mercredi 30 juin 2010

Berlin : unter den linden, tilleuls au vent.

Après un petit spleen la semaine dernière, ce n'est pas le court séjour à Berlin qui me redonnera le moral concernant les lancements et la présence des parfums sur le marché : je rejoins l'avis de Grain de Musc, trop c'est trop et un constat s'impose d'autant plus au retour. Primo, certaines marques n'ont rien à faire en parfumerie que de n'être vendues qu'en supermarché, occupent une place importante dans les rayons des magasins et empêchent à certaines créations d'émerger, d'autres marques proposent trop de produits avec des qualités et un intérêt très varié, créant ainsi une discordance dans leur proposition, leur discours et leur image. Secondo, il doit y avoir du blanchiment d'argent dans les lancements de certaines marques de niche, qui émergent de nulle part avec 20 nouveautés d'un coup dont certaines sont intéressantes et d'autres beaucoup moins mais franchement, à quoi ça rime ? Qui prend le temps de sentir 20 parfums d'un coup ? Ou alors elles servent de laboratoire d'idées ? Pour ma part, en 5 snifs, j'en avais marre à tel point que je n'ai même pas retenu le nom de la marque.
Un autre constat : combien d'imitations de Le Mâle pour hommes, combien de fougères épicées dihydromyrcenolées ? Combien de muguets girly fruity qui se ressemblent tous ? Non franchement, il faudrait du ménage, et très vite ! Mais bon, puisque elles sont là, c'est qu'il doit y avoir des clients ?

Unter den Linden (sous les tilleuls) :
Passons maintenant à un brin de sensations agréables. De Alexander Platz à Kreuzberg, du Ku'dam à Prenzlauerberg en passant par la fameuse allée Unter den Linden, véritable poumon vert en plein coeur de la ville connu pour ces nombreux tilleuls qui lui ont donné son nom, Berlin, en cette saison et sous un magnifique soleil d'été, embaume les tilleuls. Au départ, on a un peu l'impression que la ville sent le shampoing mais que nenni, c'est bien l'odeur naturelle qui se diffuse partout. Le tilleul peut en effet sentir le propre, le shampoing ou la lessive, mais il présente aussi des contours de miel, de fruits exotiques, de peau chauffée au soleil et de vanille parfois. Je trouve en outre son parfum très féminin et très doux. C'est une odeur que j'adore depuis mon plus jeune age, car elle me rappelle la campagne, le jardin du Palais royal à Paris et beaucoup de souvenirs.
Pourtant, peu de parfums l'ont osé avec bonheur. C'est pourquoi j'ai choisi une petite sélection des plus beaux parfums où le tilleul marque son empreinte.

Narciso Rodriguez For Her Musc Collection : hélas série limitée disparue depuis l'an dernier, ce parfum était celui dont l'odeur se rapprochait le plus fidèlement de celle que je sentais dans l'air berlinois. Incontestablement un des plus beau tilleul jamais senti, très fidèle à la nature, même s'il n'en donne pourtant pas l'impression. Dommage qu'il soit discontinué.

Close de Gap : petite merveille à petit prix, que l'on aurait tort de ne pas vouloir connaître. Ce parfum me redonne le sourire, car il prouve qu'il existe bien de jolies créations très grand public quand les directions artistiques, les marketeurs, les parfumeurs et les économistes se parlent et se comprennent. Un parfum international intelligent, un tilleul léger et tout doux, presque doudou et jamais senti de manière aussi aboutie. Il ne faut pas passer à coté.

L'Eau du Ciel d'Annick Goutal : celui-ci me semble plus abstrait, plus travaillé aussi mais pour le coup moins fidèle au parfum naturel du tilleul. Esthétisé autour de notes de foin coupé et de bois blancs, il n'en reste pas moins évocateur de moments champêtres, lorsque l'on sirote un verre de rosé au fond du jardin avec quelques amis. A redécouvrir et à adopter, un tilleul d'artiste.


Champs Elysées de Guerlain : même si c'est plutôt le mimosa qui est en son centre, le tilleul joue un rôle important dans la structure de Champs Elysées. Un floral pétillant, qui joue avec les facettes vanillées du mimosa et du tilleul. Il s'orne d'autres fleurs plus piquantes pour évoquer une féminité joyeuse. J'aime beaucoup ce parfum et une balade dans Berlin m'a donné envie de le sentir à nouveau.

Tilleul
des parfums d'Orsay : fidèle à la nature et surtout pionnier du genre, c'est le plus miel de tous, mais je le trouve un peu trop "brut". A redécouvrir rien que pour la note.

Pour la maison, l'odeur la plus fidèle est la bougie Tilleuls au vent de l'Artisan Parfumeur. Je l'ai fait brûler ce matin. "Coucou Thierry, tu es rentré !" J'avais juste oublié !

Pour ce court séjour, le parfum qui m'a accompagné était Fumerie Turque. Vous me croirez ou non, mais même pas temps chaud, c'est une petite merveille. J'ai bien aimé Kreuzberg, comme par hasard ?

Ilustration : Lovis Corinth, Berlin - Unter den Linden.

8 commentaires:

Thierry a dit…

Déjà rentré ? En sentant les tilleuls dans Paris, je me suis dit que tu aurais peut-être la chance de les sentir dans leur grandeur à Berlin. Pas sur Unter den Linden (ils ont tous disparu, non ? ) mais dans Kreuzberg qui est mon quartier préféré. As-tu longé le Landwehr Kanal à pied ?
Pour moi, comme tu le sais, Eau du Ciel est une merveille... Je crains que dans 10 jours ce soit la seule façon de sentir le tilleul à Berlin ?

Thierry Blondeau a dit…

Effectivement, c'est à Kreuzberg qu'ils y en a vraiment beaucoup, mais je les ai senti partout, tout le temps. J'ai vraiment aimé ce quartier, surtout pendant un match de foot ou tu imagines l'ambiance festive et décontractée qui y régnait. Je n'ai pas longé le Landwehr canal mais ai vu tellement d'autres choses sur l'histoire de la ville.
Des plaies, une histoire, une odeur, tout pour plaire, avec un prime un diner au restaurant panoramique tournant de la Fernsehturm. Un vrai bonheur à refaire pour ma part et à conseiller à celles et ceux qui veulent y aller.
Pourtant, partout, trop de parfums cheap et ils n'ont même pas été foutus de mettre une once de tilleul dans ce qu'ils vendent comme "Breath of Berlin"...qui se vend comme des brotchen. Une honte, à vomir sur ce que peut être parfois le business du parfum dans toute sa splendeur et surtout, sur le manque de recul des touristes qui achètent. Déprimant.

carmencanada /Grain de Musc a dit…

L'odeur des tilleuls est enivrante, non? Aucun parfum ne l'a vraiment encore captée pour moi, je suis d'accord que celle des parfums d'Orsay, qui est belle, reste trop miellée/infusion pour être vraiment fidèle. Il me semble que chez Camille Goutal on pourrait très bien faire cela, mais apparemment, ce doit être difficile puisque ce n'est pas encore fait!

soph a dit…

contente que berlin vous ait plu, on y va svt, c'est une ville vraiment intéressante

sinon, même s'il ne limite aps du tout au tilleul, j'aime bien la chasse aux papillons qui en contient il me semble (avec le jasmin, la fleur d'oranger..)

Thierry Blondeau a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Thierry Blondeau a dit…

Le problème de travailler un soliflore tilleul, c'est qu'il est difficile d'éviter l'écueil de notes à connotation propre ou savon puisqu'elles le sont aussi dans le sillage naturel de cet arbre. A ce titre, Narciso Musc Collection et Close sont des exemples parfaits, que l'on aime ou pas. Enivrants, pour moi, c'est certain.
Des travaux comme l'Eau du Ciel et la Chasse au papillons (merci Sophie pour ce rappel)montrent que le tilleul peut aussi être traité et esthétisé mais dans ce cas, le résultat final n'est plus un soliflore. Est-il d'ailleurs encore vraiment un tilleul tant ces parfums rappellent des images de campagne fleurie que le tilleul en lui même ?
En outre, le tilleul se noie souvent dans les compositions ou il apportera un soutient, une structure, mais sans que personne ne le remarque vraiment, comme dans Champs Elysées ou Narciso for Her (l'original) par exemple. Qui le devine vraiment dans ces parfums ?
En tout cas une chose est sûr, la note pourrait bien faire un petit come back et intéresse surement certains parfumeurs.

JulienFromDijon a dit…

Ton billet m'étonne, car à la même période, à Mayence, j'ai fait la même expérience troublante.
Il y a un tilleul si grand dans un recoin de la place de la gare centrale, que personne ne le voit, mais il exhalait fortement. C'était très agréable, l'odeur était partout, je retiens ce côté miel, vert et fleuri.
Je retiens aussi avoir partager la nouvelle à des amies, qui n'ont pas eu l'air d'écouter. J'avais l'impression d'être le seul à réaliser. Dans le bus, c'était comme si je cherchais l'odeur d'un shampoing particulièrement agréable.

Après j'ai réalisé que c'était toute la ville qui sentait celà. Tandis que je faisais un peu de sport le soir.
Ca m'a fait pensé à ces coraux qui libèrent leur spore au même moment de l'année sur tout le globe, sans qu'on sache pourquoi.
Si je devais rapprocher la note d'un parfum, ce serait de Joy, edt ou extrait. Le jasmin vert, la rose naturelle difficile à discerner, un peu du santal en arrière plan, et une certaine qualité "liquide" dans l'abstraction, me font penser au tilleul.

Laurinha a dit…

Thierry, vous connaissez sans doute déjà l'adresse, mais une de mes boutiques parfumées favorites dans cette ville est The Different Scent (en anglais dans le texte!) dans Mitte, avec entre autres trésors les créations d'Andy Tauer. Un bon complément a ce qu'offre Quartier 205 sur la Friedrichstrasse. Voici leur adresse internet á toutes fins utiles: http://www.thedifferentscent.de/