Postulat de base : l'homme moderne et citadin est actif, ne veut pas "cocotter", commence à choisir lui même son parfum, n'y connait pas grand chose, et surtout, ne veut pas forcement un parfum statutaire, mais plutôt un "lifestyle", dans lequel il se sent bien, avec des mots strictement issus de tests consommateurs en tête : ce parfum est "citronné, jeune, frais" et il sent bon.
Alors que les pionniers du genre, qui ont sans doute en interne les moyens de recruter des visionnaires, en sont à revenir aux sources pour proposer une variante "sport" plus signée et en droite ligne avec leur ainé originel, d'autres peut être moins fins limiers, se contentent de suivre. Mais, comme si le ridicule ne faisait peur à personne, c'est tous au même moment qu'ils s'y mettent. A oui, bien sûr, booster par les pionniers qui décèlent les tendances, les chiffres de vente de la parfumerie masculine explosent et suscitent les convoitises. Mais pourquoi se compliquer la vie quand on peut faire comme les copains ? Comme la recette est évidente, on l'applique sans recul. A quelques rares exceptions, prenez le mot "sport", écrivez le en rouge sur un flacon de forme connue, soutenez le tout d'une idée de transparence par un effet lumineux ou givré, surlignez de noir pour insister que l'on est bien "chez les mecs" et voilà, vous avez votre nouveauté. Pour le jus, une envolée d'agrumes pétillants, soutenus plus ou moins par des notes aromatiques et "mentholés", quelques fois greffés de facettes marines, ozoniques, ou vertes. Ajoutez un effet boisé pour le coté viril, quelques muscs blancs pour soutenir la structure et surtout "que ça tienne", et le tour est joué. Et voilà alors ce que cela donne :
Bien loin des ELO ou d'un Andy Tauer qui veulent raconter une histoire avec de vraies créations, des Thierry Mugler qui résistent à la tentation en apportant une vraie proposition design à leur variante fraîche, on oublie l'originalité et les réelles qualités créatives d'un Boss Bottled, d'un Kenzo Homme, d'un The One Gentleman pour nous déverser une avalanche de "sport" et envahir le marché.
Personnellement, je m'ennuie à sentir tout cela, mais je ne peux cependant m'empêcher de nuancer mon propos. En effet, les progrès effectués dans le traitement des agrumes, des notes aromatiques ou boisées, qui parfois dévoilent une transparence inattendue par un traitement C02 par exemple, permettent de faire en sorte que ces accords, bien que peu originaux, soient souvent très bien faits, d'un équilibre assez juste, d'une finesse relativement "naturelle" et finalement pas si mal que ça par rapport à certains parfums dits "sportifs" sortis il y a 10 ans ou plus, qui jouaient beaucoup plus dans le grosse brute bien camphrée.
Malgré le marketing qui prime sur le créatif, constatant que même l'Artisan Parfumeur, avec un N°9 finalement assez proche d'un Allure Homme Sport Cologne fait peu d'efforts, j'en déduis que ces parfums, en dévoilant parfois aussi des notes de thé vert, de gingembre ou de figue, dans une parfumerie commerciale qui finalement l'a toujours été, contribuent factuellement à l'amélioration du qualitatif. On ne peut pas leur reprocher de sentir mauvais ou d'être trop clivants. Un constat, peut être pas si déplorable que ça au final, mais qui pour ma part, m'ennuie beaucoup.
Pas moins de 9 nouveaux "Sport" depuis Janvier 2012 : Boss Bottled Sport, The One Sport, Kenzo Homme Sport, Issey Miyake pour Homme Sport, Allure Homme Sport Extrème, Dior Homme Sport 2, Instinct Homme Sport, Porsche Design Sport, Play Sport.
Les "Sport" qui existaient déjà : Polo Sport, Armani Code Sport, Allure Homme Sport & Sport Cologne, Dior Homme Sport 1, Gucci by Gucci Homme Sport, Lanvin Homme Sport, Habit Rouge Sport.
Illustrations : Rosemary Taylor Studio, site internet ici. Hugo Boss, Givenchy, Dolce et Gabbana, Kenzo, Porsche Design.
5 commentaires:
Notre marché mainstream commence sérieusement à ressembler au marché asiatique, ne trouves-tu pas ? :)
Ce n'est pas faux. J'aurais plutôt tendance à dire que le marché s'internationalise,comme tout, mais avec une tendance quand même à des parfums "frais" de meilleurs facture que ce qui était fait avant avec de banales Colognes toutes sur le même modèle, que reprend même la parfumerie de niche actuellement, car les marges sont plus attractives.
Le prix, c'est qu'à de trop rares exceptions (Benefit, Mugler), la créativité, l'audace, ne semblent plus avoir leur place en parfumerie mainstream,constat qui lui, n'est pas nouveau, mais ce qui me peine, c'est qu'on oublie, on occulte les références !!
Benefit, la marque de maquillage ? C'est Dior pour le nez je crois bien.. So Hooked on Carmella est vraiment pas mal du tout cela dit. Je ne sais pas si on parle du même Benefit ?
Oui, nous parlons bien du même. J'ai eu un vrai coup de coeur pour les 3 premiers parfums (ainsi que pour le concept), vraiment créatifs, originaux même s'ils sont créés dans un esprit ludique et léger. Le dernier lui, fait partie de la dégoulinante de patchoufruits et n'apporte rien à la gamme ! Et en effet, je crois bien que LVMH est derrière.
Le concept est réussi, c'est bien LVMH qui est derrière. Benefit, j'en connais le maquillage, fort bien conçu, novateur parfois, quant aux parfums j'ai adopté So Hooked on Carmella que je porte de temps en temps ( allergies hélas, bon je ne sais pas à quoi, Carmella est marqué par rapport à certains autres ). Le flacon est sympathique, le packaging aussi bref une réussite et à 36 € pourquoi s'en priver ! Le tout dernier n'est pas encore arrivé jusqu'ici mais Carmella est mon préféré depuis sa sortie.
Benefit est une marque qui est difficile au premier abord, les packagings sont pour beaucoup dans cette méfiance, ensuite en général on y adhère complètement ! Avec des blushes comme " Dallas ", Hervana " ou " Thrrob " la cliente française préfère rester sur Chanel alors que Benefit fait des miracles pour le teint avec des produits véritablement excellents. J'espère que d'autres parfums verront le jour... Je ne sais pas si ça marche en France, pour ma part Benefit j'adore positivement mais sans vouloir me jeter des fleurs, je suis très ouverte question produits de beauté, dans ma tranche d'âge les femmes utilisent rarement Benefit, ce en quoi elles ont bien tort. Le concept est intéressant, les produits aussi.
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