mercredi 31 mars 2010

Petite Annonce de la pleine Lune !

Afin de compléter son patrimoine et de se faire un avis "en live" de ces parfums pour mieux enrichir Olfactorum, Méchant Loup est actuellement à la recherche de flacons ou de décants suivants :

- Géranium pour Monsieur en 100ml, 50ml, en mini flacon de 10ml ou en décant 10 ou 30 ml.- Aqua Universalis en 70ml, ou en décant de 10 ou 30 ml.

- Petite Chérie en décant de 10ml.


Si certains d'entre vous se retrouvent avec un flacon plein ou utilisé partiellement de ces 3 parfums et s'en sépareraient sans douleur, je suis client. Si vous offrez la possibilité de faire un décant, j'apporte un petit flacon de 10ml. Bien sûr, nous nous accordons sur le prix dans tout les cas. Un échange est même possible avec un parfum que j'ai éventuellement.

Je vous remercie de me contacter par mail si intéressés : olfactorum@gmail.com.

Merci à vous.

samedi 20 mars 2010

Interview - Fabrice Olivieri : parfumeur à l'esprit libre !

Fabrice est de ces parfumeurs discrets, qui cultive plutôt la confidentialité. Ses études de commerce l'ont conduit chez Takasago où il fait ses classes au marketing, mais du contact quotidien avec les parfumeurs naît un sentiment de frustration car l'envie de créer se fait rapidement sentir. Il quitte alors l'entreprise pour poursuivre sa formation olfactive, commencée dès la fin de ses études, avec le maître parfumeur Monique Schlienger. Il poursuit l’apprentissage du métier grâce à des passages en tant qu’assistant parfumeur, chez IFF puis chez Quest. Expérience impérative à ses yeux pour perfectionner ses connaissances techniques et aussi pour se confronter volontairement à la création des autres parfumeurs. Autre rencontre majeure, Christopher Sheldrake qu’il a secondé à cette époque.

Esprit libre, Fabrice fonde il y a sept ans sa propre société de création, Trendslab, où il s'occupe à la fois de la création et de dénicher des projets, toujours avec enthousiasme et passion. Le démarrage fut essentiellement dédié à la création de parfum pour des cosmétiques, mais de fil en aiguille, les professionnels le reconnaissent et le contactent aussi pour leurs eaux de toilette. Aujourd'hui, il est très souvent impliqué dès le départ dans le processus de création de beaucoup de projets. Il a par exemple été partie intégrante de l’équipe créative de Nature & Découvertes pour la conception de trois eaux de parfums bio. Il aime travailler directement avec les créateurs, comme avec Ida Delam pour l'élaboration de son parfum, Le 6.

Rencontrer Fabrice, c'est entrer dans un labo au coeur d’un appartement de Pigalle, et découvrir un univers intimiste, convivial et choisi :

Fabrice, tu es connu entre autre pour avoir créé la bougie du prestigieux Studio Harcourt, comment cela s'est il passé ?
Il s'agit avant tout d'une rencontre avec la directrice du studio, qui, au cours d'une discussion me parle de son envie de parfumer le studio pendant les séances photos. Pour ce projet, j'ai choisi un travail en clair obscur, dans le plus pur style Harcourt. Un contraste blanc / noir, de musc blanc et miel blond sur un fond sombre et chaud de gingembre et de cuir. Depuis, c'est devenu la signature du lieu et les stars l’ont adopté !

Qu'est ce qui fait selon toi que l'on te contacte pour un projet, qu'est-ce qui te motive et te plait ?
Je suis très attaché à la cohérence globale, à l'idée, à l'histoire de la marque, et à la traduction en parfum de cet esprit. J'aime les projets à forte identité, sur lesquels je ne me sens pas formaté. Je travaille toujours en interface avec mon client, ce fut le cas par exemple avec Pamela Roberts sur la crème Jatamansi et avec Ida Delam, pour Le 6. C'est sans doute cette proximité et cette réactivité qui fait que l'on me contacte.

Tu as travaillé un projet Bio pour Nature et Découvertes. Quelles ont été les contraintes du bio ?
La contrainte du bio impose de travailler uniquement avec des matières premières naturelles. Aussi, les effets produits par les matériaux de synthèse, qui apportent fraîcheur persistante, volume, sillage, sont difficiles voire impossibles à obtenir. De plus, ces matières naturelles doivent être conformes au référentiel Ecocert, exclusivement obtenues par solvant naturel. Contrainte supplémentaire : leur coût ! Il faut alors trouver le bon accord, développer un style propre à la formulation naturelle, tout faire pour que le parfum tienne, le tout en restant dans un prix raisonnable. Vous imaginez que ce n'est pas simple, mais c'est un challenge qui me plaît, la contrainte permet souvent de se dépasser.
La gamme d’eaux de parfum « Esquisse de Nature » de Nature et Découvertes était un projet passionnant car nous avons travaillé ensemble sur le concept, le développement des parfums, le packaging, le merchandising, en veillant sans cesse à ce que tout soit cohérent.

Tu es fier de ce travail ?
Oui, bien sûr, compte tenu des contraintes imposées, je suis très satisfait de ces parfums et tout particulièrement de Bulle de Yuzu, qui porté par temps chaud va dévoiler lentement toute sa fraîcheur lumineuse. Ce n'était pas évident.

Qu'aurais tu envie de dire sur la parfumerie d'aujourd'hui ?
J'ai l'impression que la notion de qualité des matières se perd. Moi qui suis si attaché à l'effet de profondeur qu’apportent les belles matières naturelles, je trouve que beaucoup de parfums manquent de corps, de texture, de richesse aujourd'hui. Les lancements, trop nombreux, n'en finissent pas de se ressembler dans un marché mondialisé et uniformisé. Je me demande souvent où est passée l’âme de la parfumerie ? Globalement, la créativité est brimée par les tests et beaucoup de parfumeurs sont frustrés ! Pourtant ils ont dans leurs tiroirs de beaux trésors.

Crois-tu qu'il soit encore possible de fidéliser de nos jours ?
Les créations intéressantes viennent à mon sens principalement des marques de niches, plus créatives, dont le succès repose sur une fidélisation de leurs clients qui recherchent l’odeur avant la marque. Si une personne s’approprie un parfum, elle y reviendra. Les marques alternatives à succès l’ont compris

As-tu le sentiment d'être libre, est-ce un luxe ?
Ce n'est pas toujours facile, il faut gérer tant de paramètres. Le travail est parfois lourd mais oui, je me sens libre et oui, j'ai le sentiment que c'est un luxe.

Puis-je te demander pour finir les parfums qui t'ont marqués ?
Bien sûr, ce sont souvent les anciens Guerlain ou Chanel comme Shalimar, Après l’ondée ou N°22, sur lesquels j'éprouve toujours une émotion quand je les croise. Puis il y a de magnifiques féminins comme Diorissimo, 24 Faubourg d’Hermès ou Organza de Givenchy. Des chefs d’œuvre « hyper texturés » chez Serge Lutens comme Féminité du bois, Arabie, Ambre Sultan ; Cuir Améthyste chez Armani Privé, Sables d’Annick Goutal. Quelques beaux masculins, Pour un homme de Caron, Dior Homme, D&G Homme, Egoïste de Chanel, Opium pour homme en eau de parfum YSL, Grey Flannel de Geoffrey Beene. Quand j'ai envie de me ressourcer, c'est la centenaire Eau de fleur de cédrat de Guerlain. Voilà une liste non exhaustive dans des styles bien différents, n'est-ce pas ?

Merci Fabrice pour cette rencontre, je reparlerai très prochainement de certaines de tes créations plus en détail.

Illustrations : Fabrice par Harcourt, Bougie et ambiance Harcourt, Nature et Découverte, Ida Delam.

samedi 13 mars 2010

Chance Eau Fraîche - Chanel 2007 : plongeon acidulé.

Que faut-il penser des "flankers" quand vous les trouvez plus réussis que l'original ? La réponse est sans doute que parfois, certains lancements ne passent pas bien, car sans vraiment savoir pourquoi, ce n'est pas le bon moment, ou ils ne s'inscrivent pas dans l'air du temps. Envisager l'accord sous un autre angle semble alors être une solution, qui parfois peut être de meilleure augure. Chance semble ne pas avoir eu beaucoup de chance à son lancement, plutôt timide pour un Chanel. Il fallait donc réagir et c'est ainsi que seulement quelques mois après est apparue la déclinaison Eau Fraiche. Curieusement, j'ai le sentiment que celle ci rencontre un succès plus immédiat tellement je la croise plus souvent que l'original dans la rue, ce qui n'est pas pour me déplaire non plus.

En effet, je trouve Chance Eau Fraiche plus intéressant moi aussi, sans doute à cause de son sillage plus marqué et plus scintillant. Le bouquet de fleurs s'en trouve dynamisé, ce qui le rend plus agréable que l'accord un peu rond mais un peu "plat" de l'original . La structure de fleurs blanches sur un fond de patchouli et de notes ambrées-vanillées que l'on retrouve dans plusieurs parfums Chanel du moment semble avoir été travaillée pour accentuer l'envolée et le sillage par l'ajout de notes très fraiches de bonbons acidulés de fraise des bois, de mandarine, de pamplemousse et d'une note boisée-marine que je nommerais "eau de pluie" que j'aime beaucoup.

Chance Eau Fraiche affiche plus de "montant" mais garde tout de même cette ossature légèrement lessivielle et cocoon que l'on trouve aussi dans Chance, sans tomber non plus dans le facile tellement le mariage de matières naturelles et de synthèse est maitrisée. Du coup, Chanel évite adroitement la "soupe de fruits sucrée" dont le marché est envahit sans arrêt et qui franchement mériterait un grand coup de balais, et évite le lessiviel tendance propre sans âme et sans émotion, tout en flirtant à la limite des deux. J'aime en outre cette idée de fraicheur contemporaine, qui peut paraître un peu passe-partout pour certains, mais dont le sillage affiche une belle présence et une signature Chanel unique et marquée.

Chance Eau Fraiche est un parfum facile à porter, à appréhender, qui fait plutôt jeune demoiselle que dadame, et qui, si on le compare à son frère pour homme Allure Homme Sport, porte la signature olfactive grand public et internationalle de Chanel ses dernières années. Du coup, il me parait assez unisexe dans un style propre et décontracté. On aime ou l'on déteste, pour ma part, si vous devez saisir une Chance, préférez celle là, c'est la saison !

Illustration : Daniela Edburg.

lundi 8 mars 2010

Womanity - Thierry Mugler à venir ? Let's go party...for women only !

Thierry Mugler est depuis 1992 de ceux qui innovent. Mode tranchée et exubérante, chaque lancement parfum hors flankers, sous l'impulsion de Clarins, étant aussi typé que stylé. Gourmandise futuriste avec Angel, cocon torréfié avec A Men, nouvelle couleur d'une cologne moderne mille fois copiée, jamais égalée avec Cologne, solaire polarisant avec Alien. Dans cet univers, que pourrait donc être le prochain opus ?

Luxe et volupté, tiens pourquoi pas ? Et si pour une fois c'était un retour sur l'histoire, dans une tradition et un style bien français transposé dans un monde futuriste imaginaire. Les femmes sont à l'honneur, se libèrent et se lâchent : reines déchues, comtesses débridées, nymphomanes camées ... d'accord, tout ceci n'est pas très sage ! Mais pourquoi pas aussi madame tout le monde ? Luxe et volupté, en somme, ça fait tout de même rêver !!

Alors si ces gens s'adonnaient au champagne qui coule à flot, au caviar, à quelques pâtisseries grandiloquentes, cela donnerait quoi ? Livrons nous donc à un exercice et imaginons un parfum : un peu de champagne, traduit par de la mandarine, du citron, quelques aldéhydes et une note de lie de vin Chardonnay. Pour suivre le bal, un bouquet de roses piquantes et fusantes, et une tubéreuse bien ronde et venimeuse. Le caviar complète la palette dans un cocktail de notes truffées, poivrées, auxquelles se joignent la calone et ses notes marines et un peu de cuir. L'ensemble pourrait avoir une envolée proche d'Aqua fiorentiana de Creed en moins "poisseux", un coeur floral fusant de pivoine et de rose, marié à la voluptueuse et intrigante tubéreuse sur un fond plus sensuel, plus chaleureux, plus vanillé, "truffé" et cuiré. La fête se fait plus sensuelle, plus sombre sur la fin.

Non dénué d'une élégance contemporaine en flirtant sur la décadence d'esprit de certaines notes et le mystère de fleurs charnelles, Womanity pourrait être la dernière tentation à faillir devant le peuple. Un parfum qui fait voler comme un vent de liberté, celle des femmes !
Et comme pour se jouer des clichées à l'extrême, pour le flacon, parions sur le rose !!

Comme l'an dernier pour Idylle avec Oh My !, j'aime parfois livrer mon imagination à quelques anticipations. Voilà donc ce que pourrait être le prochain Mugler, mais je suis peut être complètement à coté. Nous le saurons sans doute très bientôt mais, et vous, qu'en dites vous ?

Illustration : David Lachappelle

mercredi 3 mars 2010

Aedes de Venustas - l'Artisan Parfumeur 2008 : encens d'enfer.

Bertrand Duchaufour, l'Artisan Parfumeur, l'antre du parfum de big apple, de l'encens, du cuir, du poivre, du café, du patchouli, de la vanille ... que de beau monde me dis-je ! Mais comment faire pour découvrir ce parfum rare qu'est Aedes de Venustas ? Aller à New York n'est pas prévu et impossible dans l'immédiat, le faire livrer par la poste semble hasardeux venant des US. Missionner une personne est une bonne idée, mais qui ? Et c'est alors qu'un de vos proches vous apprend qu'il se rend en mission dans la ville aux grattes ciel. Banco ! Impression de la page de présentation du parfum, adresse du 9 Christopher Street envoyée et surlignée, et la mission professionnelle se transforme aussi en mission Aedes de Venustas. "James, vous avez le code ? : Aedes, Bertrand Duchaufour, il ne m'a pas encore déçu, et j'ai un bon pressentiment".

Deux semaines plus tard, mission accomplie et je découvre enfin le sésame... "Tiens donc, ce n'est pas exactement ce que j'imaginais". En effet, puisque James m'avait un peu tenu au fait de la déco un peu spéciale de la boutique éponyme et vu les photos, je m'attendais à une surprise, mais craignais tout de même un petit quelques chose de criard, à l'américaine

Il n'en est rien. L'élixir, c'est l'encens. Identifiable dès le premier nez, il est le pilier de Aedes de Venustas et ce qui restera du début à la fin de la journée. Je comprends alors que le cuir et les autres notes mentionnées sont ici uniquement pour appuyer les facettes de la résine qui s'exprime de manière très directe, linéaire et omniprésente. Ce n'est que par petites touches que chacune des autres matières se superpose et apporte sa contribution à l'édifice. Les notes camphrées de la cardamome et du patchouli apportent le montant, le piquant du poivre noir et du café collent aux facettes épicées de la résine, un iris un peu terreux souligne les aspects un peu "roots" de la résine pure, comme pour lui être vraiment fidèle dans le moindre détail. La vanille, l'opopanax, le benjoin et un accord de muscs semblent du coup être des prétextes tellement ils se font discrets, comme pour soutenir et arrondir un temps soit peu les angles de ce monolithe.

Aedes joue sur la corde encens de manière encore plus radicale que Noir de Reminiscence, plus ambré, ou que Serge Noire, dans lequel je remarque au passage une note sucrée de cannelle. Il fait écho chez l'Artisan Parfumeur à Passage d'enfer, mais de manière plus franche, moins douce, sans compromis. Le poivre et la couleur grise qu'il m'inspire me renvoient à Poivre Samarcande, tout comme sa forme olfactive, très linéaire et très épurée. L'encens enfin, outre Noir et Serge noire fait le lien avec Cardinal chez Heeley, plus boisé, l'Eau Sento, plus "mouillé" ou Ether chez Iunx, beaucoup plus rond.

Un encens très brut, qui m'incite à vous donner l'envie de lire ce qui est écrit sur cette résine mystique ici, ainsi que ce qu'en disait Poivrebleu à propos de Passage d'enfer.

Il faut vraiment aimer l'encens, et c'est mon cas. Ce parfum me transporte dans des univers très différents. Il rappelle un peu les volutes de fumée de cannabis, l'odeur énigmatique et presque "pierreuse" des fumigènes créant le brouillard dans les discothèques, et immanquablement celles des églises. Sans vraiment pouvoir expliquer pourquoi, il me renvoie aux pierres des ruines romaines imaginées dans la lumière de Hubert Robert, dans ses endroits où l'on devine que l'encens faisait partie du paysage et brûlait pour détendre l'atmosphère et diffuser ses volutes à travers la fumée. Le "per fumare" par Mathilde Laurent, c'est un cuir orné de quelques touches de thé fumé, par Bertrand Duchaufour et Aedes de Venustas, c'est en traversant l'encens qu'il s'exprime ! Un encens "d'enfer", qui hélas ne se trouve que dans la "demeure où tout est beau": Aedes de Venustas, et c'est au 9 Christopher Street, à New York. Le prix me direz vous ! Bon d'accord, je suis malade, mais j'ai au moins une chance sur ce coup, j'ai eu du flair. Je "savais" qu'il me plairait, car ce n'est pas la première fois que ce cher Bertrand sait faire ce qui plait à Méchant Loup ;-)

Pour les amateurs et amatrices, quelques décants limités sont possibles (me contacter) et si vous aimez l'encens, chez l'Artisan, vous aimerez sans doute également Passage d'Enfer, moins radical, ou l'Eau Sento chez Iunx.

Merci d'avoir suivi ce passage en revue de quelques créations de chez l'Artisan Parfumeur qui s'achève donc avec ce parfum !

Illustration : Bazinul par Hubert Robert et Aedes de Venustas par l'Artisan parfumeur.