lundi 27 janvier 2014

Fahrenheit Parfum - Dior 2014 : mariage pour tous ?

Tout le monde connait la signification du mot mariage dans le langage courant. Mais sait-on se que cela veut dire dans un process industriel, et plus particulièrement dans le monde de l'automobile ? Sur une auto, c'est le moment où la carrosserie de la voiture rejoint l'ensemble moteur/boite/châssis et soubassement pour former un véhicule entier et assemblé. Dans le monde industriel automobile, ces deux éléments sont conçus et fabriqués séparément avant ce fameux mariage. Mais quel est donc le rapport avec le parfum et Fahrenheit Parfum de Dior me direz vous ? 

Peut être qu'il n'y en a pas, je l'admets volontiers, mais à force de découvrir les différentes pontes de la chaine Demachy, je ne peux m'empêcher de penser que chez Dior, ces process industriels qui sont monnaie courante en automobile depuis de nombreuses années, ont fait leur entré et sont mis en application de manière à optimiser les coûts de production.

Ce mariage industriel, chez Dior, il semble qu'on le veuille pour tous. En découvrant Fahrenheit Parfum, et surtout, en le laissant évoluer quelques temps sur peau, comment ne pas penser qu'il y a comme un tronc commun avec Dior Homme, l'Eau Sauvage Extrême et même certains féminins ? Les notes qui restent sur la peau au bout de quelques heures me semblent, dans beaucoup de parfums de la marque, être les mêmes. Pour moi, cette armature commune se définirait comme une trame boisée, épicée, légèrement ambrée et irisée, et serait déclinée à toutes les sauces, car elle fonctionne avec beaucoup de familles et de signatures maison. Du coup, ce qui différencie les parfums n'est qu'un travail à part de cette base, qui serait la signature Fahrenheit, Dior Homme, Eau Sauvage, comme on dessinerait une automobile pour une marque précise et pour donner une identité. En automobile, ce travail de style est ensuite assemblé à la base commune à plusieurs autos, voir à plusieurs marques, procédé dont le groupe Volkswagen s'est fait spécialiste. Chez Dior, ça semble se passer de la même manière. Lors de la fabrication, la base commune dont je parle semble être "mariée" sur une chaine de montage à la signature du parfum pour donner le parfum final. Quelques travaux de finition seraient ensuite ajoutés pour fignoler le parfum et le différencier dans la gamme. Fahrenheit Parfum représente pour moi ce travail "industriel", ce process de pouvoir décliner rapidement une nouveauté à partir de quelque chose d'existant. 
Les parfums assemblés industriellement sont finalement assez semblables, et destinés à plaire au plus grand nombre. Ils n'apportent plus grand chose, et surtout, ne semblent plus du tout distinctifs ou signés. En revanche, la marque réalise de fabuleuses économies d'échelle, que le markéting semble devoir masquer sous un packaging différenciant, avec du verre bien épais pour "faire cher" et qualitatif.

Lassant, barbant même, car à force, on ne s'y retrouve plus et on a même plus envie de se laisser séduire. L'affectif avec le parfum devenant une non-réaction devant cette froideur industrielle, bien faite certes, et sans gros défaut, mais pas vraiment palpitante. C'est le cas de Fahrenheit Parfum, bien fait et dont la note myrrhe me parait bien sympa, qualitative même et bien dans l'air du temps, mais il  ne me provoque aucune émotion. 

Illustration ; mariage pour tous et Dior

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Votre commentaire est très pertinent.
On est bien loin de la volonté de garder l'esprit d'une marque qui prédominait jusque dans les années 1970. On différenciait alors les Guerlain des Dior, ou les Patou des Ricci par exemple. Mais chaque parfum, à l'intérieur d'une marque, avait son identité et celle-ci était plutôt marquée. La volonté de rationaliser la production ne semblait pas être le moteur de cet esprit de famille que l'on retrouvait par exemple entre Coeur Joie, Capricci et L'Air du temps de Ricci. Surtout lorsqu'on sait que les parfums, avant le marketing, n'étaient jamais pensés pour plaire à tout le monde mais s'adressaient à ceux qui tombaient sous leur charme. Les autres trouvaient toujours leur bonheur ailleurs, les propositions étant nombreuses.
Dans certains domaines (comme la parfumerie) il semblerait, hélas, que le "avant c'était mieux" soit une triste réalité.

Thierry Blondeau a dit…

Je ne suis pas du tout partisan ni promotteur du "avant c'était mieux",car on peut faire de très belles choses aujourd'hui avec des matières qui n'existaient pas à l'époque et de la volonté, du courage et un charisme. Des travaux comme 1932, Beige et les Extraits chez Chanel, les travaux de reprises de la qualité des matières premières par Thierry Wasser chez Guerlain, le style qu'impose Mathilde Laurent chez Cartier, tout cela est un vrai travail de parfumeur, avec une finesse et une exigence.
Chez Dior, j'ai le sentiment que le seul mot d'ordre est de faire comme Procter : optimiser "pour tous", et maximiser les marges, point à la ligne !