeon, par la présentation de Jessy's Rose, dont je me rends compte que c'est un parti pris trop marqué qui rencontre un succès très relatif, mais qui est un vrai premier pas, et m'encourage tout de même à continuer en 2011 avec d'autres créations. Puis, c'est la découverte, avec une grande partie de la blogosphère francophone d'un parfum tout doux et vraiment bien fait qui n'est pas encore en vente.

Décembre : bien sûr, la soirée des lecteurs est un moment particulièrement marquant, qui nous encourage à vouloir renouveler l'expérience, à travers d'autres aventures parfumées. Jammin et Cruel Gardénia se dévoilent en parfums de la nuit, et un Bas Armagnac exceptionnel s'invite pour un Noël en famille.

Les coups de coeur de l'année :

Grand Public : Close de Gap, Love Chloé, Minuit Noir, Les 3 nouveaux Bénéfit, Midnight in Paris, Bulgari Man, The One Gentleman, Le Mâle Terrible.

Diffusion limitée et parfums de niche : Les 3 Jacomo Art Collection, Baudelaire, Portrait of a Lady, Nuit de Tubéreuse, Traversée du Bosphore, L'Eau Duelle, L'Heure Fougueuse, Mitzah.

Voilà, peut être pourriez vous en commentaire nous dire quels articles vous ont le plus plu, ceux que vous avez le moins aimés, et émettre quelques suggestions pour 2011 ? Qu'en pensez vous ?

Il me reste à vous souhaiter une bonne relecture et une excellente année 2011. Elle s'annonce également très riche en évènements et nouvelles aventures.

jeudi 23 décembre 2010

Bas Armagnac Baronne Jacques de Saint Pastou 1948 : approcher l'exceptionnel !

Je reviens plus tôt que prévu, car il vaut mieux en parler avant demain soir finalement !

Novembre 2010, il fait froid et il pleut. L'humeur maussade, nous décidons tout de même avec un ami d'aller faire un tour Porte de Versailles au salon des vignerons indépendants. Accès difficile, bondé à cause du salon de l'étudiant qui se tient en parallèle, une heure et demie après être partis, nous nous glissons parmi la foule pour atteindre enfin l'entrée ! Surprise, nous ne sommes pas seuls amateurs de bons alcools ! Les producteurs également sont très nombreux. Il faut donc cibler la recherche. Peu inspiré et n'ayant pas tant d'occasions que cela d'épuiser ma propre cave, je laisse mon ami choisir de me conduire pour humer quelques Chablis et Corton, en trouvant quelques bonnes surprises. Je garde tout de même une idée en tête mais je ne croise pas les stands qu'il faut, jusqu'à ce que je tombe sur celui-ci...

N'ayant rien à prouver, Pierre offre ses fioles de Bas Armagnac Baronne Jacques de Saint Pastou à la dégustation avec un entrain qui en dit long sur sa confiance !

Prudents mais un peu sceptiques quand même car nous connaissons quelques illusionnistes du goûts et des papilles très présents dans ces salons, nous nous approchons.

- "Par où voulez-vous commencer ?"
- "On vous fait confiance !"

Nous commençons donc dans les années 80 pour remonter ensuite le temps sur 3 ou 4 verres de dégustations, déjà bien convaincus. Nous sommes en 1956.

-" Et le 1948, c'est vraiment autre chose ?". Il ne dit rien et tend la basquaise pour verser un peu de son breuvage dans nos verres.

Ouhh ouh ! Ouh lala !! Waouh !!!

Vous êtes blasés des mauvais parfums ? Un premier nez de ce Bas Armagnac vous remet dans le droit chemin, car c'est encore mieux que les meilleurs : je pense immédiatement à un chypre ancien comme Cabochard vintage de Gres, à la couleur automnale de Knowing d'Estée Lauder, à la richesse ambrée et miellée de Patchouli de Réminiscence et à la profondeur cuirée et épicée de Tabac Blond de Caron. Quelles références !

Les premières impressions sont donc chyprées. Une rose ancienne fraîche se présente accompagnant le pruneau confit et un effet boisé qui me rappelle le patchouli et la mousse de chêne. C'est normal, il a vieilli en cave et en fut pendant plus de 50 ans. Quelle richesse, je n'en reviens pas !

S'en suivent une succession de notes épicées comme la cannelle, le clou de girofle et le poivre blanc, du miel, des notes ambrées et torréfiées de café et de pain grillé, voire même des inflexions de tabac, comme pour un bon cigare. La vanille et des notes goudronneuses qui rappellent le cuir de Russie se glissent dans l'ensemble dans un équilibre parfait, sans jamais dénoter ou prendre le dessus. Il y a même de l'animal là dedans, comme ces bons vieux muscs riches et sensuels encore utilisés en parfumerie à l'époque pour reproduire des effets similaires. Tout cet ensemble cuiré-animal constitue comme une charpente. Le raisin a fournit le sucre et le miel de la matière, le fut à fourni la couleur, la patine, mais aussi le goût, le temps l'a magnifié. En bouche, c'est la même explosion, car il est très fidèle à son nez, mais il est encore meilleur en lui laissant le temps de se réchauffer, de s'arrondir pour dévoiler toute sa richesse !

Le plus surprenant quand même, c'est l'évolution dans la dégustation. Au bout de quelques minutes et dans le fond de la bouche et du verre, ce sont des notes aromatiques de thym et de sauge qui se dévoilent, alors que dans un parfum, elles auraient joué leur rôle en note de coeur.

Pendant l'heure qui suit la dégustation, je n'arrive plus à me concentrer sur autre chose. J'ai ce magnifique bouquet en tête et je n'en démords pas, c'est exceptionnel, et il ne reste vraiment plus qu'une basquaise de 700ml sur le salon !

Bien décidé et convaincu, Pierre n'a pas beaucoup d'effort à faire. Nous repassons sur le stand car bien sûr, je craque. Je culpabilise un peu pour le prix, mais pas tant que cela, car tout bien considéré, il y a plus de corps que dans le dernier Ellena à plus de 150€ et c'est moins cher qu'un parfum vintage en bon état. Il y a bien des charlatans sur ces salons, mais il existe aussi des maîtres. Rendre hommage à cet art où le temps, comme beaucoup d'autres facteurs, écrit sa patte dans cet opus de 62 ans d'âge, c'est un beau trait d'union, car le goût du parfum n'est pas si éloigné !

Tel un tableau de Turner, ce Bas Armagnac Baronne Jacques de Saint Pastou 1948 capture les couleurs et les matières dans des nuances chaudes d'or et de miel. Un plaisir, qui sera partagé pour Noël. Prendrez vous vous aussi un petit digestif d'exception ?

Un très joyeux réveillon de Noël à tous et soyez prudents sur les routes, car la neige s'invite au rendez-vous !

Illustrations : William Turner. Site :
armagnac-saintpastou.com

samedi 18 décembre 2010

Noël Gourmand !

Cette année pour Méchant Loup, Noël sera placé sous le signe de la gourmandise, car les parfumeurs on su faire preuve de créativité autour de notes délicieuses et régressives, sans forcement jouer sur la facilité. Alors voici une petite sélection de plaisirs à offrir, se faire offrir ou à s'offrir pour un Noël 2010 gourmand :

Jacomo Art Collection 02 : pâte d'amande, noix de coco, café, soutenus par une note de cuir doux, ce parfum est un de mes plus gros coup de coeur de 2010. Celui ou celle qui souhaiterait l'offrir ou se l'offrir devra s'armer de courage car hormis sur le site internet de la marque ou dans les parfumeries Beauty Succes du Sud-Ouest de la France, cette collection est introuvable ... vraiment, quel dommage, car on en redemande !

Midnight in Paris de Van Cleef & Arpels : nous sommes quasiment tous d'accord. C'est un des lancements les plus intéressants de cette rentrée. Pourtant, à priori, la marque ne misait pas beaucoup dessus car elle n'a pas choisi de lancer l'eau de parfum dans un premier temps. Pourtant, sa présence sur les linéaires des parfumeries semble confirmer un certain engouement. Ce parfum, c'est du miel, de l'ambre sucrée comme une corne de gazelle, paré d'iris et de cuir, duo encore et toujours aussi sensuel et éclairé par les facettes florales classiques de l'accord muguet. A mi-chemin entre Dior Homme et Black de Bulgari, franchement, même le flacon mérite le détour. Vous pensiez offrir Bleu, détournez vous vers ce Midnight in Paris, vous ne le regretterez sûrement pas.

L'Eau Duelle de Diptyque : vous aimez la vanille, éternel séduisante et sans risque ? Celle-ci vous habillera d'une guirlande de notes épicées qui se battent en duel avec un voile d'une vanille épurée, légère et débarrassée de notes trop collantes et ambrées. Du beau travail.

Mi Fa de Réminiscence : Mi Fa joue sur la guimauve, capturée dans le sucre la fleur d'oranger, qu'elle habille de sucre glace, de mandarine et de grenadine. Aussi craquant et léger qu'une meringue, il séduira celles qui aiment les parfums fruités et gourmands mais qui n'aiment pas la lourdeur de notes trop vanillées, d'amande ou de chocolat. Allez, on craque ?

Carmella de Bénéfit : un peu puissant, il faut bien le reconnaître mais quelle créativité ! Un agréable cocktail aux notes de rhum, d'ananas et de noix de coco crémeuse. Tiens, cela me rappelle une certaine recette de Pina Colada ! Allons donc voir si on la trouve dans le livre La Cuisine des Nez ? Il faut oser mais au moins, Bénéfit a osé, et rien que pour cela, et comme en plus ce n'est pas le parfum de tout le monde, j'adore !

Traversée du Bosphore de l'Artisan Parfumeur : un loukoum à la rose, saupoudré de sucre glace, dont la forme travaillée rappelle aussi les tulipes d'Istanbul. Lumineux au moment où vous le mettez sur peau grâce à la pomme et au gingembre, il se glisse ensuite dans un fourreau de cuir souple et d'iris tel le parfum d'une fumerie de narguilé, pour revenir ensuite sur votre peau comme le sucre accroché en bouche... un régal d'équilibre !

Minuit Noir de Lolita Lempicka : on aime ou on déteste mais il a au moins le mérite de prendre des risques sur un territoire olfactif et gustatif pas évident : la réglisse et l'anis. Son départ violette-iris plus percutant que dans Lolita Lempicka l'original vous emporte ensuite vers l'anis, la cerise noire, la pâte d'amande, ce qui me rappelle un peu La Petite Robe Noire de Guerlain. Bien sûr la réglisse l'en distingue, mais je le trouve diablement original et sensuel et de surcroit plus distingué que son ainé.

Voilà pour le sucré, mais le salé aussi nous donne rendez-vous.

Bang de Marc Jacobs : quoi de plus explosif que les notes poivrées pour exprimer le "bang" ? Après un départ follement original de poivre et de rhubarbe, Bang s'aventure sur un terrain épicé et boisé, très linéaire mais chaud et sensuel, qui joue sur la virilité sans tomber dans la caricature car elle reste peu brutale. Une communication kitch et décalée et un flacon intéressant, voilà encore un courageux qui se distingue cette année, comme son inspirateur qui s'est sacrément musclé et prend des risques en s'exposant ! En France, il faut aller le chercher dans les boutiques Marc Jacobs .... allez comprendre mais ça vaut le coup.

I Love les Carottes de Honoré des Prés : la carotte et l'iris sont très proches olfactivement. Est-ce parce qu'ils poussent tous les deux dans la terre où ils vont chercher leur richesse olfactive ? Ils sont souvent rejoints par la violette qui elle non plus ne pousse pas bien au dessus. Toute cette petite famille terrienne a donné naissance à une flopée de matières premières parfum très proches, grâce à laquelle Olivia Giacobetti a pu créer ce parfum dans un équilibre salé terreux doux et sensuel. Original en diable et pas du tout importable !

Voilà, quelques idées bien agréables en bouche et sur peau qui m'amènent à vous souhaiter un très joyeux Noël à tous car je ne crois pas faire de nouvel article d'ici là ! Profitez en bien et rendez-vous la semaine prochaine sur un autre territoire de l'odorat ... après les fêtes.