jeudi 12 février 2009

Christian Louis : nez au pays Basque.

C'est par un frais matin de mars 2007 que j'ai découvert le village d'Espelette où je n'avais jamais mis les pieds. Outre le fait que ce petit village représente toute l'identité du pays Basque, une petite boutique attire mon attention : "tient, bizarre, j'ai jamais vu ça ? Et il vendent des parfums"? Curieux, bien sûr, mais avec quelques à priori du style "c'est encore un attrape touriste", j'entre dans la boutique sans savoir que j'avais fait la découverte d'une sorte de caverne d'Ali Baba des senteurs. Avec un sourire et une compétence assez rare de nos jours, la charmante vendeuse me présente quelques unes des créations : " mais ce n'est pas mal du tout " me dis-je ! Posant alors quelques questions, j'apprends qu'en ce pays officie un maître parfumeur du nom de Christian Louis. Tous les parfums de la boutique, c'est lui, depuis l'idée de départ jusqu'à ce qu'il y a dans les flacons et la marque, le style, l'identité, c'est lui aussi. "Mais alors, ça donne quoi ?" allez vous me dire ! Vous qui rêvez de parfums créés par amour des belles matières, par passion pour le parfum, de parfums créés pour des personnes loin de toute machine commerciale. Des parfums authentiques, à fleur de peau, des univers de voyages lointains, de personnalités rencontrées, des accords originaux, bien construits et de belles matières premières, c'est tout cela Parfums et senteurs du pays Basque. L'idée, la sensation, le feeling, c'est le moteur de Christian Louis, un homme passionné, enjoué. Pour construire un parfum, il parle de dualité, d'opposition constante : froid/chaud, tête/fond, léger/lourd, fort/doux belles notes/notes moins belles. Comment trouver d'autres mots ? C'est exactement cela ! Le résultat fait que l'art de créer un parfum est ici appliqué avec une maîtrise parfaite des notes et des accords. Mais parlons alors de quelques unes de ces créations, car il y en a beaucoup. Un lieu où il est passé, par exemple, telle cette terre basque apportée par bateau à Saint Pierre et Miquelon et que l'on retrouve dans Voyage à Québec, à l'odeur de terre, d'herbes épicées et de vétiver. Une ambiance, telle la Féria de Bayonne dans Féria, qui mêle pamplemousse, lavande, pêche et prunes comme un écho à ce jour de folie. Des souvenirs de gourmandise comme dans Un jour à Saint Jean de Luz, aux notes de pains d'épice et d'orange confite. Un parfum de pâtisseries orientales dans Parfum d'Orient, construit sur des notes vanillées, baumées et du gingembre, tout en douceur. De belles matières comme dans Un amour de Patchouli, qui est un des plus beau travail actuel sur toutes les facettes de cette matière première et qui en révèle ici toute sa richesse, cuirée, poivrée, camphrée mais aussi douce et chocolatée. Pour moi, un muste parmi les patchoulis "mono matière". Christian à même créé un parfum pour l'équipe de rugby de Bayonne, aux notes de fleur d'oranger, de piment et d'ortie, qui renvoie Eden Park et ses nouvelles fraîcheurs "lessive" au panier. But ! Christian est aussi un parfumeur obstiné, une obstination qui l'a conduit à rechercher ce que pourrait être l'odeur d'un loup croisé au hasard d'un roman qu'il a écrit ; Usain Ona (la bonne odeur en basque), est une parfaite illustration d'un exercice de style poussé à l'extrême et maîtrisé, une cohérence entre l'histoire contée dans un livre, et un parfum : une odeur de fauve, de sous bois, de forêt humide, de fourrure et un pari réussit tellement ce "cuir", prenant, animal vous prend par les tripes, vous colle à la peau et vous emporte dans un sillage énigmatique et unique. Toute l'oeuvre est réussie, chacun peut y trouver ses repères ! Il y a alors un petit problème : je crois que je les aime tous ! Ces parfums me font voyager, et je pourrai rester une journée entière dans la boutique pour en profiter. Pour les découvrir vous aussi, c'est à Espelette, sur la place principale, ou à Paris, place des Vosges. Une halte agréable pour une découverte sans à priori d'une parfumerie humaine et authentique. Un petit regret personnel : même si le choix de l'aluminium se justifie pour des raisons de conservation, il me semble qu'un packaging moins "kitch", plus actuel, plus petit, pour un prix autour de 35€, permettrait de plus facilement craquer sans se ruiner et de mieux valoriser les contenus. Faites en abstraction pour le moment car cela vaut le coup, et je souhaite à Christian de continuer à nous faire partager cette Usain Ona, pour le plus grand bonheur des amoureux que nous sommes. Quand un Méchant loup croise un autre loup, que se racontent ils donc ? Usain Ona passe et je la partage avec vous ! Parfums et Senteurs du pays Basque - Espelette , place principale - Paris, 18 place des Vosges - site : www.lemarcheduparfumeur.com

1 commentaire:

soph a dit…

très intéressant, et réjouissant que de tels petits parfumeurs existent encore aujourd'hui...