lundi 26 octobre 2009

Labdanum de Séville - L'Occitane 2009 : back to gold.

Il peut être perçu comme un peu trivial de commencer un article sur le parfum en parlant d'argent, mais après tout, nous avons tous un portefeuille, un budget et une passion ! Deux slogans publicitaires bien pensés me viennent en tête pour commencer cet article : "Pas assez cher mon fils" ou "Il faudrait être fou pour dépenser plus". Les plus jeunes d'entre vous ne connaîtront peut être pas, mais ils me paraissent bien à propos de Labdanum de Séville.

Ce parfum s'inscrit dans la gamme Voyages en Méditerranée lancée il y a quelques temps sous le nom de Notre Flore, sans vraiment rencontrer le succès. En effet, l'Occitane bénéficie d'une image peu liée au parfum, et qui plus est de qualité. C'est un tort croyez moi, car en misant sur le long terme, la stratégie déployée par cette gamme Voyages en Méditerranée portera ces fruits, surtout quand elle nous en livre de si beaux.

Parlons donc de ce Labdanum de Séville. Si vous souhaitez connaître l'histoire et l'origine de cette matière première et la manière dont elle est obtenue, je vous invite à chercher sur un célèbre moteur de recherche ou sur auparfum car tout est écrit. Inutile donc d'en reparler à mon sens. Sachez seulement que la résine obtenue, utilisée en parfumerie, est d'une richesse olfactive incroyable, dévoilant plusieurs facettes entre la vanille, le cuir, le tabac blond, le cognac, la fumée et la résine. Ce n'est pas un hasard si Shalimar et le plus confidentiel Habanita lui doivent une grande partie de leur signature.

Dans Labdanum de Séville, toutes les facettes de cette résine sont travaillées et magnifiées. Le parfum part sur des notes confites d'orange et de fruits secs (abricot), m'évoquant le parfum de certains cognacs. Suivent des notes boisées de cèdre, de patchouli et de santal aux inflexions de noix de coco râpée. Quelques épices viennent apporter du relief et une douceur enveloppante, comme la cannelle et le poivre, puis se dévoile alors, dans toute son expression, un labdanum esthétisé. Pour cela, le parfumeur a choisi de le lier à de l'absolu tabac, il me semble, comme pour former un duo naturellement cohérent avec les volutes vanillées qui suivent. Rarement utilisé mais très intéressant, le tabac marque ici sa présence parce qu'il rappelle immanquablement le célèbre tabac blond miellé Amsterdamer. La vanille, se dévoile dans une variété sombre, riche, presque crémeuse, et sans doute un peu de benjoin. Ils caressent de leurs rondeurs ce beau tabac. Enfin, et je m'arrêterai là, le résinoïde labdanum souligne le parfum de ses facettes fumées, résineuses, cuirées pouvant rappeler le bois ciré. Je soupçonne également un trait de vétiver bourbon, fumé, sec et délicieux sur la peau.

La maîtrise est parfaite, le trait est juste. Labdanum de Séville n'a pas besoin d'une icône défoncée qui voit la vie en noir ou de se vouloir aphrodisiaque, il l'est de facto. Point non plus d'évocation pompeuse ou de prix astronomique pour revendiquer un luxe réel. Le juste talent d'un parfumeur ayant une maîtrise parfaite de la matière et du ton voulu, et la volonté d'une marque de perpétuer à sa manière une certaine idée de la belle parfumerie grassoise. Il ne m'a pas été confirmé s'il s'agissait de Karine Dubreuil, mais quoiqu'il en soit, je lui adresse un grand bravo.

Labdanum, c'est un peu mon vrai Back to black, celui que j'attendais lorsque l'on m'a décrit ce dernier, mon jardin (ou thé) d'Aladin dont je rêvais depuis quelques années. Pour d'autres, ce sera un peu de Fumerie Turque ou d'Atelier d'Artiste sans notes animales aussi prononcées. Un vrai tabac blond, qui évoque le tabac à pipe lorsque l'on ouvre le paquet, les cigarillos à la vanille, le thé rouge bourbon de Mariage Frères, mais aussi les couleurs chatoyantes et dorées de Séville, du cognac, du pain d'épices, du cuir fauve d'un fauteuil, d'un feu de bois, et la chaleur des gens qui nous entourent. L'automne est parfait pour en révéler ses facettes.

Le flacon massif reprend sur le bouchon la rose des vents de manière plus discrète que sur les plus anciens. La vaporisation, très étudiée, est un vrai plaisir. On ne voit même pas le tube dans le flacon. La qualité, la vraie, dans le moindre détail. Alors, si vous aimez le tabac blond et que vous résistez à celui-ci, j'aimerais vraiment savoir quelles en sont les raisons ? La rémanence peut être, un peu faible ? Alors, même si le tabac blond n'a pas encore dit ses derniers mots cette année, ce Labdanum vaut bien quelques deniers de sacrifice, si c'en est un !

J'en profite pour préciser à ceux qui recherchaient un parfum pour remplacer Ruch pour Homme de Gucci aujourd'hui disparu. Dans la même gamme Voyages en Méditerranée, le Cèdre, un bel accord boisé et floral mérite un détour, mais c'est à vous de voir !

Labdanum de Séville : eau de parfum 75 ml, 55€ dans les boutiques l'Occitane. Illustration : l'Alcazar de Séville, bains et bois.

A parte : je ne pense pas spécialement à changer de travail dans l'absolu, mais ce que font certaines marques m'inspire à envisager d'autres horizons. Alors, à tout hasard, si vous avez connaissance d'un poste qui conjugue parfum, contacts humains et international, j'en discuterai bien volontiers. Quatre marques me plaisent à priori : L'Occitane, L'Artisan Parfumeur, BPI et Firmenich. Voilà qui est dit.

vendredi 23 octobre 2009

Mon Top 10 d'automne ... après les filles !

Puisque les filles s'y sont mises, voici un top 10 exclusivement masculin. Celui de Graindemusc ayant ravivé mon intérêt pour Knowing, que j'aime depuis le début mais qui se fait malheureusement oublié me fait penser que le Top 10 est une excellente idée pour faire émerger quelques idées et permettre à certains parfums de sortir de l'anonymat, comme ce fut le cas pour Sicily me semble-t-il. Une idée qui tombe bien, car l'automne arrive et parce que j'étais bien parti pour avec mon article "trouver son parfum". Ce n'est pas un classement par ordre de préférence, mais juste un Top 10 dans l'humeur du moment. N'hésitez pas à le compléter par vos impressions si le coeur vous en dit !

1) X de X : c'est celui dont je parlerai dans le prochain article, mais je ne suis pas pressé. Pourtant, ce fut le coup de foudre immédiat, de ceux qui n'arrivent que tous les 5 ans environ... suspens et patience !

2) Méchant Loup de l'Artisan Parfumeur : ce n'est plus un secret mais il fait maintenant partie des indétrônables, vous savez, ceux dont on ne veut pour rien au monde qu'ils soient un jour discontinués.

3) Héritage de Guerlain : bien sûr, je vous épargnerai un long paragraphe, il a déjà été suffisamment évoqué dans mes articles, mais il est toujours là, en maitre absolu.

4) L'Eau du Fier d'Annick Goutal : les notes fumées semblent avoir leurs adeptes parmi les "aficionados de perfumes". Eau du fier est une odeur que l'on doit certainement sentir autour de la région du Fier, près de la Rochelle. Serait elle proche du feu de bois de joncs qui brûlent tellement le feu crépite dans ce parfum ? Ce serait aussi une interprétation du thé fumé lapsang souchong, qui se caractérise par une très forte note fumée et cuirée, accentuée ici par le clou de girofle. Quelques agrumes tels la bergamote et l'orange confite nuancent cette brutalité, mais il est tout de même difficile à dompter. Il n'en reste pas moins une référence qu'il faut connaitre et apprécier comme une oeuvre d'art, que je contemple de temps à autres avec bonheur.

5) For Him Musc Collection de Narcisso Rodrigez : à vrai dire un peu rebuté par la note acre de tabac froid et par le patchouli de l'original, mais séduit par la forme et l'ensemble, je n'avais pas franchi le cap depuis 2007. Toujours présentes, ces notes sont atténuées dans la rondeur laineuse d'un musc reconstitué mais très fidèle à du vrai (facette animale comprise), dans un iris clair et métallique mais qui se manifeste de manière très douce et dans un soupçon d'épices (poivre noir et rose) et de cuir (et oui, encore). Si le gris avait un parfum, ce serait ce For Him Musc Collection et ce serait un cachemire anthracite lavé avec Paic Laine (ah, la fameuse note addictive inconsciente). Il ne dénature en rien l'originalité de son aîné, son flacon est sublimé, il n'en fallait pas moins pour qu'enfin je puisse le porter.

6) L'Amoureux 6 de Dolce et Gabbana Anthology : et oui, parfois, sans savoir vraiment pourquoi, un parfums jugé facile, racoleur et commercial vous séduit. Des notes de tête qui font saliver (griotte et pamplemousse) littéralement posées sur cette base Procter & Gamble vue et revue mais toujours aussi efficace tant les bois de cèdre, les baumes résineux et la vanille y sont parfaitement équilibrés. L'Amoureux nous gratifie en plus d'une facette poudrée d'un effet étonnement "luxueux" à ce niveau de prix. Pas un chef d'oeuvre, mais une vraie créativité et une cohérence dans l'approche. Facile? Pas tant que ça, et vraiment plaisant.

7)
Black de Bulgari : Il faut croire que ce "Shalimar pour réplicants" comme le décrit Graindemusc a bien trouvé son public dans l'atmosphère "Bladerunneresque" de certains quartiers de Tokyo, Kyoto et Osaka. Par temps de pluie, dans les phares des taxis, il y trouve naturellement sa place. On le trouve très facilement là bas, contrairement à chez nous, et le prix vous vaudra un tour de rein tant il étonne : moins de 30€ le 40ml. J'ai craqué, enfin, depuis tant d'années que je le convoitais, et ça fait du bien tellement c'est bon..

8) Fahrenheit Absolute de Dior : déjà conquis depuis ses premiers cris par Fahrenheit, cette évolution plus épicée qui en dévoile une facette cuirée et irisée, accentuée en tête par le feu du cumin est un élixir de peau, d'une absolue subtilité.

9) Paul Smith Man de Paul Smith : très proche que le précédent dans son approche et dans sa forme mais moins floral, Paul Smith Man conjugue le meilleur de Dior Homme autour d'un iris polis (entendez par là sans l'aspect carotte) sur les notes de têtes, qui se loverait ensuite dans la finesse boisée du cèdre, la note goudronneuse d'un cuir patiné et la douceur de baumes comme la vanille et la fève tonka "tiens, on dirait Black". Le patchouli est bien là, comme une charpente solide, mais qui se fait discrète.

10) Déclaration de Cartier : celui-ci, je ne l'ai pas encore, mais en cet automne tout doux, j'ai tout simplement envie de retrouver ces notes fumées, de bois blanc légèrement lactées matinées de muscs blancs enrobants et d'agrumes. Une finesse d'exécution et une forme olfactive suivie mais jamais égalée ni vraiment imitée. A redécouvrir de tout urgence si vous voulez vous démarquez.

lundi 19 octobre 2009

Trouver son parfum : un exercice difficile ?


Devant la prolifération de nouveautés annuelles, trouver un parfum que l'on peut définir comme étant le sien est pratiquement chose impossible. Cela me semble être un exercice difficile, une démarche longue et compliquée pour celui ou celle qui décide de l'entreprendre.

Vous est il arrivé d'avoir une rencontre avec un parfum, de retrouver dès les premières notes cette sensation qu'il est fait pour vous, qu'il est tout ce que vous aimez ? Sa forme olfactive, ses couleurs et ses évocations vous transportent et vous parlent. Passer ce premier cap, vous savez presque d'instinct qu'il fera corps avec vous, vos goûts et votre style de vie du moment.
Pour ma part, ces rencontres pourraient se limiter à quelques parfums, après être passé par plusieurs essais et constats : les vétivers que j'adore se refusent obstinément à mon corps et à ma peau, j'en suis maintenant convaincu. J'ai également aimé quelques patchoulis, mais là c'est l'inverse, j'ai dû faire une overdose car j'ai plus de mal aujourd'hui. Bien sûr, il y a les occasionnels qui me plaisent, qui me vont bien, qui ne sont pas forcement des chefs-d'oeuvre mais que je porte le week-end, en voyage ou quand il fait chaud. Puis il y a ceux que je collectionne, simplement pour avoir le plaisir de les sentir. Frivolité addictive, mais essentielle.

Malgré cela, j'ai besoin de retrouver ces parfums refuges qui sont les miens, qui m'ont accompagné quelques temps ou m'accompagnent encore. J'ai également besoin de sentir, en espérant trouver, parfois, cette sensation aussi rare qu'agréable.

Le tout premier parfum avec lequel j'ai senti une affinité réelle fut Fahrenheit en 1988. Je l'ai porté pas mal d'années, mais à force de succès, il est devenu codé, avec cette impression de porter le parfum des potes. C'est dommage car je l'aime toujours et j'ai plaisir à le porter très très occasionnellement. Sa version Absolute en est une jolie variation.
Le second "choc" de ce type fut Héritage en 1992 : un parfum que je souhaitais et qui dès les premières notes et dès les premiers jours de commercialisation est devenu "mon" Guerlain. Héritage a longtemps été "mon" sillage, il l'est encore aujourd'hui, mais il est trop beau et capiteux pour mon environnement quotidien actuel. Je ne le porte donc que le week end et occasionnellement, comme en cette période de froids d'automne par exemple.
Le troisième est devenu vraiment "mon" parfum. Il en fut décidé ainsi suite à la création de ce blog et parce qu'il m'accompagne depuis longtemps, un peu partout, sauf en voyage ou quand il fait trop chaud. Méchant Loup en 1997 fut une rencontre, une osmose, je l'aime et le porte depuis le début et en vieillissant, il fait de plus en plus partie de ce que je suis, un article complémentaire lui sera consacré très bientôt.
L'Eau du fier est également un parfum qui me correspond, mais il est si difficile à porter que je me contente de le sentir sur le poignet de temps à autre, pour retrouver son odeur qui me fait voyager. Enfin, le "cuir moderne" comme Dzing de l'Artisan, Black de Bulgari et Cuiron de Helmut Lang, relayé aujourd'hui par Strictly Private de Baldessarini, est une signature avec laquelle je me sens en affinité.
En cette fin 2009, c'est une nouveauté récente qui s'inscrit dans la lignée des notes et des évocations auxquelles je suis sensible : un parfum dont je rêvais comme pour Héritage, et la sensation de faire corps. Ce parfum fera l'objet de mon prochain article.
Un point commun à mon sens entres tous ces parfums : les couleurs chaudes et l'écriture olfactive ambrée, boisée avec une facette cuir et quelques épices bien dosées. Tous pourraient s'inscrire dans un tableau de Denis Frémond (ci-dessus) ou de Henderson Cisz (ci-contre) dont j'aime la chaleur qui en ressort et la lumière travaillée.

Après plusieurs discussions avec des personnes que je connais m'ayant donné le nom de leur parfums, j'ai remarqué que pour beaucoup d'entre elles, un style, une matière, une couleur revenait, comme une signature dont elle n'avaient pas forcement conscience et qui était pourtant bien marquée. En prendre conscience peut être réconfortant et permettre d'être moins hésitant dans ses choix.

Et vous ? Trouvez "votre" parfum vous semble t il difficile ? Quelles seraient vos affinités olfactives ? Votre style ? Les connaissez vous ? En êtes vous conscients ? Quel (s) parfum (s) serait "vous" ?
N'hésitez pas à faire partager vos impressions, je vous remercie d'avance.

Illstrations : Little flower de Denis Frémond et Parisian afternoon de Henderson Cisz.

mercredi 14 octobre 2009

Al Oudh - L'Artisan Parfumeur 2009 : le oud comme un voile.

Le jour où je suis allé chercher mon Bois Farine, j'étais non seulement pressé mais également loin de m'imaginer qu'une surprise m'attendait. En effet, à mon grand étonnement et sans vraiment voir venir la chose, la charmante vendeuse de la boutique me dit, très enthousiasmée qu'elle venait de recevoir un petit flacon du futur parfum de l'Artisan, Al Oudh (le bois). Elle s'empresse de me le faire découvrir alors que je n'ai rien demandé. J'accepte volontiers de m'en faire vaporiser un peu sur une touche et un peu sur la peau pour le tester, mais je dois malheureusement m'éclipser sans pouvoir entamer de vraie discussion. En tout cas, je la remercie aujourd'hui pour cette passion communicative. Pendant les quelques heures qui suivent, le parfum m'accompagne et se grave dans ma mémoire.

Un peu déstabilisé par Havana Vanilla que j'ai encore du mal à appréhender, j'étais un peu sceptique, mais dès la vaporisation sur la peau, Al Oudh dévoile une richesse et une noblesse qui me ravit immédiatement. Comme pour les précédents voyages olfactifs racontés par Bertrand Duchaufour et avec la même impression que lorsque j'ai découvert "mon" parfum, Méchant Loup, je perçois une richesse, une écriture, une texture et une histoire qui me plaisent.

Ce parfum m'évoque immanquablement les touaregs qui conduisaient les caravanes du désert chargées d'épices, d'encens, de soie et de résines précieuses. Les toutes premières notes sont épicées et fumées, le cumin marquant d'emblée son empreinte ourlé autour du poivre rose et de la cardamome ; la peau sous le voile n'est pas loin. Ce voile justement, illustré par une série de notes florales telles la fleur d'oranger et le jasmin, comme un écho aux fleurs d'orient et qui apportent une souplesse, comme un voile de soie brodé.
L'encens constitue un pilier pour structurer la charpente de sa note poivrée, minérale et fumée. Sa note "encens" très fidèle à la résine que l'on diffuse dans les temples et églises procure à Al Oudh un effet proche de Serge Noire, sans le copier pour autant.
Ce n'est qu' après avoir laissé passer cette caravane de notes toutes riches et d'un bel effet naturel que le oud s'impose en maître, dans toute sa pureté et toute sa brutalité : oui, il est animal, voire même légèrement fécal, mais Bertrand Duchaufour connait la maîtrise. Il mesure la note pour que jamais cette brutalité ne soit excessive.
Au bout d'une heure environ, le parfum fait une pirouette et s'adoucit grâce aux notes balsamiques. Vanille, myrrhe et fève tonka lissent les parois de ce parfum facetté.
Certains feront remarquer une certaine filiation entre Al Oudh et des créations de Serge Lutens, comme Serge Noire (encens, fumé) ou El Attarine (cumin, épices, notes balsamiques). Ce qui fait la différence selon moi, c'est une volonté de ne pas être aussi radical dans le parti pris, comme pour mieux raconter une histoire et faire défiler des images.

Contrairement à celui de Le Labo, trop fécal à mon gout et moins rond et fumé que Pure oud de By Kilian, Al Oudh semble plus léger, plus aérien, plus complet, les matières défilant les unes derrière les autres de manières très ordonnées, dans un long cortège. Il est aussi plus compromissif que les Lutens, sans succomber non plus à la facilité. Il se différencierait par sa souplesse, qui serait pour moi comme une volonté d'exprimer l'image d'un voile dans le vent du désert et de raconter fidèlement l'histoire qui l'inspire : Al Oudh, sillage de touareg, le oud comme un voile ? Pour les amateurs de cette belle matière, c'est un must.
J'ai immédiatement aimé cette émotion que me procure souvent l'Artisan Parfumeur mais que je n'avais pas ressentie tout de suite avec Fleur de Liane et Havana Vanille. Cette impression d'écriture légère mais riche et de qualité, de belles matières, texturées et nobles. Bertrand Duchaufour excelle dans l'art de faire défiler des images sous notre nez. Dzongkha, Timbuktu et Méchant Loup sont très fidèles à cet esprit; pour chacun d'eux c'est un paysage imagé qui défile : "Chut ! Le livre s'ouvre, la caravane passe, Al Oudh se raconte !"

Nouveau coup de coeur sur une année 2009 vraiment très riche, Al Oudh est disponible le 20 Novembre, en 100ml uniquement pour un prix qui ne sera pas plus élevé que les autres eaux de parfums, soit environ 100€. Je vous invite également à lire l'avis de graindemusc, qui vient tout juste d'être publié.

dimanche 11 octobre 2009

Le Japon et le parfum : la vie en rose.


"Paris, capitale de la mode ?" Après une visite à Tokyo et Osaka, cet adage semble appartenir au passé. Dans ces deux villes, moins à Kyoto, les femmes vouent un véritable culte à Grace Kelly et Audrey Hepburn, jouant avec les panoplies féminines et les codes vintage comme pour imiter ces icônes, elles le font avec un goût certain et une finesse hors du commun. Leur physique de véritables poupées permet à différents créateurs d'exprimer et de montrer une créativité qui est oubliée dans un Paris qui semble devenu très conformiste et où la féminité se cache. Même à New York, où seule quelques créatures bien nées portent et mettent en valeur la mode, une telle foison n'est pas comparable.

Ce goût prononcé pour le vêtement, le maquillage et la coiffure n'est pas l'apanage des femmes, les hommes n'hésitant à jouer avec le détail qui fait mouche, avec les couleurs et les formes, avec pour point commun le bon goût des associations de couleurs et de la mesure, même dans l'excès. Ce n'est pas un hasard si au détour d'un trottoir de Tokyo l'on croise par moment un photographe discret : il prend des clichés sur les tendances à venir car elles se trouvent bien là bas. Hélas, nous ne sommes pas le Japon, et je doute fort que cette féminité, parfois rétro, parfois glamour, parfois provocante se porte et s'exporte avec une telle sérénité à Paris ou à New York.

Revenons aux parfums. L'avantage d'en croiser peu, c'est de remarquer ceux que les gens portent. Face au constat que le parfum ne faitpas partie des moeurs et soit limité par un réseau de distribution réduit et un climat qui ne facilite pas la diffusion d'un sillage "épais", les marques semblent adopter deux stratégies différentes : un luxe à la françaises, avec des parfums chers et un positionnement élitiste ou des prix accessibles avec de petits formats. Un point commun semble constituer une garantie sine qua none de susciter un minimum la curiosité : la couleur rose ou le parfum de la rose. Ainsi, il est rare de croiser un Chanel ou un Dior : point de J'Adore ou de Coco Mademoiselle croisé pendant ce séjour, ils sont hors de prix. Seuls deux parfums positionnés "luxe" semblent sortir du lot, grâce à leur écriture très fine, un "code" autour du thé ou de la rose et un sillage qui reste discret.
Le premier parfum que j'ai été surpris de croiser là bas est Chloé : son sillage de rose fine et de propre se diffuse très bien dans l'air lourd et humide et correspond parfaitement au look féminin et romantique "à la Audrey Hepburn" adopté par beaucoup de japonaises. Il est disponible sous forme de crème et de poudre qui contribuent à ce qu'il soit approprié dans ce pays. Un succès international, une vraie prouesse dont Michel Almeirac et Amandine Marie peuvent et doivent être fiers.
Le second est Kelly Calèche : sous le climat local, j'ai noté qu'il dévoilait une facette faisant penser au thé vert broyé que les japonais boivent quotidiennement. A Paris, cette facette fait penser à du cuir retourné, à Tokyo, elle s'inscrit naturellement dans la paysage olfactif du pays. La référence à Grace Kelly fait également écho au look que je mentionnais précédemment. En cela, le travail et la percée d'Hermes sont remarquables.

Vient ensuite tout un cortège de parfums que nous avons tendance à rejeter en masse ici en France, car ils ne sont pour nous que des évocations de shampoing ou de gel douche. Prenons alors un peu de recul. En effet, dans un pays où l'on ne se parfume pas mais où l'hygiène est une habitude, gels douche et autres savons s'usent et s'abusent et deviennent du coup de sérieux référents inconscients : pas étonnant alors que les jeunes générations soient sensibles à ce style de parfums, d'autant qu'ils savent rester discrets, comme il se doit dans ce pays. Un point commun, la couleur rose. Les marques qui se distinguent sont Burberry, Bulgari, Givenchy et Lanvin, qui rencontrent un joli succès avec quelques noms : Brit Sheer, Rose Essentielle, Fleur d'Interdit, Jeanne et Rumeur 2 rose (non disponible chez nous) font partie des meilleures ventes.

A deux reprises, j'ai également croisé sur deux femmes un parfum qui semblait être un accord d'encens, de rose et de thé d'une grande finesse mais sans pouvoir mettre un nom dessus. Il restera un mystère et me faisait penser à Tea Rose ou Rose d'Homme. Peut être était-ce l'huile Tea Rose de The Body Shop bien implanté au Japon ?

Chez les hommes, Lanvin Homme Sport semble être le lancement de l'année, il est en tout cas bien en avant. Bulgari semble rencontré un public avec L'Homme et Black et le succès de Insensé Ultramrine, longtemps parfum pour homme le plus vendu au Japon se maintient grâce à quelques flankers.

Enfin, plusieurs parfums se distinguent par leur forme androgyne, comme Ck Be, croisé à plusieurs reprises et qui semble plus présent que Ck One, Eau de thé vert de Bulgari , qui semble toujours présent après pas mal d'années. Enfin et surtout, le top des tops dont le succès international se prouve même dans ce pays : Light Blue pour femme. C'est celui que j'ai croisé le plus souvent et il apparaissait même dans une boutique comme N°1 pour les hommes, prouvant par la même que les codes d''appréciations ne sont pas les mêmes que chez nous. Un accord unique qui rassemble le monde à l'unisson tant on le croise à Paris, New York, Los Angeles et même Tokyo. Une réussite dans ce pays où les habitudes et les codes parfums sont difficiles à percer mais changent lentement, les japonaises craignant sans doute d'être agressives. La marque tente d'ailleurs une nouvelle percée au pays du soleil levant avec Anthology, qui joue sur la mixité, dont Le Bateleur et La Lune devraient être les deux chefs de file grâce à leur justesse.

Pour conclure, j'ai envie de souligner que dans un pays où l'hygiène et la propreté sont des cultes, où Audrey Hepburn est érigée en icône de mode autant que Claudia Shiffer chez nous, où la conscience de l'existence de "l'autre" et d'être utile à un tout fait partie intégrante d'une éducation quotidienne, le fait que le parfum ne soit pas une habitude est une futilité. Quelques parfums percent malgré tout, avec une notion qui me parait essentielle : ne pas être agressifs ou vulgaires.

Dans ce contexte, les quelques parfums portés par des occidentaux ne sachant pas forcement lire les codes locaux par maladresse ou ne souhaitant pas vraiment se fondre dans une culture qui leur est étrangère m'apparaissaient comme une véritable insulte à une finesse de sens et de vie : Aromatic Elixir croisé sur une américaine, Patchouli de Réminiscence sur une française dans un magasin de souvenirs et même le 1 Million bien frenchy porté par l'ami dont je parlais à Osaka. Malgré leur qualités intrinsèques, là bas, c'est vraiment trop.

jeudi 8 octobre 2009

Japon - 2009 : impressions olfactives.


Et voilà, de retour à Paris ! Le Japon, c'est terminé, mais j'y retournerai sans doute tant il y a à découvrir. Je disais dans quelques commentaires précédents que les japonais ne se parfument pas, certes, mais le pays n'est pas pour autant dénué de parfums.

Je découvre les premières odeurs dans les ruelles agitées de Tokyo, où se succèdent un nombre incroyable de petits restaurants proposant sushi, poissons grillés, ramen (bol de soupe), les fameuses et mondialement connues brochettes yakitori et une sorte de petits choux ronds fait avec une pâte à gaufres... Tous ces mets dont nous nous nourrissons pendant ce séjour sont effectivement peu parfumés d'épices ou d'aromates, comme le soulignait muguette dans un commentaire précédent, mais sont toujours très savoureux et très frais, la saveur et la fraîcheur semblant être privilégiées au parfum. Les restaurants qui les proposent sont partout, toujours, dans toutes les villes visitées et vous tiennent constamment en appétit.

En découvrant les premiers jardins japonais de Tokyo, c'est l'odeur omniprésente de la mousse qui se dépose sur les pierres qui flotte dans l'air chaud et humide qui me frappe. Parfois, un vent marin souffle, et un délicieux voile d'embruns marins traverse la ville, parfois, c'est une fleur parfumée à l'odeur d'abricot ou de tubéreuse qui vous titille, rarement somme toute...

Aux abords de la citée impériale de Tokyo, mon attention est attirée par une évidente odeur de patchouli, c'est incroyable. Impossible de savoir si du patchouli était planté à cet endroit ou s'il s'agissait d'une combinaison de senteurs entourant le palais, mais la facette humide et camphrée de cette matière ressortait très fortement. A cela s'ajoutait le parfum ressemblant à du thé vert broyé que dégageaient quelques arbres et le gazon.

Le Japon ne se découvre pas sans visiter quelques temples et châteaux, dont certains se trouvent à Tokyo mais dont la majorité se découvre en partant de Kyoto. Ces temples très largement construits en bois sont généralement imprégnés d'une histoire riche. Le bois les constituant semble s'être patiné de chaque étape de la vie du temple, ce qui fait qu'aucun d'entre eux n'a la même odeur. C'est pour moi ce qui surprend le plus : même si la trame commune de l'odeur de ces temples serait une combinaison d'encens naturel de cire de bois apportée par les fidèles, ils peuvent aussi sentir la pierre, la résine, le silex des armes qu'ils ont abrité comme au château de Himeji, le feu de bois, les épices, les fleurs et même les tissus. Plus surprenant, toujours à Himeji, cette odeur de tabac blond, de thym qui flotte dans une aile du château et un soupçon de poudre de riz dans les quartiers de la reine. Tout cela est très subtil, mais les nuances me sautent au nez. Autre exemple, à l'entrée du temple de Ninna-ji à Kyoto, je suis surpris pas la ressemblance avec la vanille et la barbe à papa qu'émet le bois de la porte d'entrée : effectivement, point de marchant ou de boutiques alimentaires aux alentours, c'est bien le bois qui sent cela.

Kyoto est une ville où j'ai du être plus sensible aux odeurs car une odeur accompagne aussi le quotidien, contrairement à Tokyo ; celle du gasoil des bus, que l'on avait oubliée. Le matin en sortant de l'hôtel, c'est quasiment l'odeur urbaine de Black de Bulgari qui me saute au nez : surprenant.

Plus tard pendant le séjour, je fais remarqué à un ami qui vit là bas que parfois, en ville, on peut sentir quelque chose de peu agréable, entre le vomis et la poubelle : il m'explique que ce sont les Ginkgo, un arbre résistant, souvent planté dans les centres urbains et dont les fruits dégagent une odeur désagréable quand ils tombent. Effectivement, à ce moment, nous sommes sous une allée de Ginkgo au centre d'Osaka.

Ce que je retiens de tout cela c'est que le parfum fait partie du quotidien mais on ne le trouve pas sur les personnes ou très rarement, mais plutôt dans la finesse d'une poudre, dans le travail d'un encens, dans les temples ou les maisons.

Les japonais (es) aiment pourtant les odeurs et sentir bon, car au détour d'une rue, lorsque l'on croise une boutique "Lush", une envie irrésistible de se laver avec un bloc de savon ludique et qui sent bon vous prend et vous fait vous sentir bien dans le tumulte environnant. Le japonais est propre, mais ne "consomme" pas le parfum autant que nous, c'est un fait. Cependant, la percée exceptionnelle de certains parfums semblent confirmer que cela peut changer, qu'ils ne sont point fermés, mais pas ouverts à tout non plus. Notre regard occidental ou d'esthète bien français, lui, doit par contre prendre beaucoup de recul. Je tenterai de vous en faire part très bientôt dans un prochain article. Quelques regrets tout de même : ne pas avoir eu assez de temps pour aller humer l'air des montagnes et ne pas avoir vu de sakura en fleurs.

En préambule au prochain article j'aimerai vous demander : quel sont d'après vous les parfums ou type de parfums qui plaisent au Japon ?

jeudi 1 octobre 2009

Bonjour du Japon.

Un petit mot rapide du Japon, qui reserve de belles surprises parfumees, mais ou une chose est certaine, le parfum n'est pas dans les moeurs. A bientot pour quelques articles sur les parfums de ce pays.