lundi 27 mars 2017

Superstistious - Frédéric Malle 2017 : enjoy the Silence !

Alber Elbaz et couture ne font qu'un ! Dominique Ropion et parfums, c'est un peu la même chose. Quelle bonne idée a eu Frédéric Malle en réunissant le meilleur des deux mondes, à l'heure où le lien entre une marque et son identité dans la mode se perd souvent ! Pour preuve, si l'on cherche un lien entre les coupes parfaites des vêtements Lanvin créés par Alber (en photos ci-dessus) et les derniers parfums de la marque, il y a de quoi s'interroger non ? 

De la même manière qu'un couturier actuel s'inspire des coupes et tissus du passé pour les repenser dans des textures technologiques permettant de nouvelles coupes et de nouvelles "expressions" du vêtement, le parfumeur découd le passé pour mieux le réinventer avec ce que la palette lui offre aujourd'hui. Je repense alors à ce que me confiait Dominique Ropion lors d'une soirée : "pour réinventer le parfum et créer de nouvelles formes, il faut connaitre ses classiques, les avoir travaillé, étudié, disséqué." C'est sans doute ce travail qu'il a accompli pour écrire Superstitious. Bien que Calèche, Arpège ou N°5 soient évoqués chez Frédéric Malle, j'imagine que c'est plutôt dans un des parfum les plus "couture" qui soit que Dominique Ropion est allé puisé son inspiration : le calme Silence de Jacomo, né en 1978. Logique non ? 


Des aldéhydes fusants en tête pour soulever le galbanum et ses puissantes notes vertes, une trame charpentée faite de rose, de jasmin et de notes de chèvrefeuille, de la tubéreuse énigmatique et qui donne du corps, voilà pour le départ. De beaux bois nobles et choisis comme le vétiver et le santal apportent une structure solide et élégante. Les facettes animales de Silence ont été réinterprétées avec ce qui se fait aujourd'hui en matière de muscs de synthèse qui peuvent présenter des notes à la fois rondes, humides, fruitées et boisées. Des dérivés de l'ambre gris semblent avoir aussi été choisis là où Silence s'en servait pour mieux se fondre sur la peau. Comme tout bon chypre-vert qui se respecte, bien entendu, mousse et patchouli achèvent de convaincre, mais sous des facettes plus douces que ce qu'ils étaient à la fin des 70's. Tout ces traits sont communs aux deux parfums, pourtant, là où Silence parait cintré même dans sa version actuelle, Superstitious est plus joufflu, plus confit, plus vaporeux aussi. La ressemblance entre les deux est si flagrante qu'elle va même jusqu'à reprendre le code couleur sur le flacon et le packaging ! 


Sillage monumental, tenue parfaite, forme olfactive unanimement saluée comme étant une référence, comment rester insensible à la beauté de cette oeuvre qu'est Superstitious que l'on imagine parfaitement portée en mode vintage à Paris, New York ou Dubai, comme pour Portrait of a Lady du même parfumeur ? 

Tant pis pour moi s'il fallait passer Silence sous silence, mais j'imagine qu'avec un tel nom, Frédéric Malle et Alber Elbaz font confiance au destin ! Mais si certaines choses ne se disent pas, ou que le rêve est trop lourd pour vous, oserez vous écoutez le silence ?  

Illustrations : Frédéric Malle et créations Alber Elbaz pour Lanvin. 

mardi 21 mars 2017

Boss Bottled Tonic - Hugo Boss 2017 : variation sur le même thème.

Le thème de Boss Bottled est exploré régulièrement, sous diverses variantes, parfois assez insipides comme Bottled Sport, Intense ou Night qui ne m'ont jamais marquées, ou qui n'ont rien à voir comme Bottled Unlimited relativement insipide. Cependant, au cours de son chemin commercial à succès, le fameux flacon se voit quelquefois rempli d'une jolie évolution. C'était le cas de Bottled Oud l'an dernier, plutôt bien faite, et c'est aussi le cas cette année avec Boss Bottled Tonic, qui arrive en Avril.

Sans dénaturer la trame framboise-cannelle-vanille-vétiver-cèdre presque cuirée de l'original, on découvre ici un parfum dont les notes de tête et de coeur ont été affinées, nuancées, sans doute pour atténuer le coté signé mais peut être un peu trop marqué pour certains que peut avoir l'original. Ainsi, un cocktail d'agrumes, de gingembre, soutenu par un dhmol pas si envahissant que cela et qui "soulève" la pomme verte bien croquante se dévoile dès les premières notes. Cette envolée rend le parfum beaucoup plus "tonique", et l'évolution se fait tout en douceur par l'intermédiaire d'une note boisée marine assez discrète.

Ce joli retravail semble directement s'inspirer du cocktail Caribean Lagoon aux notes amères de Tonic, de citron, de gingembre, de rhum et de Curacao. Sur peau, le parfum se pose plus lentement et l'on sent une légère note santalée qui lui va à ravir. Le sillage reste également très élégant, tout en conservant la personnalité et la signature Boss Bottled. J'aime aussi beaucoup cette association de bleu et d'argent qui lui va très bien.   

Il se dessine cette année une tendance : celle de travailler plus en finesse les fragrances, qu'elles dérivent d'un parfum à succès ou pas. Quelques nouveautés comme 1881 Signature, CKAll, Hot Cologne sur lesquelles je reviendrai appuient mon propos. En revanche, il y a peut-être un travers : s'ils sont moins intenses, sans doute pour être plus discrets que leurs aînés, ils semblent aussi moins tenaces. C'est plus difficile à vérifier quand on porte soi même le parfum, le nez pouvant saturer et s'habituer à le sentir, et ainsi ne plus saisir s'il a un sillage raisonnable ou s'il est insipide. Chacun se fera donc son propre avis sur ce petit dernier, mais pour ma part, déjà amateur de l'original, j'approuve cette variation sur le même thème. 

Illustrations : cocktail Caribean Lagoon, Hugo Boss.