lundi 9 février 2009

Noir, Incense et Serge Noire : noir, foi et repli sur soi ?

Il est une impression de calme et de sérénité lorsque l'on entre dans une église. Quelque soit l'époque, le lieu est souvent chargé d'émotion de sensations apaisantes mais aussi olfactives. L'encens laisse son empreinte sur des boiseries cirées et l'odeur d'une crypte oscille entre la pierre froide, l'humidité et la poussière. Depuis maintenant presque dix ans, la marque Comme des Garçons s'est aventurée sur ce terrain et nous fait partager ses voyages dans différentes églises et temples du monde avec la gamme Incense. Tantôt pointus (Avigon), tantôt adoucis de bois (Jaisalmer) tantôt enrichis de baumes, d'épices, d'iris et de vétiver d'iris (Kyoto, Ouarzazate et Zagorsck), les 5 parfums de cette gamme sont marqués par un axe central : celui de l'Encens et de ses notes métalliques, froides et distantes. Ces parfums se sont attirés des adeptes parmi une clientèle plutôt initiée, qui semble maintenant devenir une cible convoitée. Habilement, Serge Lutens s'inspire de comme des Garçons pour nous livrer Serge Noire, renouant par la même avec une certaine authenticité de style : rigueur du trait, choix des matériaux, Serge Noire est sculpté autour des notes froides et métalliques de l'encens, du silex et des résines qui ne sont ici jamais rondes, mais pointues, comme ciselées avec une précision chirurgicale. Serge Noire serait selon l'appréciation, soit le travail autour d'un tissus coupé au millimètre dans un style épuré et sobre qui laisserait s'échapper quelques notes de fil de serge noir ou de flanelle, soit la pierre froide, ouvragée presque fragile d'une cathédrale gothique. Aujourd'hui c'est Réminiscence qui nous propose son voyage en territoire spirituel, accompagné d'une ligne de bijoux pour homme. Pointu, camphré, résineux et poivré sur ces notes de têtes, Noir accompagne bien les bijoux de métal, mais se fait plus rond que Serge Noire dans son évolution, sur des notes résineuses d'opopanax et d'encens pour se terminer sur une petite douceur épicée qui me fait penser à un accord de café et de fir balsam. Ce dernier né perpétue ainsi le patrimoine olfactif de Réminiscence, qui nous a habitué à travailler les résines et les baumes avec une dextérité et un savoir faire peu courant. Un phénomène se produit alors, comme pour le Patchouli de la même maison : l'addiction, et celles est ceux qui l'ont adopté savent de quoi je parle. Saluons donc l'arrivée de ce très clivant Noir, qui se niche certes sous des voûtes déjà explorées mais sûrement pas pour nous déplaire, car son évolution sur la peau est remarquable. Ce territoire olfactif n'était à priori pas le mien, mais je ne suis pas resté insensible au charme sombre et résineux de ce dernier né. Je n'en reçois que des compliments. L'encens, les résines, la pierre, le noir, l'église, la foi, territoires olfactifs un peu froids et distants, non dénués de dimension spirituelle, comme un besoin de recueillement, de sérénité, de calme et de repli sur soi, comme un refuge en ces temps tourmentés ?

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