lundi 19 octobre 2009

Trouver son parfum : un exercice difficile ?


Devant la prolifération de nouveautés annuelles, trouver un parfum que l'on peut définir comme étant le sien est pratiquement chose impossible. Cela me semble être un exercice difficile, une démarche longue et compliquée pour celui ou celle qui décide de l'entreprendre.

Vous est il arrivé d'avoir une rencontre avec un parfum, de retrouver dès les premières notes cette sensation qu'il est fait pour vous, qu'il est tout ce que vous aimez ? Sa forme olfactive, ses couleurs et ses évocations vous transportent et vous parlent. Passer ce premier cap, vous savez presque d'instinct qu'il fera corps avec vous, vos goûts et votre style de vie du moment.
Pour ma part, ces rencontres pourraient se limiter à quelques parfums, après être passé par plusieurs essais et constats : les vétivers que j'adore se refusent obstinément à mon corps et à ma peau, j'en suis maintenant convaincu. J'ai également aimé quelques patchoulis, mais là c'est l'inverse, j'ai dû faire une overdose car j'ai plus de mal aujourd'hui. Bien sûr, il y a les occasionnels qui me plaisent, qui me vont bien, qui ne sont pas forcement des chefs-d'oeuvre mais que je porte le week-end, en voyage ou quand il fait chaud. Puis il y a ceux que je collectionne, simplement pour avoir le plaisir de les sentir. Frivolité addictive, mais essentielle.

Malgré cela, j'ai besoin de retrouver ces parfums refuges qui sont les miens, qui m'ont accompagné quelques temps ou m'accompagnent encore. J'ai également besoin de sentir, en espérant trouver, parfois, cette sensation aussi rare qu'agréable.

Le tout premier parfum avec lequel j'ai senti une affinité réelle fut Fahrenheit en 1988. Je l'ai porté pas mal d'années, mais à force de succès, il est devenu codé, avec cette impression de porter le parfum des potes. C'est dommage car je l'aime toujours et j'ai plaisir à le porter très très occasionnellement. Sa version Absolute en est une jolie variation.
Le second "choc" de ce type fut Héritage en 1992 : un parfum que je souhaitais et qui dès les premières notes et dès les premiers jours de commercialisation est devenu "mon" Guerlain. Héritage a longtemps été "mon" sillage, il l'est encore aujourd'hui, mais il est trop beau et capiteux pour mon environnement quotidien actuel. Je ne le porte donc que le week end et occasionnellement, comme en cette période de froids d'automne par exemple.
Le troisième est devenu vraiment "mon" parfum. Il en fut décidé ainsi suite à la création de ce blog et parce qu'il m'accompagne depuis longtemps, un peu partout, sauf en voyage ou quand il fait trop chaud. Méchant Loup en 1997 fut une rencontre, une osmose, je l'aime et le porte depuis le début et en vieillissant, il fait de plus en plus partie de ce que je suis, un article complémentaire lui sera consacré très bientôt.
L'Eau du fier est également un parfum qui me correspond, mais il est si difficile à porter que je me contente de le sentir sur le poignet de temps à autre, pour retrouver son odeur qui me fait voyager. Enfin, le "cuir moderne" comme Dzing de l'Artisan, Black de Bulgari et Cuiron de Helmut Lang, relayé aujourd'hui par Strictly Private de Baldessarini, est une signature avec laquelle je me sens en affinité.
En cette fin 2009, c'est une nouveauté récente qui s'inscrit dans la lignée des notes et des évocations auxquelles je suis sensible : un parfum dont je rêvais comme pour Héritage, et la sensation de faire corps. Ce parfum fera l'objet de mon prochain article.
Un point commun à mon sens entres tous ces parfums : les couleurs chaudes et l'écriture olfactive ambrée, boisée avec une facette cuir et quelques épices bien dosées. Tous pourraient s'inscrire dans un tableau de Denis Frémond (ci-dessus) ou de Henderson Cisz (ci-contre) dont j'aime la chaleur qui en ressort et la lumière travaillée.

Après plusieurs discussions avec des personnes que je connais m'ayant donné le nom de leur parfums, j'ai remarqué que pour beaucoup d'entre elles, un style, une matière, une couleur revenait, comme une signature dont elle n'avaient pas forcement conscience et qui était pourtant bien marquée. En prendre conscience peut être réconfortant et permettre d'être moins hésitant dans ses choix.

Et vous ? Trouvez "votre" parfum vous semble t il difficile ? Quelles seraient vos affinités olfactives ? Votre style ? Les connaissez vous ? En êtes vous conscients ? Quel (s) parfum (s) serait "vous" ?
N'hésitez pas à faire partager vos impressions, je vous remercie d'avance.

Illstrations : Little flower de Denis Frémond et Parisian afternoon de Henderson Cisz.

mercredi 14 octobre 2009

Al Oudh - L'Artisan Parfumeur 2009 : le oud comme un voile.

Le jour où je suis allé chercher mon Bois Farine, j'étais non seulement pressé mais également loin de m'imaginer qu'une surprise m'attendait. En effet, à mon grand étonnement et sans vraiment voir venir la chose, la charmante vendeuse de la boutique me dit, très enthousiasmée qu'elle venait de recevoir un petit flacon du futur parfum de l'Artisan, Al Oudh (le bois). Elle s'empresse de me le faire découvrir alors que je n'ai rien demandé. J'accepte volontiers de m'en faire vaporiser un peu sur une touche et un peu sur la peau pour le tester, mais je dois malheureusement m'éclipser sans pouvoir entamer de vraie discussion. En tout cas, je la remercie aujourd'hui pour cette passion communicative. Pendant les quelques heures qui suivent, le parfum m'accompagne et se grave dans ma mémoire.

Un peu déstabilisé par Havana Vanilla que j'ai encore du mal à appréhender, j'étais un peu sceptique, mais dès la vaporisation sur la peau, Al Oudh dévoile une richesse et une noblesse qui me ravit immédiatement. Comme pour les précédents voyages olfactifs racontés par Bertrand Duchaufour et avec la même impression que lorsque j'ai découvert "mon" parfum, Méchant Loup, je perçois une richesse, une écriture, une texture et une histoire qui me plaisent.

Ce parfum m'évoque immanquablement les touaregs qui conduisaient les caravanes du désert chargées d'épices, d'encens, de soie et de résines précieuses. Les toutes premières notes sont épicées et fumées, le cumin marquant d'emblée son empreinte ourlé autour du poivre rose et de la cardamome ; la peau sous le voile n'est pas loin. Ce voile justement, illustré par une série de notes florales telles la fleur d'oranger et le jasmin, comme un écho aux fleurs d'orient et qui apportent une souplesse, comme un voile de soie brodé.
L'encens constitue un pilier pour structurer la charpente de sa note poivrée, minérale et fumée. Sa note "encens" très fidèle à la résine que l'on diffuse dans les temples et églises procure à Al Oudh un effet proche de Serge Noire, sans le copier pour autant.
Ce n'est qu' après avoir laissé passer cette caravane de notes toutes riches et d'un bel effet naturel que le oud s'impose en maître, dans toute sa pureté et toute sa brutalité : oui, il est animal, voire même légèrement fécal, mais Bertrand Duchaufour connait la maîtrise. Il mesure la note pour que jamais cette brutalité ne soit excessive.
Au bout d'une heure environ, le parfum fait une pirouette et s'adoucit grâce aux notes balsamiques. Vanille, myrrhe et fève tonka lissent les parois de ce parfum facetté.
Certains feront remarquer une certaine filiation entre Al Oudh et des créations de Serge Lutens, comme Serge Noire (encens, fumé) ou El Attarine (cumin, épices, notes balsamiques). Ce qui fait la différence selon moi, c'est une volonté de ne pas être aussi radical dans le parti pris, comme pour mieux raconter une histoire et faire défiler des images.

Contrairement à celui de Le Labo, trop fécal à mon gout et moins rond et fumé que Pure oud de By Kilian, Al Oudh semble plus léger, plus aérien, plus complet, les matières défilant les unes derrière les autres de manières très ordonnées, dans un long cortège. Il est aussi plus compromissif que les Lutens, sans succomber non plus à la facilité. Il se différencierait par sa souplesse, qui serait pour moi comme une volonté d'exprimer l'image d'un voile dans le vent du désert et de raconter fidèlement l'histoire qui l'inspire : Al Oudh, sillage de touareg, le oud comme un voile ? Pour les amateurs de cette belle matière, c'est un must.
J'ai immédiatement aimé cette émotion que me procure souvent l'Artisan Parfumeur mais que je n'avais pas ressentie tout de suite avec Fleur de Liane et Havana Vanille. Cette impression d'écriture légère mais riche et de qualité, de belles matières, texturées et nobles. Bertrand Duchaufour excelle dans l'art de faire défiler des images sous notre nez. Dzongkha, Timbuktu et Méchant Loup sont très fidèles à cet esprit; pour chacun d'eux c'est un paysage imagé qui défile : "Chut ! Le livre s'ouvre, la caravane passe, Al Oudh se raconte !"

Nouveau coup de coeur sur une année 2009 vraiment très riche, Al Oudh est disponible le 20 Novembre, en 100ml uniquement pour un prix qui ne sera pas plus élevé que les autres eaux de parfums, soit environ 100€. Je vous invite également à lire l'avis de graindemusc, qui vient tout juste d'être publié.

dimanche 11 octobre 2009

Le Japon et le parfum : la vie en rose.


"Paris, capitale de la mode ?" Après une visite à Tokyo et Osaka, cet adage semble appartenir au passé. Dans ces deux villes, moins à Kyoto, les femmes vouent un véritable culte à Grace Kelly et Audrey Hepburn, jouant avec les panoplies féminines et les codes vintage comme pour imiter ces icônes, elles le font avec un goût certain et une finesse hors du commun. Leur physique de véritables poupées permet à différents créateurs d'exprimer et de montrer une créativité qui est oubliée dans un Paris qui semble devenu très conformiste et où la féminité se cache. Même à New York, où seule quelques créatures bien nées portent et mettent en valeur la mode, une telle foison n'est pas comparable.

Ce goût prononcé pour le vêtement, le maquillage et la coiffure n'est pas l'apanage des femmes, les hommes n'hésitant à jouer avec le détail qui fait mouche, avec les couleurs et les formes, avec pour point commun le bon goût des associations de couleurs et de la mesure, même dans l'excès. Ce n'est pas un hasard si au détour d'un trottoir de Tokyo l'on croise par moment un photographe discret : il prend des clichés sur les tendances à venir car elles se trouvent bien là bas. Hélas, nous ne sommes pas le Japon, et je doute fort que cette féminité, parfois rétro, parfois glamour, parfois provocante se porte et s'exporte avec une telle sérénité à Paris ou à New York.

Revenons aux parfums. L'avantage d'en croiser peu, c'est de remarquer ceux que les gens portent. Face au constat que le parfum ne faitpas partie des moeurs et soit limité par un réseau de distribution réduit et un climat qui ne facilite pas la diffusion d'un sillage "épais", les marques semblent adopter deux stratégies différentes : un luxe à la françaises, avec des parfums chers et un positionnement élitiste ou des prix accessibles avec de petits formats. Un point commun semble constituer une garantie sine qua none de susciter un minimum la curiosité : la couleur rose ou le parfum de la rose. Ainsi, il est rare de croiser un Chanel ou un Dior : point de J'Adore ou de Coco Mademoiselle croisé pendant ce séjour, ils sont hors de prix. Seuls deux parfums positionnés "luxe" semblent sortir du lot, grâce à leur écriture très fine, un "code" autour du thé ou de la rose et un sillage qui reste discret.
Le premier parfum que j'ai été surpris de croiser là bas est Chloé : son sillage de rose fine et de propre se diffuse très bien dans l'air lourd et humide et correspond parfaitement au look féminin et romantique "à la Audrey Hepburn" adopté par beaucoup de japonaises. Il est disponible sous forme de crème et de poudre qui contribuent à ce qu'il soit approprié dans ce pays. Un succès international, une vraie prouesse dont Michel Almeirac et Amandine Marie peuvent et doivent être fiers.
Le second est Kelly Calèche : sous le climat local, j'ai noté qu'il dévoilait une facette faisant penser au thé vert broyé que les japonais boivent quotidiennement. A Paris, cette facette fait penser à du cuir retourné, à Tokyo, elle s'inscrit naturellement dans la paysage olfactif du pays. La référence à Grace Kelly fait également écho au look que je mentionnais précédemment. En cela, le travail et la percée d'Hermes sont remarquables.

Vient ensuite tout un cortège de parfums que nous avons tendance à rejeter en masse ici en France, car ils ne sont pour nous que des évocations de shampoing ou de gel douche. Prenons alors un peu de recul. En effet, dans un pays où l'on ne se parfume pas mais où l'hygiène est une habitude, gels douche et autres savons s'usent et s'abusent et deviennent du coup de sérieux référents inconscients : pas étonnant alors que les jeunes générations soient sensibles à ce style de parfums, d'autant qu'ils savent rester discrets, comme il se doit dans ce pays. Un point commun, la couleur rose. Les marques qui se distinguent sont Burberry, Bulgari, Givenchy et Lanvin, qui rencontrent un joli succès avec quelques noms : Brit Sheer, Rose Essentielle, Fleur d'Interdit, Jeanne et Rumeur 2 rose (non disponible chez nous) font partie des meilleures ventes.

A deux reprises, j'ai également croisé sur deux femmes un parfum qui semblait être un accord d'encens, de rose et de thé d'une grande finesse mais sans pouvoir mettre un nom dessus. Il restera un mystère et me faisait penser à Tea Rose ou Rose d'Homme. Peut être était-ce l'huile Tea Rose de The Body Shop bien implanté au Japon ?

Chez les hommes, Lanvin Homme Sport semble être le lancement de l'année, il est en tout cas bien en avant. Bulgari semble rencontré un public avec L'Homme et Black et le succès de Insensé Ultramrine, longtemps parfum pour homme le plus vendu au Japon se maintient grâce à quelques flankers.

Enfin, plusieurs parfums se distinguent par leur forme androgyne, comme Ck Be, croisé à plusieurs reprises et qui semble plus présent que Ck One, Eau de thé vert de Bulgari , qui semble toujours présent après pas mal d'années. Enfin et surtout, le top des tops dont le succès international se prouve même dans ce pays : Light Blue pour femme. C'est celui que j'ai croisé le plus souvent et il apparaissait même dans une boutique comme N°1 pour les hommes, prouvant par la même que les codes d''appréciations ne sont pas les mêmes que chez nous. Un accord unique qui rassemble le monde à l'unisson tant on le croise à Paris, New York, Los Angeles et même Tokyo. Une réussite dans ce pays où les habitudes et les codes parfums sont difficiles à percer mais changent lentement, les japonaises craignant sans doute d'être agressives. La marque tente d'ailleurs une nouvelle percée au pays du soleil levant avec Anthology, qui joue sur la mixité, dont Le Bateleur et La Lune devraient être les deux chefs de file grâce à leur justesse.

Pour conclure, j'ai envie de souligner que dans un pays où l'hygiène et la propreté sont des cultes, où Audrey Hepburn est érigée en icône de mode autant que Claudia Shiffer chez nous, où la conscience de l'existence de "l'autre" et d'être utile à un tout fait partie intégrante d'une éducation quotidienne, le fait que le parfum ne soit pas une habitude est une futilité. Quelques parfums percent malgré tout, avec une notion qui me parait essentielle : ne pas être agressifs ou vulgaires.

Dans ce contexte, les quelques parfums portés par des occidentaux ne sachant pas forcement lire les codes locaux par maladresse ou ne souhaitant pas vraiment se fondre dans une culture qui leur est étrangère m'apparaissaient comme une véritable insulte à une finesse de sens et de vie : Aromatic Elixir croisé sur une américaine, Patchouli de Réminiscence sur une française dans un magasin de souvenirs et même le 1 Million bien frenchy porté par l'ami dont je parlais à Osaka. Malgré leur qualités intrinsèques, là bas, c'est vraiment trop.

jeudi 8 octobre 2009

Japon - 2009 : impressions olfactives.


Et voilà, de retour à Paris ! Le Japon, c'est terminé, mais j'y retournerai sans doute tant il y a à découvrir. Je disais dans quelques commentaires précédents que les japonais ne se parfument pas, certes, mais le pays n'est pas pour autant dénué de parfums.

Je découvre les premières odeurs dans les ruelles agitées de Tokyo, où se succèdent un nombre incroyable de petits restaurants proposant sushi, poissons grillés, ramen (bol de soupe), les fameuses et mondialement connues brochettes yakitori et une sorte de petits choux ronds fait avec une pâte à gaufres... Tous ces mets dont nous nous nourrissons pendant ce séjour sont effectivement peu parfumés d'épices ou d'aromates, comme le soulignait muguette dans un commentaire précédent, mais sont toujours très savoureux et très frais, la saveur et la fraîcheur semblant être privilégiées au parfum. Les restaurants qui les proposent sont partout, toujours, dans toutes les villes visitées et vous tiennent constamment en appétit.

En découvrant les premiers jardins japonais de Tokyo, c'est l'odeur omniprésente de la mousse qui se dépose sur les pierres qui flotte dans l'air chaud et humide qui me frappe. Parfois, un vent marin souffle, et un délicieux voile d'embruns marins traverse la ville, parfois, c'est une fleur parfumée à l'odeur d'abricot ou de tubéreuse qui vous titille, rarement somme toute...

Aux abords de la citée impériale de Tokyo, mon attention est attirée par une évidente odeur de patchouli, c'est incroyable. Impossible de savoir si du patchouli était planté à cet endroit ou s'il s'agissait d'une combinaison de senteurs entourant le palais, mais la facette humide et camphrée de cette matière ressortait très fortement. A cela s'ajoutait le parfum ressemblant à du thé vert broyé que dégageaient quelques arbres et le gazon.

Le Japon ne se découvre pas sans visiter quelques temples et châteaux, dont certains se trouvent à Tokyo mais dont la majorité se découvre en partant de Kyoto. Ces temples très largement construits en bois sont généralement imprégnés d'une histoire riche. Le bois les constituant semble s'être patiné de chaque étape de la vie du temple, ce qui fait qu'aucun d'entre eux n'a la même odeur. C'est pour moi ce qui surprend le plus : même si la trame commune de l'odeur de ces temples serait une combinaison d'encens naturel de cire de bois apportée par les fidèles, ils peuvent aussi sentir la pierre, la résine, le silex des armes qu'ils ont abrité comme au château de Himeji, le feu de bois, les épices, les fleurs et même les tissus. Plus surprenant, toujours à Himeji, cette odeur de tabac blond, de thym qui flotte dans une aile du château et un soupçon de poudre de riz dans les quartiers de la reine. Tout cela est très subtil, mais les nuances me sautent au nez. Autre exemple, à l'entrée du temple de Ninna-ji à Kyoto, je suis surpris pas la ressemblance avec la vanille et la barbe à papa qu'émet le bois de la porte d'entrée : effectivement, point de marchant ou de boutiques alimentaires aux alentours, c'est bien le bois qui sent cela.

Kyoto est une ville où j'ai du être plus sensible aux odeurs car une odeur accompagne aussi le quotidien, contrairement à Tokyo ; celle du gasoil des bus, que l'on avait oubliée. Le matin en sortant de l'hôtel, c'est quasiment l'odeur urbaine de Black de Bulgari qui me saute au nez : surprenant.

Plus tard pendant le séjour, je fais remarqué à un ami qui vit là bas que parfois, en ville, on peut sentir quelque chose de peu agréable, entre le vomis et la poubelle : il m'explique que ce sont les Ginkgo, un arbre résistant, souvent planté dans les centres urbains et dont les fruits dégagent une odeur désagréable quand ils tombent. Effectivement, à ce moment, nous sommes sous une allée de Ginkgo au centre d'Osaka.

Ce que je retiens de tout cela c'est que le parfum fait partie du quotidien mais on ne le trouve pas sur les personnes ou très rarement, mais plutôt dans la finesse d'une poudre, dans le travail d'un encens, dans les temples ou les maisons.

Les japonais (es) aiment pourtant les odeurs et sentir bon, car au détour d'une rue, lorsque l'on croise une boutique "Lush", une envie irrésistible de se laver avec un bloc de savon ludique et qui sent bon vous prend et vous fait vous sentir bien dans le tumulte environnant. Le japonais est propre, mais ne "consomme" pas le parfum autant que nous, c'est un fait. Cependant, la percée exceptionnelle de certains parfums semblent confirmer que cela peut changer, qu'ils ne sont point fermés, mais pas ouverts à tout non plus. Notre regard occidental ou d'esthète bien français, lui, doit par contre prendre beaucoup de recul. Je tenterai de vous en faire part très bientôt dans un prochain article. Quelques regrets tout de même : ne pas avoir eu assez de temps pour aller humer l'air des montagnes et ne pas avoir vu de sakura en fleurs.

En préambule au prochain article j'aimerai vous demander : quel sont d'après vous les parfums ou type de parfums qui plaisent au Japon ?

jeudi 1 octobre 2009

Bonjour du Japon.

Un petit mot rapide du Japon, qui reserve de belles surprises parfumees, mais ou une chose est certaine, le parfum n'est pas dans les moeurs. A bientot pour quelques articles sur les parfums de ce pays.

samedi 19 septembre 2009

Un peu de relecture.

Pendant mon absence, retrouvez une sélection d'articles à relire (cliquer sur le nom) :

- 2009 :

Aout : D&G Anthology, Idylle.
Juillet : Comme des Garçons Stephen Jones Millinery, Paul Smith Man, présentation des chroniques olfactives de Céline Ellena
Juin : Pi Néo.
Mai : Pure Oud by Kilian, Langages de Vétivers.
Avril : Détour des Sens.
Mars : interview de Sylvaine Delacourte directrice de la création Guerlain.
Février : interview de Cinquième Sens, Linge au coeur, Christian Louis.
Janvier : The Smoke.

- 2008 :

Décembre : Sicily et Drôle de Rose, Chloé.
Novembre : l'Olfactorium Cinquième Sens, Bienvenues sur Olfactorum.

Je vous retrouve vers la mi-Octobre avec de nouveaux articles. Bonne relecture à tous et à nouveau merci pour votre fidélité. D'ici là, bonnes promenades et découvertes parfumées et bonnes lectures des blogs amis à tous.

jeudi 17 septembre 2009

A Scent - Issey Miyake 2009 : c'est dans l'air !

L'année 2009 est visiblement une année riche en coups de coeur et ils se succèdent très rapidement. Ce dernier mois, Aqua Universalis et Cologne pour le Soir tout juste après ma petite tendresse pour le bouquet d'Idylle et la bouffée d'air pur de A-Scent.

Pour être honnête, A-Scent n'a pas été un coup de coeur "immédiat", mais marquait d'emblée un point : il se démarquait par la présence de Galbanum. Très friand de cette note verte et terreuse dont French Lover de Frédéric Malle en serait l'illustration ciselée, le traitement ici revendiqué, au C02, retenait mon attention. Quelques jours plus tard, je recevais un mail de l'agence Magic Garden me proposant d'assister avec Juliette de Poivrebleu et Sixtine d'Ambregris à une présentation du projet A-Scent dans les locaux de Firmenich.

Au vu de quelques regards souvent interloqués après avoir prononcé le nom de l'entreprise dans laquelle je travaille, ce n'est qu'en expliquant mon travail que les personnes attentives comprennent mieux mon rôle, les enjeux et les contraintes de "ma boite". Comme "elle" m'a sans doute collé une étiquette assez peu "glamour" dans le monde du parfum, je comprends combien il est important parfois d'expliquer ce que l'on fait et pourquoi.
Je suppose que les équipes qui ont travaillé sur A-Scent tenaient à ne pas voir ce parfum passer inaperçu dans les rayons, les blogs, la presse insipide et blasée, ou comme une victime du "j'aime, j'aime pas". C'est sans doute un peu pour cela qu'ils souhaitaient nous le présenter. Pourquoi refuser ? Nous avons vécu un merveilleux moment et le parfum devenait du coup plus familier.

A-Scent part sur une idée simple : sentir l'air ! L'idée de fraicheur pure domine dès le début, et ce n'est qu'après s'être creusé la tête pendant plusieurs jours que Daphné Bugey pense au Galbanum. Pour correspondre à l'idée de pureté, les équipes choisissent de retenir celui extrait au Co2, plus "transparent", plus limpide et surtout moins terreux. La jacinthe s'y joint, comme un couple olfactif inséparable et très unis. Deux variétés de jasmin très différentes dans l'effet qu'elles produisent se conjuguent à cette verdeur acquise. La verveine et sa facette citronnée et pétillante traverse cette verdeur pour y apporter un effet rafraîchissant. Ce que je trouve intéressant, c'est qu'à ce stade, le parfum aurait été très "pointu", presque acide, trop sans doute ! Il fallait l'arrondir. Pour cela, Daphné choisit le cèdre comme pour faire écho aux bois légers du japon et au bambou, et une mousse d'arbres exclusive, appelée mousse "cristal" d'un bel effet mouillé mais qui reste "transparent". Enfin, une petite pointe d'amande, des muscs que Firmenich développe à la pointe de la recherche et un tout petit trait de patchouli et d'ambre comme un écho aux références que sont les chyprés-verts du passé. A-Scent se dévoile : le résultat m'évoque exactement l'odeur que l'on sent lorsque l'on coupe un abricot au couteau. Fermez les yeux, comparez, et imaginez un jardin vert et de l'air pur. C'est tendre, beau et cohérent. Le sillage rappelle à la fois Vent Vert, Ô de Lancôme et Cristalle dans une vision nouvelle, plus "cocooning".

Je me réjouis de la cohérence ayant prédominé ce projet : pureté, simplicité, jusque dans le flacon, sculpté par Arik Levy comme un bloc de verre découpé par extrusion. Si vous le poser sur une surface blanche, en fonction de l'éclairage, vous pouvez ne pas le voir, ni même les caractères mais seulement le deviner, c'est très étrange et d'un effet saisissant. Même la tige de vaporisation à l'intérieur du flacon est invisible. Le sens du détail jusqu'au bout.

Bravo donc à toutes les personnes que nous avons rencontrées, bravo pour le retour du style Issey Miyake par un joli parfum. Une marque peut parfois perdre un peu de son affectif, de son style et de sa signature si elle s'éloigne d'elle même, comme l'Artisan Parfumeur qui se met à vouloir "faire un peu comme Guerlain" avec sa vanille de Havane par exemple (elle est arrivée).
C'était aussi me semble t-il le cas d'Issey Miyake qui s'était un peu noyé dans L'Eau Bleue, L'Eau Intense et le Feu. Avec A-Scent, la cohérence est retrouvée autour d'une fraicheur verte. C'est dans l'air du millénaire, une fraîcheur qui vous parfume, mais qui est également très cohérente dans des draps, sur une serviette de bain, dans l'air, comme une bouffée d'air pur et comme vision d'une certaine universalité par Issey Miyake. Un parfum que l'on aime avoir "là", caressant, présent, autour de soi dans un souffle.

Un parfum, qui gardera pour moi une place à part, car j'ai vécu ce moment privilégié comme un rêve, un rêve de passionné. Merci encore à tous !

Comme vous le savez, je pars quelques jours me ressourcer dans le pays d'Issey, c'est aussi un peu pour cela que je tenais à parler de
A-Scent aujourd'hui. Je vous retrouve dans 3 semaines, avec de nouveaux articles. Merci pour votre fidélité.
D'ici là, bonnes promenades et découvertes parfumées et bonnes lectures des
blogs amis à tous !